Marc Fumaroli, essayiste spécialiste du XVIIe siècle et académicien, est mort
Marc Fumaroli était connu pour ses réquisitoires contre la démocratisation de l'art.
Essayiste, professeur des universités spécialiste du XVIIe siècle, l'académicien Marc Fumaroli est mort mercredi à l'âge de 88 ans, a annoncé l'Académie française.
"Le Secrétaire perpétuel et les membres de l'Académie française ont la tristesse de faire part de la disparition de leur confrère M. Marc Fumaroli, décédé le 24 juin à Paris. Il était âgé de quatre-vingt-huit ans. Il avait été élu le 2 mars 1995 au fauteuil d'Eugène Ionesco", a indiqué l'institution dans un communiqué.
Atteint par le cancer, en passe de perdre une partie de sa vue, son état de santé s'était récemment dégradé. Ce grand pessimiste au caractère ombrageux, ami proche du gai et lumineux Jean d'Ormesson, redisait au Point en 2018 : "ce monde m'attriste et m'inquiète". C'est d'ailleurs lui qui préfaça les OEuvres de Jean d'Ormesson dans La Pléiade.
Contre la démocratisation de l'art
Né le 8 juin 1932 à Marseille, Marc Fumaroli a grandi au Maroc, à Fès. En 1959, il obtient l'agrégation de lettres. Professeur à Lille, puis à la Sorbonne, il est élu professeur au Collège de France, à la chaire "Rhétorique et société en Europe (XVIe – XVIIe siècles)". Il est élu à l'Académie française le 2 mars 1995 au fauteuil d'Eugène Ionesco.
Spécialiste de Montaigne, Corneille, La Fontaine, grand lecteur de Balzac (il disait avoir lu au moins deux fois la totalité de La comédie humaine), Marc Fumaroli prônait un retour à la sagesse antique, à la foi, aux classiques, aux disciplines rhétoriques, à l'intelligence du passé, au détachement de l'école par rapport à l'actualité.
"Si, la "réaction', c'est l'aptitude à résister aux conformismes du temps, alors oui, j'en suis !", s'exclamait-il. En 1991, il signe un livre qui fait grand bruit : L'État culturel. Essai sur une religion moderne.
Pour l'enseignement du grec et du latin, contre "la superstition du numérique"
"On a voulu démocratiser la culture", écrivait-il dans ce pamphlet. "Le résultat aujourd'hui, c'est qu'il y a plein de musées, mais où sont les peintres ? Il y a de nombreux bâtiments, mais où sont les chefs-d'oeuvre ? Le mot 'culture' est devenu le nom de la religion d'Etat".
Rétrospectivement, il jugeait cette charge bien modérée. Et en 2018, il n'avait pas changé d'avis : "depuis Jack Lang (ministre socialiste de la Culture des années 80, ndlr), on a mis tout et n'importe quoi sous le vocable 'culture'". Il était vent debout contre "le fanatisme égalitariste" de l'époque, grand défenseur de l'enseignement du grec et du latin et contre "la superstition du numérique".
"Avec les nouvelles technologies de communication, la tendance à s'enfermer dans l'actualité et l'immédiateté donne à la société les instruments pour devenir totalitaire", disait-il à Télérama en 2015.
Marc Fumaroli était aussi contre la féminisation des noms des métiers, et l'avait fait savoir dans une tribune dans le journal Le Monde du 31 juillet 1998 (accès payant) : "notairesse, mairesse, doctoresse, chefesse (…) riment fâcheusement avec fesse, borgnesse et drôlesse, n’évoquant la duchesse que de très loin. Tranchons entre recteuse, rectrice et rectale… "
Après son décès, l'Académie française compte désormais 33 membres.
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