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"Peut-être que j'ai apporté une sensibilité littéraire à la présidence" : Barack Obama évoque les livres qui l'ont nourri

A l'occasion de la publication du premier tome de sa biographie, "Une terre promise", Barack Obama, invité de François Busnel, revient sur sa profonde relation avec la littérature.

Article rédigé par franceinfo Culture - Nisrine Manai
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Barack Obama répond aux questions du journaliste François Busnel dans une interview exclusive (FRANCE 2)

Le premier tome des mémoires de Barack Obama, Une terre promise, vient de sortir ce 17 novembre chez Fayard. A cette occasion, l'ancien président a accordé une longue interview à France 2. Mais plutôt que s'adresser à des journalistes politiques il a répondu aux questions de François Busnel, journaliste littéraire (La Grande Librairie, France 5) et connaisseur de l'Amérique. Une manière de souligner ce lien indéfectible qu'il entretient avec la littérature. Les livres et leurs auteurs sont d'ailleurs présents très vite et dans une grande partie de l'entretien. Une figure émerge entre tous, Toni Morrison, l'écrivaine prix Nobel de la littérature était une proche de l'ancien président. 

La figure tutélaire de Toni Morrison

"J'ai eu un grand privilège de fréquenter Toni Morrison. L’un des avantages d'être président, c’est de rencontrer des personnes que vous avez idolâtrées", confie Barack Obama, ému, après avoir vu un passage d'une interview avec la célèbre écrivaine afro-américaine décédée en aout 2019. Cette dernière l'avait alors décrit comme un homme "très au-dessus de qui que ce soit d'autre" par son intelligence et son humanité. 

Barack Obama sur la littérature et l'écrivaine Toni Morrison
Barack Obama sur la littérature et l'écrivaine Toni Morrison Barack Obama sur la littérature et l'écrivaine Toni Morrison

L'ancien président des Etats-Unis n'en est que plus flatté et rappelle l'influence qu'a eu cette femme dans sa plume. C'est en lisant certains de ses livres, comme Le chant de Salomon, Sula ou L'oeil le plus bleu que l'homme politique apprend à écrire. "Elle est quelqu'un qui m'a appris à écrire. Je n’ai pas suivi de cours d’écriture créative ni appris à écrire de manière formelle. J'ai appris par la lecture et ses livres qui étaient une université où apprendre à s’exprimer et à décrire de belle façon les questions humaines les plus fondamentales", précise l'ex-président.

Une influence qui dépasse le milieu des lettres pour attérrir en politique. "Peut-être que j'ai apporté des aspects d’une sensibilité littéraire à la présidence". Plus qu'un modèle littéraire, Toni Morrison était une amie habituée à "dîner dans un cadre décontracté" aux côtés de la famille Obama. "Ce qui était merveilleux chez Toni c’est qu’elle était à la fois majestueuse et espiègle et assez drôle. Elle avait un rire merveilleux et un sens de l’humour extraordinaire", se remémore t-il.

La littérature et la politique pour mieux "regarder l'autre" 

"La bonne littérature vous sort de vous-même et elle vous met à la place de personnes dont la vie est totalement différente de la vôtre. Et c’est ainsi que vous découvrez qui vous êtes réellement. Et je crois que parfois la politique peut faire la même chose" estime Barack Obama. A l'image de la littérature, la politique réunit des êtres opposés mais unis par une même histoire : "Elle prend des gens d’horizons très différents et elle dit : il y a un fil conducteur entre vous tous qui est que nous avons tous nos histoires personnelles mais nous avons aussi une histoire commune à raconter. Qui nous sommes en tant que peuple, ce qui est important, quelles sont nos valeurs et ce qui vaut la peine que l’on prenne des risques", reprend l'ancien président américain.

En cherchant à comprendre l'autre, nous saisissons la sensibilité de chacun et ses désirs. Une démarche que s'efforce d'entreprendre Barack Obama dans son ouvrage : "J’essaye dans ce livre de comprendre ce qu’ils pensent, ça ne veut pas dire que je suis toujours d’accord avec eux. C’est une des façons de sortir de l’impasse et des conflits que l’on voit aux Etats-Unis, mais aussi dans le monde entier. C’est pouvoir regarder l’autre d’une manière qui reconnaisse son humanité et ses intérêts." 

 "Fouiller le passé pour nous permettre de le regarder d’une manière honnête"

La question du racisme s'impose dans la conversation. "Le pouvoir d'un écrivain comme Toni Morrison est de fouiller le passé pour nous permettre de le regarder d’une manière honnête qui nous libère et qui nous permette d’aller de l’avant parce que nous en aurons tenu compte, nous avons assumé ce passé", considère Barack Obama. Dans sa bibliothèque, aux livres de Toni Morrison s'ajoutent ceux de Colson Whitehead et Jesmyn Ward car ils permettent de retracer l'histoire de la communauté afro-américaine.

Barack Obama sur le racisme
Barack Obama sur le racisme Barack Obama sur le racisme

Des questions qui doivent être abordées et résolues : "Les Etats-Unis doivent encore travailler d’avantage sur ces questions et comment faire cela. C'est ce que j’aborde aussi dans ce livre", explique Barack Obama. "Il est important de ne pas simplement essayer de définir les questions de race en tant que victime et coupable. Mais plutôt dire que c’est une situation humaine. Nous devons voir l’humanité de ceux qui étaient au sommet de la hiérarchie raciale et de ceux qui ont souffert de préjugés et de sectarisme et être capable de les voir comme des personnes entières, avec des bons et des mauvais côtés" conclut-il. 

Démystifier la fonction présidentielle

“Mon but dans ce livre est d’essayer de décrire que dans une démocratie, ceux d'entre nous qui accèdent à des postes de pouvoir sont encore des êtres humains avec des craintes, des doutes. Il y aura toujours un fossé entre l’image public et la fonction présidentielle avec ses aspects iconiques", soutient celui qui avait marqué sa campagne présidentielle par son célèbre "Yes we can".

Barack Obama sur la fonction présidentielle
Barack Obama sur la fonction présidentielle Barack Obama sur la fonction présidentielle
Si le président a volé dans les plus luxeux jets privés, il rappelle tout de même que jusqu'en 2008 c'est bien lui qui astiquait la carosserie de sa voiture. Raconter avec humour et transparence, une façon pour lui de "démystifier la fonction" de président et expliquer que ce n'est finalement qu'"un emploi".

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