Annulation du salon Livre Paris : "Sage décision, mais triste nouvelle", regrette-t-on chez Albin Michel
L'annonce de l'annulation du salon Livre Paris, grand rendez-vous annuel de l'édition, à moins de trois semaines de l'événement, est une douche froide pour le secteur, déjà fragile économiquement.
Le salon Livre Paris, prévu du 20 au 23 mars, a été annulé à la suite des décisions gouvernementales "d'interdire des rassemblements de plus de 5.000 personnes en milieu confiné", dans le contexte de l'épidémie du coronavirus.
La nouvelle a été annoncée dimanche soir dans un communiqué par Vincent Montagne, président du SNE (Syndicat national de l'édition) et du salon Livre Paris.
Mauvaise nouvelle pour l'édition, secteur fragile économiquement, et marqué ces derniers mois par le débat sur la rémunération des auteurs. En 2018, derniers chiffres disponibles, le SNE avait fait état d'une baisse de 1,6% du chiffre d'affaires de l'édition (hors livres scolaires), à 2,24 milliards d'euros. La chute des ventes de livre (-4,9%) ne compensait pas la hausse des cessions de droits (+5,4%).
Le rapport Racine, réalisé par l'ancien président de la Bibliothèque nationale de France Bruno Racine, formule 23 recommandations visant à améliorer la situation économique et sociale des artistes-auteurs, dont les écrivains.
"Il n'y aura pas de fête"
Si le groupe Madrigall (Gallimard, Flammarion, POL, J'ai lu, Denoël, etc.), ainsi que les éditions de Minuit, avaient annoncé qu'ils se retiraient du salon cette année, pour les autres éditeurs présents, cette annonce à moins de trois semaines du début de l'événement fait un peu l'effet d'une douche froide. "C'est une sage décision", note Mickaël Palvin, directeur marketing chez Albin Michel, d'autant que dans ce contexte, ajoute-t-il, "on courait le risque que les gens restent chez eux".
"Mais c'est un peu rageant, à trois semaines de l'événement, avec tous les efforts qui ont été mis en branle. C'est beaucoup d'énergie pour rien."
"Il n'y aura pas de fête", regrette-t-il. La maison d'édition devait célébrer en grande pompe au salon ses 120 ans d'existence. Et au-delà, "pour nous le salon Livre Paris reste une grande fête. Il y a deux grands évènements dans l'année pour le livre en France, la rentrée littéraire de l'automne, et le salon du livre. Ce sont nos deux solstices", confie Mickaël Palvin.
Conséquences économiques
"A l'heure qu'il est nous avons des interrogations sur l'aspect financier", confie Mickaël Palvin. "J'espère qu'une structure comme Reed Expo a des assurances", confie-t-il. Les factures pour la location de l'espace de 240 m2 sur le salon ont déjà été réglées depuis le mois de janvier à cette entreprise qui organise le salon.
"Nous espérons ne pas perdre d'argent, voire faire des économies", souligne le directeur du marketing. "Il faut savoir qu'aucune maison d'édition ne rentabilise sa présence au salon. C'est un investissement, que nous faisons parce que pour nous cela reste un événement majeur, une 'grande messe', un rendez-vous pour les lecteurs, les auteurs, les éditeurs", souligne Mickaël Palvin.
La maison d'édition engage 250.000 euros pour le salon. "Tout compris : la location de l'espace, le montage du stand, les salaires des 12 libraires qui tiennent le stand... Avec les recettes, au bout du compte, cela nous coûte entre 70 et 80.000 euros."
"Une année blanche"
S'il regrette l'annulation de cette édition 2020, Mickaël Palvin souhaiterait qu'elle constitue "une année blanche", une opportunité, peut-être, pour "repenser le fonctionnement du salon", marqué cette année par la défection du groupe Madrigall.
"Que serait un salon Livre Paris sans Amélie Nothomb ?", s'amuse-t-il. "Nous continuerons à y aller car nous ne voudrions en aucun cas être les fossoyeurs de cette belle fête annuelle."
"Mais par contre, je trouve que le prix d'entrée du salon est un vrai problème. Je pense que faire payer 12 euros l'entrée, c'est très clivant. Symboliquement et politiquement, il faudrait rendre cet événement gratuit, pour affirmer la place et le rôle du livre dans notre pays.", conclut-il.
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