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"Et soudain le chasseur sortit du bois" : meurtres en série chez les Soviets

Ioulia Iakovleva choisit l’Union soviétique des années 1930 comme cadre pour son thriller paranoïaque. L’écrivaine plonge dans une période encore sensible en Russie.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Couverture du livre "Et soudain le chasseur sortit du bois" de Ioulia Iakovleva. (Actes Sud)

"J’ai été arrêté, Katerina Egorovna. Mais rassurez-vous, j’ai été lavé de tout soupçon et libéré. Chez nous, personne ne jette les innocents en prison. On est en Union soviétique, pas en Amérique", crie, très fort, l’inspecteur Zaïtsev. Il veut être entendu de tous les locataires de sa kommunalka, appartement communautaire. Les oreilles et les yeux de la Guépéou, police d’Etat, sont partout. Et l’inspecteur Zaïtsev vient juste de sortir de prison, après avoir été auditionné par un comité d’épuration. Le livre Et soudain le chasseur sortit du bois (éditions Actes Sud) de Ioulia Iakovleva nous plonge dans les années 1930 à Leningrad, ville qui a retrouvé son nom de Saint-Pétersbourg après la chute de l’URSS. L’épuration voulue par le camarade Staline bat son plein. L’ennemi intérieur est partout. Tout le monde est suspecté, y compris les inspecteurs de la criminelle.

L’amour au temps de la délation

 L’autrice s’est inspirée de faits réels. Dans sa recherche d’authenticité, elle est allée jusqu’à utiliser le lexique postrévolutionnaire. Ioulia Iakovleva a lié deux évènements : la série de meurtres et la disparition de tableaux de maîtres dans le musée de l’Ermitage. Y a-t-il un lien ?  C’est dans cette ambiance paranoïaque où chacun espionne son voisin et collègue, que l’équipe de l’inspecteur Zaïtsev est chargée d’enquêter sur une série de meurtres sortant de l’ordinaire, aussi bien par la façon dont les victimes sont tuées que par les mises en scène étranges. La façon dont les corps sont habillés et disposés laisse les enquêteurs interrogatifs. Toutes les pistes se révèlent être des impasses.

Si leur enquête piétine, celle de la police d’Etat se rapproche de plus en plus des enquêteurs. La méfiance s’installe dans l’équipe. Zaïtsev trouve un répit, une respiration, un oasis, quand il rencontre une costumière de théâtre. L’amour est-il possible dans une société sous surveillance ? L’écrivaine russe Ioulia Iakovleva, installée à Oslo, nous plonge dans un pays en proie à une peur collective. Le romantisme révolutionnaire a cédé la place à la réalité stalinienne. Les purges ne font que commencer. La délation, encouragée par une police avide de renseignements, est érigée en mode de vie.

Au-delà de l’intrigue, Et soudain le chasseur sortit du bois est une description clinique d’une société totalitaire qui entend effacer toute individualité. Un thriller efficace.

"Et soudain le chasseur sortit du bois" de Ioulia Iakovleva (Actes Sud, 24,50 euros)

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