"Le Cinéma de Starfix", la revue qui a changé la presse cinéma
Génération Starfix
Quand paraît "Starfix" en 1983, "Première" est le titre phare de la presse cinéma depuis 7 ans, "Les Cahiers du cinéma" peinent à sortir de leur politisation des années 70, "Positif" est taxé d’"élitisme", "La Revue du cinéma" vivote, et "Studio" n’est pas encore né. Débarque une bande de trublions de 20 ans, biberonnés au cinéma de genre qui va mettre un coup de pied dans la fourmilière.
Préfacé par le réalisateur américain William Friedkin, un "chouchou" de la rédaction, cette belle monographie est suivie d’une introduction de Mathieu Kassovitz, acteur et réalisateur qui relève à part entière d’une "génération Starfix", adepte d’un cinéma de genre décrié, et qui voyait là sa réhabilitation, avec un argumentaire socio-culturel solide, sans se prendre au sérieux.S’ensuit un florilège d’articles reproduits à l’exact, puisés dans les sept années de publication de la revue, où défilent "Evil Dead", "Zombies", "Rambo", "Tess", les "James Bond" avec Roger Moore, "Le Dernier combat", "Christine", "Mortelle randonnée", "Les Prédateurs", "Vidéodrome", "Mad Max", "Highlander", "Brazil"… mais aussi les chroniques "Z" de Dan Brady, de rares pubs vintage, jusqu’à une sélection du terrible courrier des lecteurs géré par le cinglant colonel Kurtz… Initié par les éditeurs de cassettes vidéo Scherzo qui distribue des petites bandes de genre, en pleine expansion du marché de la VHS, Starfix voit à la tête de sa rédaction Christophe Gans, un ami de la maison. Futur réalisateur de "Crying Freeman", "Le Pacte des loups", "Silent Hill", ou "La Belle et la bête", Gans a 22 ans et rédigeait jusqu’alors l’excellent fanzine consacré au cinéma fantastique "Rhésus Zéro".
Plus lecteur de "L’écran fantastique" et de "Mad Movies" (deux titres issus du fanzinat), que des "Cahiers" ou "Première", cinéphile et "cinéphage", il réunit autour de lui le noyau dur de la rédaction : Nicolas Boukrief, Doug Headline (qui deviendront réalisateurs), Frédéric Albert Levy (transfuge de l’Ecran fantastique) et François Cognard (futur producteur). Les rejoindra notamment Hélène Merrick, dont "La Fille de Starfix" (Editions Ecriturial) est le parfait complément du "Cinéma de Starfix". Tous apporte de nouvelles contributions en fin de volume, pour humer l’air du temps, la mort de Bowie, celle de Zulawski, l’ère des séries, la persistance d’une cinéphilie (?)…
Starforce
La revue mensuelle existera jusqu’en 1990 en se démarquant de ses pairs et criant haut et fort son amour pour le cinéma de genre, avec un penchant pour le fantastique et la science-fiction, petites ou grosses productions, le Bis, puis en s’intéressant de plus en plus aux films d’auteurs en défendant bec et ongles Andrzej Zulawski par exemple. Dès le premier numéro (janvier 1983) la donne s’affiche, avec une couverture et un gros dossier consacré à "Dark Crystal" (lauréat du Festival d’Avoriaz), mais aussi à Dario Argento qui sort "Ténèbres" et à un jeune réalisateur américain de 22 ans, Sam Raimi, qui vient de remporter la Licorne d’or du Festival du film fantastique et de science-fiction de Paris au Grand Rex, avec "Evil Dead".Mais l’innovation et le flair se vérifient aussi dans une maquette novatrice, avec un équilibre entre un texte fourni, très argumenté et partisan, et des photos en couleurs pleine page ou en double page qui donnent un sacré coup de vieux à la concurrence, obligée de se recadrer promptement. C’est la "Starforce" en marche. "Studio" comprendra le credo en 1987, mais en adoptant une formule plus glamour. Très partisane dans ses choix, de plus en plus éclectique, la revue met en avant des réalisateurs alors confidentiels, en les rendant accessibles au plus grand nombre. Brian De Palma commençait à se faire un nom, mais John Carpenter, Dario Argento, ou David Cronenberg étaient connus des seuls aficionados, quant à Paul Verhoven, c’est pratiquement une découverte Starfix qui lui consacre un dossier pour la sortie de "La Chair et le sang" (1985).
Comme "Actuel" fut le porte-parole de la contreculture à partir de 1967, puis "Métal Hurlant" d’une nouvelle bande-dessinée à compter de 1975, "Starfix" est un peu le rejeton de ces deux-là, comme initiateur d’une culture "Pop" aujourd’hui au firmament. Preuve supplémentaire de son avance sur son temps, qui ne connaissait pas Internet ni les smartphones, où l'on se goinfrait de VHS, et préférait goûter le sirop des salles au téléchargement froid de films que l’on ne regarde jamais. Nostalgia, nostalgia…
Le Cinéma de Starfix - Souvenir du futur
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