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Rencontre. Yasmina Khadra : "La littérature c'est la domestication du délire"

L’auteur algérien Yasmina Khadra, de passage à Grenoble, s’est confié à une équipe de France 3 dans un entretien où il développe l’idée qu’il se fait du succès. A 62 ans, le romancier continue de séduire un public friand de ses œuvres, mais c’est avec humilité qu’il constate que ses romans se traduisent dans le monde entier.
Article rédigé par franceinfo
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L'auteur algérien Yasmina Khadra se confie sur la conception qu'il se fait de l'écriture et du succès.
 (France 3 / Culturebox)

Yasmina Khadra, de son vrai nom Mohammed Moulessehoul, est reconnu dans le monde entier. Ses quelques trente œuvres ont été traduites dans plus de quarante langues. Certaines des plus célèbres ont même été adaptées au théâtre ou au cinéma, comme "Les Hirondelles de Kaboul" ou encore "L’Attentat". Le romancier, qui écrit sous un pseudonyme composé des deux prénoms de sa femme, s’est rendu à Grenoble pour animer une conférence sur le rôle de l’intellectuel face aux enjeux actuels.

Reportage : France 3 Alpes - G. Ragris / V. Habran / S. Villatte


Un succès c’est le choix, un enthousiasme, parfois éphémère.

Mohammed Moulessehoul, alias Yasmina Khadra

Alors qu’il a obtenu de nombreuses distinctions littéraires, Yasmina Khadra reste humble, reconnaissant du succès qu’il connaît, sans pour autant être capable de l’expliquer. Il rappelle le caractère versatile du succès, qui peut apparaître aussi soudainement qu’il s’échappe, au même titre que certains auteurs, pourtant reconnus comme géniaux à titre posthume, n’ont jamais connu la célébrité de leur vivant.

"Le succès c’est une rencontre du troisième type, on ne sait pas comment ça arrive. Il y a d’immenses écrivains qui n’ont jamais eu de succès. Stendhal n’avait que 500 lecteurs de son vivant. Stendhal, le grand Stendhal, le géant, le colossal Stendhal ! Aujourd’hui un succès ne veut rien dire. Un succès c’est le choix, un enthousiasme, parfois éphémère."

Je suis comme un peintre.

Mohammed Moulesshoul, alias Yasmina Khadra
Artiste avant d’être auteur, une passion avant d’être un métier, Yasmina Khadra est bien conscient que l’écriture est un art qui demande aussi bien du talent que du travail. Mais ce qu’il désire mettre avant tout en lumière, c’est cet amour de la langue française qui lui permet d’écrire, de s’exprimer, et de transmettre des émotions à ses lecteurs. De là à se comparer à un artiste-peintre, il n’y a qu’un pas, que l’auteur franchi tout en métaphores.

"Derrière ce succès il y a un travail, un vrai travail de fond, un travail sur la langue. La langue française moi je ne l’ai pas étudiée, je l’ai aimée. Je ne suis pas grammairien, je suis une sorte d’artiste. J’aime construire avec cette langue des fresques, des paysages. Je suis comme un peintre. Mais au lieu d’avoir des pinceaux entre les mains, j’ai des mots."

J’essaie de voir si je suis un vrai romancier ou pas !

Mohammed Moulesshoul, alias Yasmina Khadra
La littérature comme exutoire ou comme exercice de style ? Nombreux sont les auteurs qui considèrent l’écriture comme une forme de thérapie, pour apaiser les vieux démons. Qu’il s’agisse de fiction ou de réalité, de roman ou de biographie, l’écriture nécessite que l’on se prête au jeu de l’imagination. Le plus difficile étant de savoir conserver la distance nécessaire, pour éviter de se laisser déborder. C’est ainsi que Yasmina Khadra conçoit la littérature.

"Vous savez comment je définis la littérature ? C’est la domestication du délire. Et si on arrive à être maître d’un délire, si on arrive à rester lucide dans un délire, alors on est un vrai romancier. Alors j’essaie de voir si je suis un vrai romancier ou pas !"

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