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Immortelles, roman des amitiés féminines et des utopies sixties

Si elle compte à son actif nombre de biographies - celles de Françoise Giroud, Marguerite Duras ou Hannah Arendt - Laure Adler publie à 63 ans son premier roman. La narratrice se souvient de trois de ses amies disparues ou perdues de vue, Florence, Suzanne et Judith. Et ressuscite les années 1960 et 1970, et quelques-unes de leurs utopies.
Article rédigé par franceinfo
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L'écrivain Laure Adler
 (JF Paga - Grasset )

C'est le roman des amitiés de jeunesse, à la force sans pareille. La narratrice se souvient de Florence, Suzanne et Judith, qui l'ont marquée à jamais. "Immortelles" rappelle, en chapitres entrecroisés, leur histoire. Florence, plutôt de bon milieu, mais dont la mère, à moitié folle, avait des absences, et qui a pris goût très tôt à l'école buissonnière. L'altruiste Suzanne, fille d'une infirmière mère célibataire - ce qui était encore mal perçu, dans les années 50.

L'Argentine Judith enfin, rencontrée à la Sorbonne et dont les parents juifs polonais avaient fui les persécutions nazies et rejoint la résistance française pendant la Seconde guerre mondiale avant de s'exiler en Amérique latine.

Toutes courageuses, certaines idéalistes. Surtout Suzanne, qui fait découvrir au collège à la narratrice Les Nourritures terrestres de Gide, ce grand livre de la découverte du désir et du plaisir ("Nathanaël, je ne crois plus au péché"). En compagnie, toujours, de la narratrice, Suzanne ira écouter les cours du philosophe Gilles Deleuze avant de travailler comme soignante à la clinique de la Borde, avec le psychiatre Félix Guattari.

Ce sont sans doute les plus belles pages du livre, celles qui évoquent une époque plus douce aux fous (au moins dans l'intention). Même si Mai 68 engendra aussi - et la narratrice le rappelle - de navrants slogans. Comme celui-ci, scandé au festival d'Avignon : "Vilar, Béjart, Salazar !" Quoi de commun pourtant entre le directeur du Théâtre national populaire, le rénovateur du ballet et le dictateur portugais ? Mais l'époque n'était pas à la nuance.

Gageons que ce roman largement autobiographique parlera davantage à la frange de lecteurs (trices) nostalgiques des golden sixties ou des utopies seventies qu'aux plus jeunes. Mais il a la vertu de rappeler le cauchemar que fut l'avortement dans les années 60 et de ressusciter la ferveur qui a pu entourer des psychiatres voulant faire tomber les murs des asiles, en un temps de crise moins généreux.

Immortelles, Laure Adler (Grasset - 300 pages - 19 euros)

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