Il faut une "régulation de l'Etat" dans le secteur de l'édition, estime Anne-Sylvie Bameule à la tête d'Actes Sud
Anne-Sylvie Bameule, présidente du directoire d'Actes Sud, a appelé vendredi 18 août sur France Inter à une régulation de l'édition pour défendre la place des maisons d'éditions face aux deux mastodontes du secteur Editis et Hachette. "Je pense qu'il y a besoin absolument dans la période actuelle de régulation de l'État. Absolument. On n'est pas sur un secteur marchand anodin, on parle de culture, de biens culturels. C'est indispensable pour la société, pour sa santé", a estimé la patronne d'Actes Sud.
Concentration
Il existe un phénomène de concentration "indéniable" qui est "très préoccupant pour l'édition indépendante", a-t-elle ajouté. Cette prise de position intervient alors que le groupe Vivendi, contrôlé par le milliardaire Vincent Bolloré, s'apprête à céder sa filiale Editis, numéro deux français de l'édition, au groupe Czech Media Invest (CMI), détenu par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky.
Vivendi a dû se résoudre à vendre Editis – qui comprend une cinquantaine de maisons d'éditions dont Robert Laffont, Nathan, Le Robert, Plon, Julliard ou Pocket – pour respecter les règles de concurrence européennes et pouvoir ainsi prendre le contrôle de son rival, Hachette Livre, dans le cadre de son acquisition du groupe Lagardère. Hachette Livre, qui compte dans son giron les éditions Grasset, Fayard, Stock ou Larousse, est le numéro un du secteur en France et numéro trois mondial.
Menace pour les nouvelles écritures et les nouveaux talents
"Je pense indispensable que l'État puisse prendre des positions, réfléchisse avec les différents acteurs du secteur à des régulations" et se questionne "sur la concentration", a défendu l'éditrice. Celle-ci pose "la question de la visibilité" des ouvrages édités par Hachette et Editis, d'après l'éditrice. Car chacun est adossé à de puissants réseaux de distribution – les points Relay pour Hachette et la Fnac, propriété de CMI, pour Editis – et des médias.
Vivendi détient ainsi le groupe Canal+ et ses chaînes, le géant de la publicité Havas et Prisma Media, numéro un de la presse magazine en France. De son côté, Daniel Kretinsky détient une participation dans le quotidien Le Monde et CMI France, deuxième groupe de presse magazine. On peut "s'inquiéter" pour "les autres ouvrages venant de maisons d'édition indépendantes qui elles n'ont pas ces liens privilégiés avec le monde des médias" et du numérique, a déclaré Anne-Sylvie Bameule.
Ces "grandes concentrations" favorisent aussi un "phénomène de 'best-sellerisation' " par lequel quelques titres "monopolisent l'ensemble des réseaux et finalement laissent très peu de place à des ouvrages qui oeuvrent à la recherche de nouvelles écritures", de "nouveaux talents".
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