Leila Slimani : "Le fait divers c'est l'émergence de l'extraordinaire dans le monde ordinaire"
Leila Slimani qui vient de recevoir le Goncourt pour "Chanson douce" se réjouit d'abord de voir Gaël Faye recevoir le Goncourt des lycéens pour "Petit pays".
"Le Goncourt des lycéens c'est un très beau prix parce que c'est un prix de lecteurs, un prix toujours plein d'émotion... Avec Gaël nous avons fait la tournée du Goncourt des lycéens, c'était des moments magnifiques. Ce sont des lecteurs très particuliers les lycéens. Ils lisent très bien, ils posent des questions très désarmantes très franches. C'est très amusant très intéressant".
Leila Slimani a choisi le milieu bobo parisien comme cadre de sa "Chanson douce". Un milieu dans lequel elle se reconnaît et que l'on a "trop souvent tendance à caricaturer comme des gens gentillets, écolos, ouverts alors que c'est un milieu beaucoup plus complexe, plein d'ambiguités et de contradictions. Ce qui m'intéressait c'était leur rapport aux valeurs et à la mixité sociale".
La lutte des classes n'est plus la même
Une nounou seule, angoissée face à un couple installé qui vit bien. Il flotte sur "Chanson douce" un parfum de lutte des classes."Ce n'est plus la lutte des classes telle qu'on pouvait l'envisager il y a encore 50 ans. Aujourd'hui les choses me paraissent être beaucoup plus floues; les rapports hiérarchiques aussi. Ces bobos ce sont des bourgeois, ils sont aussi bohèmes, ni riches ni pauvres, mais ils savent que leur avenir sera sans doute meilleur face à une femme qui est dans la précarité, qui a le sentiment qu'elle ne peut que se déclasser au fur et à mesure"
Le fait divers c'est l'émergence de l'extraordinaire dans le monde ordinaire
Leila Slimani
La nounou Louise tue les deux enfants. Si Leila Slimani était juré d'assises quel serait son verdict ? "Quand on est écrivain on est exactement dans la position inverse d'un juré en cour d'assises. On essaie non pas de juger mais de comprendre, de raconter, de provoquer des émotions, un questionnement, des doutes et pas du tout de porter des jugements".Au Maroc il y a de l'homophobie mais aussi du débat
La semaine prochaine deux jeunes filles marocaines âgées de 16 et 17 ans, Sanaa et Hajar, dénoncées par leurs familles vont être jugées parce qu'elles se sont embrassées dans la rue. Leila Slimani leur a apporté son soutien en appelant les Marocains à se rebeller contre "une législation moyenâgeuse". Une prise de position qui a fait débat au Maroc . "C'est un pays où il y a du débat. Ce n'est pas du tout aussi uniforme qu'on voudrait nous le faire croire. Evidemment les lois sont très dures vis à vis des homosexuels. Il y a plutôt une tendance à l'homophobie; néanmoins il y a un débat par les réseaux sociaux. Il y a une évolution que j'ai envie d'accompagner". En cas de condamnation Leila Slimani écrira, car l'écriture c'est son arme.
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