"Les Vérités parallèles" : dans la tête d'Arnaud Daguerre, le journaliste trop parfait
Arnaud Daguerre a toujours vécu avec une boule de feu dans l'estomac. Et s'il se faisait prendre ? Et s'il était découvert ? Quels sont les lourds secrets que le grand reporter du moment aimerait tant avouer à tout le monde ? Dans Les Vérités parallèles, qui paraît le 23 août aux éditions Finitude, Marie Mangez dresse un portrait psychologique d'un mythomane.
Arnaud Daguerre est embarqué dans une fuite en avant, plus par facilité ou lâcheté que par ambition. C'est un rêveur dilettante qui ne sait pas dire non et évite tout rapport de force. Pour réussir dans le journalisme, et accessoirement décrocher le prix Albert Londres, il préfère faire appel à son imagination pour ne pas avoir à rencontrer et à interviewer les protagonistes. Il est paralysé par la timidité, le manque d'assurance. Ainsi, il est toujours au bon endroit, au bon moment, avec les bons interlocuteurs. Un journaliste parfait, trop parfait. Qui va connaître une ascension fulgurante. Et une descente aux enfers destructrice.
Arrangements avec la vérité
"Le jour où Arnaud est devenu faussaire, il avait sept ans. L'âge de raison. Affirmer, toutefois, qu'il s'agit de son premier fait d'armes serait mentir". Marie Mangez installe le décor dès la première ligne. Les Vérités parallèles n'est pas un livre à charge contre le journalisme, mais le cheminement psychologique d'un homme qui se retrouve prisonnier de ses propres mensonges. Et les encouragements de sa hiérarchie et une partie de ses collègues contribuent à renforcer l'imposteur en Arnaud Daguerre et étouffent sa conscience qui ne demande qu'à se libérer. Ses reportages, plus captivants que la réalité, font l'unanimité autour de lui. Jusqu'à ce qu'apparaissent les premières fissures. Les arrangements avec la vérité, après avoir fait la notoriété d'Arnaud Daguerre et celle de son hebdomadaire, atteignent leurs limites.
Dans le jargon, Arnaud "bidonne". C'est le cauchemar de toutes les rédactions. Avant l'avènement du trumpisme et de la réalité alternative ou de la post-vérité. Quand Arnaud Daguerre s'essaie à un reportage "réel", avec de vraies personnes, la sanction tombe de suite : plat, sans intérêt. Non vendeur. Et lui, d'avoir encore recours à son imagination, pour relancer sa carrière et booster les tirages de son hebdomadaire. Grâce à une écriture fluide, nerveuse, l'autrice du Parfum des cendres s'empare d'un sujet ancré dans l'actualité et va plus loin en explorant l'aspect intime et familial d'un homme condamné par lui-même (et son cercle proche) à errer dans un univers parallèle. En attendant la délivrance. Car Arnaud Daguerre panique, souffre. Les Vérités parallèles, une immersion dans la tête d'un imposteur.
"Les Vérités parallèles", Marie Mangez, Finitude, 20 euros
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