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Nathalie Choux, illustratrice pour les enfants : ce qui a changé en 20 ans

Le 34e salon du livre jeunesse de Montreuil ouvre ses portes mercredi 28 novembre. C'est 'LE' grand rendez-vous de la littérature jeunesse de l'année. Le salon a donné cette année carte blanche à Nathalie Choux, illustratrice depuis 20 ans, pour l'exposition "Nos futurs". L'illustratrice nous accueille dans son atelier, elle nous raconte ce qui a changé au fil du temps.
Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Nathalie Choux, illustratrice 
 (Laurence Houot - Culturebox)

Montreuil, banlieue parisienne. Derrière le portail, un sentier étroit qui débouche sur un jardin peuplé de personnages étranges, enfants, animaux, qui semblent veiller sur une maison en bois, nichée au fond du jardin, qu'on croirait sortie d'un conte pour les enfants. Rien d'étonnant puisqu'on est chez Nathalie Choux, illustratrice pour les enfants depuis 20 ans, dans sa maison qui lui sert aussi d'atelier.

Reportage Laurence Houot, Wassila Kamli, Jean-Antoine Balcells, Victor Buu

Passée par les Arts déco à Paris et un séjour d'un an à l'École Nationale de Marionnettes à Prague, Nathalie Choux fabrique des images pour les enfants depuis plus de 20 ans. Elle en a fait tant, des livres, qu'elle ne sait plus combien exactement. "Une centaine, plus ou moins", souffle-t-elle quand nous passons devant la bibliothèque colorée où ils sont tous rangés. Il y en a des dizaines, des albums, des histoires, des imagiers, des documentaires. Des pour les tout-petits, beaucoup, mais aussi pour les plus grands.

Un jeu de construction pour Montreuil

Dans son atelier, au dernier étage de la maison, un grand velux, et des crayons, mais pas tant que ça. La dessinatrice est passée depuis longtemps à la palette graphique. Un écran géant sur lequel elle donne vie à ses personnages. Aujourd'hui, elle donne les derniers coups de crayon au projet qu'elle prépare pour le Salon du livre de Montreuil, qui l'a invitée cette année à investir un espace dans l'exposition sur le thème de "Nos futurs".
Exposition "Nos futurs", Montreuil, jeu de construction de Nathalie Choux, installation
 (SLPJ)
Nathalie Choux a proposé un jeu de construction pour les enfants, avec des cartes qui s'emboîtent, pour raconter une histoire. "L'idée, c'est justement de construire l'avenir, le futur", explique-t-elle. "J'ai réfléchi à un cheminement, qui commence à la naissance, au petit monde de l'enfant replié sur lui-même, sur ce qui tourne autour de lui, puis on élargit à ce qui tourne un peu plus loin de lui, le paysage, l'environnement, jusqu'à arriver au ciel, à l'espace, à ce qui l'entoure beaucoup plus largement", développe la dessinatrice.

"Je mise sur le côté tendresse, poétique, des personnages"

On reconnaît son trait caractéristique, des dessins très fins, des personnages délicats, avec des têtes de poupées, des corps de marionnettes, et des couleurs joyeuses. "Quand je dessine des enfants, j'ai tendance à accentuer le regard, à leur dessiner des grands yeux. Je mise sur le côté tendresse, poétique des personnages. Et c'est vrai que quand je dessine une fille, elle a une jupe et des cheveux longs, et quand je dessine un garçon, il a les cheveux courts et un pantalon. Je suis à fond dans le stéréotype. Je représente la fille comme un personnage un peu idéalisé, avec des grands yeux, des cheveux longs, c'est peut-être mon fantasme d'avoir des super longs cheveux, comme ça, j'adorerais", sourit-elle en montrant un de ses dessins d'une petite fille aux longs cheveux noirs.

"Je dessine pour des tout petits, et il faut que les choses soient claires. Il faut que quand on regarde l'image, on sache tout de suite que la petite fille, c'est une petite fille, et donc forcément elle a les cheveux longs, c'est idiot mais c'est rare que je fasse des petites filles avec les cheveux courts", constate-t-elle.
Illustration Nathalie Choux
 (Nathalie Choux)

"Le sexe, on oublie"

"Longtemps, j'ai travaillé avec les animaux, d'une part parce que j'adore les animaux et deuxièmement ça élude plein de problèmes et plein de questions concernant le genre, justement, fille/garçon. Quand c'est un blaireau ou un ours, on s'en fiche un peu donc finalement, c'est assez facile, et puis il y a une identification qui est plus simple pour les enfants", estime-t-elle.
Personnages en céramique, Nathalie Choux
 (Laurence Houot - Culturebox)
"Pour la représentation de la famille, on reste sur quelque chose de très classique. Je pense que si je représentais une famille avec deux papas, ou deux mamans, sans que ce soit le sujet du livre, ça choquerait. On est encore dans des schémas très traditionnels avec le papa, la maman et les enfants", souligne la dessinatrice.

Certains sujets sont carrément devenus tabous. "Le sexe, on oublie. Je pense que les livres étaient plus "osés" dans les années 70", constate-t-elle. "Aujourd'hui, tout fait polémique, alors pour éviter ça, on fait du lisse, on fait quelque chose de mignon, qui ne fait pas de bulles !"

"Un panel représentatif de la population"

L'illustratrice fait souvent des livres de commande, pour les tout-petits, des imagiers, ou des documentaires. "Ce sont des ouvrages pédagogiques, très étudiés en amont. Là effectivement, on fait attention par exemple au rôle de l'homme et de la femme", a constaté Nathalie Choux. "On essaie de faire un panel représentatif de la population", poursuit-elle. "Ce sont des demandes que je n'avais pas avant, et parfois c'est un peu poussé à l'extrême", remarque la dessinatrice.

Par exemple pour des Kididoc (Nathan), j'ai fait 'Bonjour petite voiture', c'est une femme qui conduit. J'ai fait 'Bonjour petit tracteur', c'est une femme qui conduit, j'ai fait 'Bonjour petit avion' et on voulait que je fasse encore une femme, et là j'ai dit bon on va peut-être changer, non ?", raconte-t-elle. "Même si bien sûr c'est important de montrer à une petite fille qu'elle peut être pilote d'avion !".

"J'essaie de montrer les émotions"

"Moi j'ai la chance de vivre de mon métier, de mes illustrations pour les albums, et je suis soumise à des contraintes éditoriales que j'accepte avec plaisir. Ça ne m'empêche pas de me sentir libre d'exprimer ma vision personnelle", poursuit-elle.
  (Laurence Houot - Culturebox)
"Quand je représente les enfants, ce que j'aime mettre en avant, c'est les relations, le regard, la tendresse, le petit clin d'œil, la connivence entre les personnages. C'est plus les émotions finalement que j'ai envie de montrer, que la représentation physique des personnages, qui m'importe peu finalement", confie Nathalie Choux. "Je me sens libre, et heureusement, sinon j'arrêterais'", conclut la dessinatrice, qui exprime aussi toute sa créativité librement à travers son travail de céramiste


Nathalie Choux au Salon de Montreuil
  • Exposition "Nos futurs"
  • Dédicaces : 
- Grasset vendredi 31 décembre à 19h00
- Actes Sud le samedi 1er de 12h30 à 14h00
- Nathan, 1er décembre de 16h00 à 18h00

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