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"Colère chronique" de Louise Oligny : vengeance sanglante dans une rédaction parisienne

L’autrice canadienne, installée à Paris, se penche avec férocité sur la précarité, le chômage chez les plus de cinquante ans et leur place dans la société. Humour grinçant.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 2min
Couverture de "Colère chronique" de Louise Oligny (Black Lab)

Fallait pas la licencier, Diane Choinière. Fallait pas la priver de ses indemnités. Diane ne carbure plus qu’à l’alcool et aux antidépresseurs. Vingt-deux ans qu’elle travaille pour le magazine conservateur Chronique Hebdo, Vingt-deux qu’elle souffre en silence. Faut dire, selon Diane, que son magazine a entamé un glissement vers l’extrême et qu’elle est en colère contre ses choix éditoriaux. Faut dire aussi qu’elle est trop bien payée, selon sa direction. Et donc, elle est priée de vider les lieux. Avec Colère chronique (Black Lab), Louise Oligny signe un premier thriller social féroce.

Réalité parallèle

A 55 ans, la photoreporter Diane Choinière croit moyennement en ses chances de retrouver un travail. A 55 ans, elle est "vieille" pour le métier et pas assez pour la retraite. Tout lien avec l’actualité n’est que pure coïncidence. Tout le roman est, d’ailleurs, une fiction. "Si, par un malheureux hasard, certains ou certaines croyaient se reconnaître, il leur serait vivement recommandé de consulter un psychologue, un exorciseur ou d’aller se confesser", prévient l’autrice. Et, donc, les coïncidences peuvent se révéler des autoroutes pour la folie. A chaque fois que Diane Choinière rumine sur son licenciement abusif, elle plonge dans une réalité cotonneuse, noyée sous l’alcool fort et les anxiolytiques. Dès qu’elle pense à un responsable de ses malheurs, ce dernier meurt violemment.

Au bout du troisième assassinat, la police finit par la soupçonner. A dire vrai, avant la police, elle se soupçonne elle-même de mettre à exécution ses fantasmes d’une vengeance gore. Même son nouveau et improbable amoureux voit ses certitudes vaciller.

Un bémol : une deuxième histoire vient se greffer inopportunément à la fin du récit, elle est peut-être de trop. Au-delà de l’enquête policière, Louise Oligny, elle-même photographe et sensiblement du même âge que son personnage, se penche sur la précarité, le chômage chez les plus de cinquante ans. A partir de quel âge devient-t-on trop vieux, trop cher pour l'employeur, et -par conséquent- licenciable et jetable ? Avec un style enfiévré, Louise Oligny interroge la société de consommation. Son livre résonne comme un écho, rattrapé par l'actualité. 

(Colère chronique, Louise Oligny, Black Lab, 20,90 euros)

Couverture du livre "Colère chronique" de Louise Oligny (Black Label)

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