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"Le Louvre à Cheval" : Jean Rochefort complètement dada !

Il nous avait déjà bluffé lorsqu’il commentait les épreuves hippiques des Jeux Olympiques. Cette fois le comédien Jean Rochefort, excellent cavalier, éleveur réputé, parcourt «Le Louvre à Cheval » pour décrypter les chefs d’œuvre qui mettent en scène l’objet de sa passion. Et c’est bien sûr décalé, plein d’humour et de poésie. Dans ce beau livre, rien n’échappe à ce drôle d’oiseau. Pardonnez- moi Monsieur Rochefort. Suivons le guide !
Article rédigé par franceinfo - Sophie Jouve
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Temps de lecture : 5min
Jean Rochefort comédien et éleveur de chevaux.
 (LORENVU/VILLARD/SIPA)

Rochefort, 83 ans, a travaillé 5 mois sur cet ouvrage, avec pour complice Edwart Vignot, historien d’art. Chacun accompagnant les tableaux d’un court texte. « Je me qualifierais de critique amateur éveillé » précise d’emblée le comédien avec cette voix inimitable. 
« Tout cela a pris du temps, à cause de moi en partie. Je n’étais jamais satisfait. La nuit je courais dans mon bureau quand je croyais avoir trouvé l’adjectif idéal (éclat de rire)".

Le cheval c’est la grande passion de Jean Rochefort, depuis que Philippe de Broca lui a confié un rôle dans Cartouche aux côtés de Jean Paul Belmondo. D’abord humilié de tomber sans cesse, face à un Bebel hyper à l’aise, Rochefort a fini par attraper le virus.

 

 

"Sans doute les meilleurs moments de sa vie"

« L’important c’est de devenir le cheval et que le cheval devienne l’homme. Ça s’appelle l’osmose et ce sont des moments magiques très rares, que certains cavaliers obtiennent. On reste soi mais on essaye de devenir quadrupède, de devenir un centaure ».
Cette harmonie le comédien la retrouve dans un tableau de Van Dyck « Le Marquis de Moncada » : « Ils sortent d’une forêt. Personne derrière eux. Personne devant eux. C’est une promenade, un moment de bonheur. Pour l’homme de cheval, celui qui aime les chevaux, sans doute les meilleurs moments de sa vie, les souvenirs avant la mort ».

Marquis de Moncada de Antoon Van Dyck 1599-1641
 (Louvre)

Pour Rochefort, le cavalier, de tels moments appartiennent au passé. Depuis le tournage en Espagne d’un Don Quichotte qui n’a jamais vu le jour, le comédien souffre de douleurs à la colonne vertébrale qui lui interdisent de remonter à cheval.
« Je ne peux plus avoir ce grand bonheur de partir seul en forêt avec ma jument préférée que j’ai baptisé Alphaville», regrette Rochefort, « avec cette espèce de complicité qui s’est instaurée entre elle et moi au fil des années. Quand nous nous arrêtions sur une souche d’arbre et qu’elle me léchait les cheveux assez gentiment… Elle me connaissait par cœur et moi aussi. C’est sur le dos de sa mère que j’ai appris le texte d’Alceste du Misanthrope ».

Quel est le tableau que notre passionné accrocherait dans son salon ?

Et s’il devait en choisir un.  « Ce serait le portrait du cheval gris de Géricault.  Là on est devant l’art pur, la compréhension totale de l’animal qui nous guette, qui nous surveille, qui nous regarde avec méfiance et tendresse à la fois. Tant d’émotions imposent l’humilité et le silence… ».

Tête de cheval blanc de Théodore Géricault 1791-1824
 (Louvre)

L'homme de cheval n'aime pas les mains dures

En revanche Rochefort fait la moue devant un Charles Le Brun « Le Cheval du chancelier » représentant trois jeunes garçons. L'un d'eux représenté de dos, tenant la monture d'une main dure qui tire sur la bouche de l'animal.
"Les mains dures retiennent effectivement les chevaux mais les angoissent et les inquiètent », déplore-t-il. «Le  mystère avec les chevaux c’est que ce sont des animaux qui a priori nous font peur et eux ont peur de nous. Nous devons les rassurer…le mariage est difficile au début ».

Le Chancelier Séguier de Charles Le Brun 1619-1690
 (Louvre)

"Les artistes cherchent une sorte de cousinage entre l'homme et le cheval"

Rochefort s’amuse des erreurs des artistes dans la représentation du cheval, et notamment des yeux : « La position humanoïde des yeux est absolument impossible. Dans les œuvres anciennes, très souvent les yeux sont peints de faces, comme l’homme ou la chouette alors que ceux des chevaux sont sur les côtés. A mon sens les artistes cherchaient une sorte de cousinage entre l’homme et le cheval ».

Deux têtes de cheval de Antonio Puccio dit Pisanello 1395-1450
 (Louvre)

"Le seul moyen d'obtenir la soumission de l'animal est de tordre son oreille"

Un autre chef d’œuvre de Géricault retient toute l’attention de Rochefort : un cavalier et sa monture pris dans un déluge. « Le seul moyen dans ces conditions d’obtenir la soumission de l’animal est de tordre avec force son oreille. Géricault visiblement le savait, moi non », constate Rochefort. « J’ai connu une histoire avec ma jument avec qui je nageais en mer pour la première fois. Je la tenais par l’encolure, je nageais à coté d’elle. Et très vite je me suis aperçu qu’on partait vers l’horizon. Je commençais à m’inquiéter et je n’avais pas du tout pensé aux oreilles comme notre ami. Je suis devenu extrêmement nerveux, j’ai même pensé abandonner ma jument et j’ai trouvé le moyen de lui enfoncé l’index dans un naseau et le pouce dans l’autre. Serré très fort, et petit à petit lui ramener la tête vers la terre. Elle s’est soumise grâce à Dieu ».

Scène de déluge de Théodore Géricault 1791-1824
 (Louvre)

 

"Le Louvre à Cheval", par Jean Rochefort et Edwart Vignot
 Editions Place des Victoires. 316 pages.

 

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