A Sète, Hala Mohammad évoque la Syrie, "ce pays de poètes"
La vie de Hala Mohammad est placée sous le signe de l’absence. Absence de ses amis disparus, absence de son pays qu’elle a dû quitter en 2011 au début d’une révolution avortée. Depuis, pour elle, "la poésie est la voix des absents".
"L’absence est une blessure", nous confie-t-elle au cours de cet entretien dans une ruelle de Sète. Une absence physique, pesante comme une mémoire saturée, entretenue non par nostalgie mais par esprit de survie.
"Une nécessité poétique"
Elle organise régulièrement à Paris où elle vit des rencontres bilingues en français et en arabe où sont dits des textes de poètes en exil en Europe et de poètes emprisonnés en Syrie. Son ciné-club syrien perpetue, à Paris, toujours en mode bilingue, le registre documentaire d’une cinématographie en pleine effervescence."On n’a jamais cru que dans ce pays de poètes…, on allait devenir des réfugiés." Et pourtant… malgré l’influence et la portée d’un poète comme Nizar Qabbani (1923-1998), l’actualité syrienne pourrait éloigner la poésie des préoccupations. Or les réfugiés la rendent vivace et parler de poésie à propos de la Syrie n’est pas une hérésie. Le festival Voix vives de Sète ne manque pas d’inviter à chaque édition des poètes syriens, tels Adonis ou Maram al Masri en 2015. Hala Mohammad évoque même "une nécessité poétique", une forme de réflexion pour entretenir la mémoire collective, une réflexion impérieuse pour "toute l’humanité" pas seulement pour les Syriens.
Extrait du recueil "Ce peu de vie" (bilingue arabe, français, traduction Antoine Jockey), éditions Al Manar, (juillet 2016) :
La patrie
A le goût de sel dans la mémoire
Entre la rue et la maison
Tous les chemins mènent au paradis.
Les absents confient leurs habitudes
Aux gens du quartier
Pour qu’on n’éteigne pas les lumières
Dans la rue
Pour qu’on ne ferme pas les fenêtres
A la figure des passants.
Interview Christian Tortel, Kelly Pujar, Bruno Haetjens.
Montage : Nicole Coisman. Mixage : Paul Evrard
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