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Macron à Jean d'Ormesson : "Vous avez inventé un art libertin et métaphysique"
L'hommage national à l'auteur d'"Au plaisir de Dieu" a débuté vendredi matin par une messe célébrée en la cathédrale Saint-Louis des Invalides à Paris. La cérémonie religieuse a été suivie, à midi, par un hommage national dans la cour d'honneur des Invalides présidé par le chef de l'État Emmanuel Macron qui a salué "un être de clarté".
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Jean d'Ormesson était un "prosateur" de génie qui aimait la douceur de vivre et le bonheur. C'est ainsi que l'académicien Jean-Marie Rouart a salué, vendredi matin, la mémoire de l'écrivain disparu, lors de son éloge funèbre en la cathédrale Saint-Louis des Invalides.
Cette cérémonie religieuse pour l'auteur d'"Au plaisir de Dieu" précédait un "hommage national" présidé par Emmanuel Macron dans la cour d'honneur des Invalides. Cette cérémonie marquait le début de vingt-quatre heures exceptionnelles que la France s'apprête à vivre pour saluer l'un de ses écrivains favoris, avant l'"hommage populaire" prévu samedi à Paris pour le chanteur Johnny Hallyday, disparu peu après l'écrivain.
"Il était superficiel par profondeur"
Encadré par la Garde républicaine, le cercueil de Jean d'Ormesson, orné du drapeau français, a traversé la nef de la cathédrale avant d'être déposé devant le chœur. Le livret de messe était illustré par une photo en noir et blanc de l'académicien qui se cache le bas du visage avec les mains. Sous la photo, un vers célèbre du poète communiste Louis Aragon dont l'écrivain avait fait le titre de l'un de ses livres : "Je dirais malgré tout que la vie fut belle."
Récit : Thierry Curtet
Ce paradoxe, le patronage littéraire d'un poète communiste pour un écrivain de droite issu d'une longue lignée aristocratique, résume l'homme Jean d'Ormesson. "Aristocrate mais républicain, de droite mais attiré par la gauche, écrivain mais lorgnant sur la politique, privilégié mais ayant perdu un château historique (le château de Saint-Fargeau, ndlr), il réconcilie les Français avec leurs contradictions", a dit de lui son ami Jean-Marie Rouart.
Récit : Thierry Curtet
Ce paradoxe, le patronage littéraire d'un poète communiste pour un écrivain de droite issu d'une longue lignée aristocratique, résume l'homme Jean d'Ormesson. "Aristocrate mais républicain, de droite mais attiré par la gauche, écrivain mais lorgnant sur la politique, privilégié mais ayant perdu un château historique (le château de Saint-Fargeau, ndlr), il réconcilie les Français avec leurs contradictions", a dit de lui son ami Jean-Marie Rouart.
Nicolas Sarkozy, François Hollande et des dizaines de personnalités politiques et culturelles comme François Fillon, Marine Le Pen, Jean-Louis Debré ou Hélène Carrère d'Encausse ont assisté après la messe à la cérémonie nationale d'hommage. Après avoir passé en revue les troupes, Emmanuel Macron a salué la famille avant l'entrée du cercueil dans la cour d'honneur. L'épée d'académicien et la grand-croix de la Légion d'honneur de Jean d'Ormesson étaient portées par des gardes républicains derrière le cercueil.
Un crayon déposé sur son cercueil
Le chef de l'État a prononcé un éloge funèbre : "Jean d'Ormesson était superficiel par profondeur" (...) "Vous avez inventé cette forme nouvelle (...) une conversation tantôt profonde, tantôt légère, un art libertin et métaphysique".
L'intégralité du discour d'Emmanuel Macron
"Ne fut-il pas lui même un être de clarté ? Il n'était pas un lieu, pas une discussion, pas une circonstance que sa présence n'illuminât. Il semblait fait pour donner aux mélancoliques le goût de vivre et aux pessimistes celui de l'avenir", a déclaré le président de la République.
