Charlie Hebdo : après le traumatisme, la quête d'une normalité
La normalité n'est pas encore au rendez-vous. Des policiers lourdement armés accompagnent toujours certains membres de l'hebdomadaire dans les couloirs de Libération, qui héberge gracieusement l'équipe depuis l'attaque. Celle-ci n'occupe plus, comme au début, la célèbre salle du "hublot", qui accueille les conférences de rédaction et les assemblées générales de Libé, mais un étage entier où des portes ont dû être installées.
"On se croise, mais chacun fait sa vie. Il n'y a pas de ponts, pas de collaboration. Il n'y a pas eu de pot ensemble depuis qu'ils sont là", résume Willy Le Devin, reporter police et justice à Libé, qui parle d'une "colocation".
Nouvelle formule
Si les membres de Charlie "sont toujours les bienvenus, comme depuis le premier jour", rappelle Pierre Fraidenraich, le patron du quotidien, "ils nous ont signifié aujourd'hui qu'ils avaient prévu de quitter Libération durant l'été pour être dans leurs locaux vers le mois de septembre". À la rentrée, l'hebdomadaire, devenu mondialement célèbre, devrait accoucher d'une nouvelle formule, a confié Luz aux Inrockuptibles.Mais avant, d'autres problèmes restent à régler. Comme la division de la rédaction qui a éclaté au grand jour début avril, quand une quinzaine de salariés ont réclamé dans une tribune un statut d'"actionnaires salariés à part égale". Ce collectif comprenait notamment l'urgentiste Patrick Pelloux, Luz et Laurent Léger, mais aucun des dirigeants actuels, comme le dessinateur Riss, nouveau directeur de la publication, qui détient 40% des parts du journal. "Le dialogue a été rétabli. Il est important que les choses se passent entre nous", assure Patrick Pelloux. Charlie, c'est "une famille, avec ses engueulades et ses bisous". Même s'il ne va plus tous les jours à l'hôpital, Riss, blessé par balle à l'épaule lors de l'attaque, poursuit, lui, sa rééducation, d'après son entourage.
Polémiques
Les Charlies, devenus "tellement médiatiques qu'on n'est plus un journal", selon la formule de Luz, ont aussi bien du mal à échapper aux polémiques. Dernière en date : des romanciers anglo-saxons, dont certains de renom, ont décidé de boycotter le gala annuel du PEN American Center pour protester contre l'attribution par la société littéraire américaine d'une récompense au magazine satirique, au nom de la liberté d'expression."Ils ont des sollicitations incessantes dans le monde entier pour des conférences ou des prix alors qu'ils n'aspirent qu'à se concentrer sur leur travail", témoigne Christophe Deloire, le secrétaire général de RSF, qui les a invités au concert dimanche 3 mai, à Paris, des 30 ans de l'association de défense de la liberté de la presse.
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