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Dans la mêlée du Goncourt 2021 : une journée dans le sillage de la star du jour, Mohamed Mbougar Sarr

Les remises des prix Goncourt et Renaudot ont eu lieu ce mercredi. Un rendez-vous incontournable pour le monde de la littérature, mais aussi des médias. Franceinfo y était. 

Article rédigé par franceinfo Culture - Camille Bigot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du Prix Goncourt 2021.  (MAGALI COHEN / HANS LUCAS)

"Regarde, on tourne un film ici", souffle admirative une passante à son petit-fils face au restaurant Drouant à Paris. Scène récurrente du début du mois de novembre :  une foule compacte de journalistes avec leurs caméras s'agglutine devant l’entrée de l’établissement pour la remise du Goncourt, le plus médiatisé des prix littéraires, à Mohamed Mbougar Sarr qui signe La plus secrète mémoire des hommes

Le restaurant Drouant accueillait la remise du Prix Goncourt et du Prix Renaudot, ce mercredi 3 novembre.  (MAGALI COHEN / HANS LUCAS)


A l’entrée, Franz-Olivier Giesbert – membre du jury Renaudot – arrive. Pas de commentaire à la presse, il est "en retard". Il traverse d’un pas hâtif le sas circulaire faisant office de hall, orné de rideaux de velours bleus. A l’intérieur, une ambiance feutrée. Mosaïque blanche au sol, ornée ça et là de fleurs sombres. A une heure de l’annonce des lauréats, l’ambiance est calme. Un journaliste casquette vissée sur la tête, écouteurs dans les oreilles est assis, l’œil sur sa caméra. "Je suis là depuis cinq heures du matin", confie-t-il. Juste pour obtenir une place correcte en bas de l’escalier d’honneur, où seront annoncés les résultats. 

Un métro bondé à l'heure de pointe


La salle prend petit à petit une allure de métro bondé en heure de pointe. Remplie de journalistes. Tous attendent, rivés derrière leurs caméras et appareils photos. Ils jouent des coudes pour obtenir le meilleur positionnement. Là, les rumeurs vont bon train : "il paraît qu’il y a quelques années un journaliste est arrivé avec un casque de moto pour éviter les coups des caméras."

Des journalistes attendant l'arrivée du lauréat.  (Camille Bigot)


12h45. Philippe Claudel, secrétaire général de l’Académie et Franz-Olivier Giesbert, révèlent les vainqueurs des deux prix : Mohamed Mbougar Sarr, avec La plus secrète mémoire des hommes et Amélie Nothomb pour Premier sang. Une annonce de deux petites minutes seulement. "Tout ça pour ça", s’exclame le journaliste levé aux aurores. Pourtant, du côté de l’Académie, c’est un événement : Mohamed Mbougar Sarr n’a que 31 ans. "Le plus jeune auteur que j’ai jamais couronné", précise Françoise Chandernagor devant une horde de journalistes engouffrée dans une nouvelle salle de réception. Au centre, une table immense où sont installés les jurés. "Il fut un temps la pièce était si remplie - entre journalistes et membres de l’Académie - que j’avais peur que le parquet craque", confie Paule Constant.


Mohamed Mbougar Sarr est là lui aussi, micro sous le nez. "Il y a un âge humain et un âge littéraire", se défend-il quand on lui rebat son nombre de printemps : "lorsqu’on lit, on est toujours un peu plus vieux qu’en réalité. C’est cet âge-là qui est le plus important." Certes. Toutefois, Française Chandernagor émet une réserve : "Ma crainte quand on couronne un jeune auteur, c’est que ça l’écrase", avant de se raviser, "il a la carrure Sarr, lui, on craint moins de l’écraser." Déjà auteur de quatre romans, il y développe chaque fois une prose singulière, non sans lien avec ses origines. 

Le premier auteur africain récompensé depuis 1922


"C’est le premier auteur sénégalais, noir, couronné depuis cent ans", lance Tahar Benn Jelloun, également membre du jury. "Il nous fait partager sa musique, son imaginaire et sa manière singulière de réinventer notre langue et notre littérature", raconte Philippe Claudel. Une écriture "luxuriante", un brin "élitiste", selon Françoise Chandernagor. "Ça reste assez intellectuel, c’est un écrivain qui écrit sur un autre écrivain." Éric Emmanuel Schmitt est émerveillé : "Le livre nous fait réfléchir, rêver, voyager dans toute l’histoire du XXe siècle, et presque sur toute la planète." Le dramaturge l’a lu deux fois, cet été d'abord, et cette nuit. "Ce roman est fait de plus de mystères que de certitudes, il pose plus de questions qu’il ne donne de réponses", raconte-t-il avant d’être interrompu par la foule : Mohamed Mbougar Sarr s'apprête à présenter le livre depuis la fenêtre du restaurant.

Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du Prix Goncourt 2021, à la fenêtre du Drouant.  (BERTRAND GUAY / AFP)

C’est la tradition. Mais, horreur, son éditeur – de la maison indépendante Philippe Rey - était si bousculé par la nouvelle qu’il a oublié d’apporter plusieurs exemplaires du roman primé. Les jurés en sont réduits à glaner un ou deux exemplaires, difficiles à trouver dans l’euphorie générale. Une fois la présentation faite, le héros du jour revient dans la salle pour une enième séance photo, et se penche vers Philippe Claudel. On l’entend lui chuchoter "C’est comme ça chaque année ?" 

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