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Les ventes de dictionnaires s'écroulent, mais les mordus d'orthographe résistent : "Ma bible, c'est le Larousse"

Le Larousse fête ses 170 ans mais le secteur des dictionnaires n'est pas à la fête et les ventes dégringolent. Les utilisateurs de la version papier se font rares, au grand dam des passionnés d'orthographe, qui ne jurent, eux, que par elle.

Article rédigé par Agathe Mahuet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Un club de scrabble dans le 5e arrondissement de Paris. (AGATHE MAHUET / RADIO FRANCE)

Depuis quand n’avez-vous plus ouvert un dictionnaire ? Pour Mathis, "cela fait bien cinq ans." Le Larousse fête ses 170 ans avec une nouvelle édition 2023 disponible en librairie, et partout ailleurs mercredi 15 juin mais le jeune homme ne va peut-être pas se jeter dessus. "Maintenant, je cherche les mots sur Google", sourit-il. 

En moins de quinze ans, des ventes divisées par dix

Puisque nos portables et nos ordinateurs ont réponse à tout, le marché du dictionnaire dégringole. Les éditeurs Larousse et le Robert ne communiquent pas leurs chiffres de vente, mais plusieurs importants libraires le confirment : les ventes de dictionnaires ont été divisées par dix en moins de 15 ans. À titre d'exemple, l'évolution des chiffres de ventes de la Maison du dictionnaire à Paris est frappante : 19 exemplaires du Petit Robert de la langue française ont été vendus en 2021, contre 122 en 2015 et 188 en 2008. Pas mieux côté Petit Larousse illustré, qui ne s’est écoulé qu’à 12 exemplaires en 2021, contre 75 en 2015 et 128 en 2008.

S’en trouve-t-il encore pour se référer à la version papier ? Il faut les chercher par exemple du côté des joueurs de Scrabble. "Moi, j''ai toujours le dictionnaire à côté de moi", assure Marie-France, rencontrée dans un club parisien de Scrabble, dans le 5e arrondissement de la capitale. Avec Claudine et leurs autres camarades, ils avouent le consulter très régulièrement tous les jours. "Ça, c'est sûr, complète Claudine. Ça peut être dix fois par jour ! Au Scrabble, c'est bien utile !" "On est des grands tarés", s'esclaffe sa voisine. Pourtant, là encore, le numérique s'impose, avec des applications spéciales. Aussi, l'usage du dictionnaire papier s'effrite.

"Je ne le consulte que très peu : à partir d'un certain niveau au Scrabble, on est quand même censé connaître l'orthographe des mots, au moins ceux jusqu'à huit lettres. Sinon, c'est qu'on oublie tout."

Frédéric

à franceinfo

Le dictionnaire est toujours au programme à l'école primaire, où l'on apprend à l'utiliser. Dans certaines villes, il est même offert aux élèves qui entrent en sixième.

Muriel Gilbert, correctrice au journal "Le Monde" parmi les nombreux dictionnaires et livres qui l’entourent, chez elle, dans son bureau. (AGATHE MAHUET / RADIO FRANCE)

D'autres l'utilisent chaque jour, avec passion : "Je reconnais un Larousse d'un Robert les yeux fermés, sourit, rêveuse, Muriel Gilbert, correctrice au journal Le Monde. Je peux reconnaître à l'oreille les pages du Larousse, qui a un papier un peu glacé." "Ma bible, c'est le Larousse, poursuit-elle. Mon dictionnaire, je l'ouvre 50 fois par jour ! Tous les ans, on attend avec impatience la nouvelle édition, qui arrive depuis la documentation sur un chariot." 

"Quand les nouveaux dictionnaires arrivent, ils sont emballés dans du papier transparent et tout le monde saute sur le sien : on le déplie et on dirait que c'est Noël !"

Muriel Gilbert, correctrice au journal "Le Monde"

à franceinfo

"Les correcteurs vivent entourés de dictionnaires, indique cette passionnée de mots. Ce sont à la fois leur doudou, leur boîte à outils et sans eux ils se sentent absolument tout nus. Il y a presque un échange charnel avec les pages du dictionnaire..." "Vous entendez, le Robert ?", nous demande-t-elle avec gourmandise, en froissant les pages de la précieuse bible, que la profession ne semble pas tout de suite disposée à abandonner.

Les ventes de dictionnaires s'écroulent, mais les mordus d'orthographe résistent - le reportage d'Agathe Mahuet

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