"Plossu Paris" : le regard du photographe sur la capitale depuis 60 ans
Né en 1945 en Indochine, Bernard Plossu voyage avec son père en Afrique du Nord en 1958, part pour le Mexique en 1965 avant de vivre en Californie et au Nouveau Mexique. Il se rend aussi en Afrique, en Italie, il vivra en Andalousie...
Quand on regarde le livre de sa rétrospective de 2007 à Strasbourg, on s'aperçoit qu'il y a très peu de photos de Paris, et les quelques-unes qui s'y trouvent invitent pour la plupart à partir ailleurs : "Vera Cruz" à l'affiche d'un cinéma, la façade du Terminus Nord...
Une enfance parisienne
Pourtant, "Paris est la ville que j'ai habitée enfant, et elle a beaucoup compté pour moi", écrit-il. Surtout pendant son adolescence, entre 1960 et 1965, une époque où il passait sa vie à la cinémathèque et dans les salles du Quartier latin.
Enfant déjà, il a photographié la ville. Et puis plus tard, à chaque fois qu'il repassait ou qu'il revenait. Alors, "mon regard était comme neuf", dit-il. Ce sont donc plus de 60 ans d'images de Paris qu'il a rassemblées dans "Paris-Plossu" (éditions Marval-Rue Visconti).
La première, en couleur, une grappe de ballons au bord de la place de l'Etoile, date de 1954. Il avait neuf ans.
Les changements de lumière
"Ce qui me plaît à Paris, dit-il, ce sont les changements de lumière, les nuages : on passe du gris total à un rayon de soleil éblouissant, c'est fort comme les peintures du Nord !" Il aime parcourir la ville en autobus, mais il a aussi photographié le métro, un escalier désert, un quai bondé, des affiches d'exposition.
Les parcs, Montsouris ou Luxembourg, reviennent sans cesse, en noir et blanc ou en couleur. On passe devant les bouquinistes ou la Tour Eiffel, les étals du marché de Belleville, des enseignes ou la terrasse d'un café (le Select, au fameux chocolat chaud). Et pourtant rien n'est pittoresque dans le Paris de Bernard Plossu. Il ne se passe rien, juste la vie qui passe, la course des passants, de jolies filles de dos qui traversent la rue. C'est une atmosphère, une poésie du quotidien banal, qu'il saisit avec son objectif de 50 mm, celui qui est le plus proche de la réalité.
Des images intemporelles
Les images sont souvent intemporelles. Bien sûr, le livreur de charbon de 1968 ou le Saint-Michel de 1956 avec ses gardes républicains à cheval (on les voit encore de temps en temps mais de moins en moins), ou encore un bus à plateforme dans le 14e arrondissement (la gare de ceinture au bout de la rue Liard a disparu) évoquent une époque lointaine. Mais on peut se laisser tromper par une vue de l'Hôtel du Nord ou d'une écluse du canal Saint-Martin, réalisées très récemment. Un peu comme les autochromes du début du 20e siècle, les beaux tirages couleur Fresson que Plossu a adoptés dès 1967 donnent un côté irréel et poétique aux photographies, même les plus contemporaines.
Et déjà, les gares, un train qui file dans la brume du matin, cette fois en noir et blanc, semblent nous inviter à repartir.
Bernard Plossu "partage avec nous son Paris (…) C'est 'son' Paris, visitons-le" comme nous y invite Isabelle Huppert, qui signe un texte du livre.
Paris Plossu
Textes d'Isabelle Huppert et Brigitte Ollier
Editions Mouvements-Rue Visconti
445 pages
29,90 euros
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