"A qui la faute", le thriller à huis clos glaçant de Ragnar Jonasson
L’amitié, comme l’amour, finit mal, en général. En particulier, quand les fantômes du passé refusent obstinément de mourir. Les vivants transportent avec eux les cadavres récalcitrants du passé. Avec un risque non négligeable : vivre, au quotidien, avec la mort pour seule compagne. Avec un sens aigu de la mise en scène, Ragnar Jonasson nous enferme dans A qui la faute (La Martinière Noir) pendant une nuit entière dans un huis clos étouffant.
Agatha Christie sous la neige
Quatre amis d’enfance se retrouvent pour une partie de chasse à la perdrix des neiges dans les hauts plateaux de l’est de l’Islande. "Il n’était pas censé neiger. Pas tout de suite. Et pourtant, les bourrasques s’abattaient à présent violemment sur eux, sans relâche". Pris dans une tempête aussi soudaine que violente, ils se réfugient dans une cabane. Aux personnages, aux lecteurs, l’écrivain islandais semble dire : bienvenue en enfer, toi qui entres ici, abandonne toute espérance.
Dans la cabane, ils découvrent un intrus aussi effrayant que silencieux. Longue est la nuit. Les ressentiments, les rancunes refont surface, à côté de l’étranger mutique. L’amitié est mise à rude épreuve. Les quatre amis étaient-ils réellement amis par le passé ? Le passif n’est-il pas très, trop lourd à cause des mots tus, de mémoires sélectives ? Avec une écriture nerveuse, narrant les événements du point de vue de chaque protagoniste, Ragnar Jonasson brouille tous les repères et nous tient en haleine jusqu’à la dernière page, jusqu’à la dernière ligne. A qui la faute se situe entre Agatha Christie (dont l’auteur est grand fan et traducteur en islandais) sous la neige et Reservoir Dogs de Quentin Tarentino. Un thriller nordique glaçant.
"A qui la faute", Ragnar Jonasson, éditions La Martinière Noir, 21,5 euros
Extraits : "Et le blizzard s'était déchaîné, brutal et terrifiant, le prenant de court. Une violente rafale de vent avait soufflé sur le sol glacé, les forçant à s'arrêter pour ne pas tomber. L'instant d'après, d'énormes nuages noirs fonçaient vers eux à une vitesse incroyable, obscurcissant le ciel et emplissant l'air de tourbillons de neige aveuglants. (...) C'était une si belle journée. Mais Daniel aurait dû savoir que c'était lorsqu'on s'y attendait le moins que la nature se montrait la plus cruelle, particulièrement en Islande. Elle n'avait aucune pitié, on n'était jamais tout à fait en sécurité. Même les jours d'été les plus ensoleillés pouvaient se relever meurtriers à la moindre inattention".
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