Au terme de son discours, Emmanuel Macron est allé déposer sur le cercueil de l'académicien, ceint du drapeau tricolore, un crayon à papier, "un simple crayon", comme le souhaitait Jean d'Ormesson. "C'est cette clarté qui d'abord nous manquera et qui déjà nous manque en ce jour froid de décembre. Jean d'Ormesson fut ce long été auquel pendant des décennies nous nous sommes chauffés avec gourmandise et gratitude."
Répondant aux "esprits chagrins" qui réduisaient cette grande signature du Figaro à un simple "ludion", Emmanuel Macron a rendu hommage à l'auteur d'"Au plaisir de Dieu", qui était de "ceux qui nous rappelaient que la légèreté n'est pas le contraire de la profondeur mais de la lourdeur".
La dépouille de Jean d'Ormesson devait être incinérée "plus tard" dans l'intimité. Le romancier, archétype de l'écrivain à la française, charmant et charmeur, est décédé dans la nuit de lundi à mardi d'une crise cardiaque à son domicile de Neuilly-sur-Seine.
L'intégralité du discour d'Emmanuel Macron
"Ne fut-il pas lui même un être de clarté ? Il n'était pas un lieu, pas une discussion, pas une circonstance que sa présence n'illuminât. Il semblait fait pour donner aux mélancoliques le goût de vivre et aux pessimistes celui de l'avenir", a déclaré le président de la République.
Au terme de son discours, Emmanuel Macron est allé déposer sur le cercueil de l'académicien, ceint du drapeau tricolore, un crayon à papier, "un simple crayon", comme le souhaitait Jean d'Ormesson. "C'est cette clarté qui d'abord nous manquera et qui déjà nous manque en ce jour froid de décembre. Jean d'Ormesson fut ce long été auquel pendant des décennies nous nous sommes chauffés avec gourmandise et gratitude."
Répondant aux "esprits chagrins" qui réduisaient cette grande signature du Figaro à un simple "ludion", Emmanuel Macron a rendu hommage à l'auteur d'"Au plaisir de Dieu", qui était de "ceux qui nous rappelaient que la légèreté n'est pas le contraire de la profondeur mais de la lourdeur".
"Un être de clarté", mais "la clarté était trompeuse"
"Comme le disait Nietzsche à propos de ces Grecs anciens parmi lesquels Jean d'Ormesson eût rêvé de vivre, il était superficiel par profondeur", a-t-il loué. Pour le chef de l'État, "la clarté était trompeuse" : il y avait en Jean d'Ormesson des "failles", une "élégance dans l'inquiétude" qui le poussaient à écrire.La dépouille de Jean d'Ormesson devait être incinérée "plus tard" dans l'intimité. Le romancier, archétype de l'écrivain à la française, charmant et charmeur, est décédé dans la nuit de lundi à mardi d'une crise cardiaque à son domicile de Neuilly-sur-Seine.
"La mort ne peut rien contre moi"
Le 41e et dernier livre de l'écrivain, "Et moi je vis toujours" qui devait initialement paraître en février 2018, sortira finalement le 11 janvier chez Gallimard. La fille de Jean d'Ormesson, l'éditrice Héloïse d'Ormesson a présenté jeudi soir sur France 5 les dernières phrases écrites par l'écrivain et retrouvées samedi sur son bureau: "Une beauté pour toujours. Tout passe. Tout finit. Tout disparaît. Et moi qui m'imaginais devoir vivre pour toujours, qu'est-ce que je deviens? (...) que je sois passé sur et dans ce monde où vous avez vécu est une vérité et une beauté pour toujours et la mort elle-même ne peut rien contre moi."
Comme en octobre 1963, lorsque les morts de la chanteuse Édith Piaf et de l'académicien Jean Cocteau s'étaient télescopées, le décès de Jean d'Ormesson a précédé de quelques heures la disparition de "l'idole des jeunes", Johnny Hallyday.
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