"L’oiseau qui buvait du lait" : un thriller lituanien aux limites du soutenable, signé Jaroslav Melnik
Il tête, tue et disparaît. Le commissaire Algimantas Butkus n’a jamais vu un tueur aussi effrayant. Avec ses collègues de la criminelle de Vilnius, il se lance à sa poursuite. Jaroslav Melnik, écrivain ukrainien installé en Lituanie, signe avec L’oiseau qui buvait du lait (Actes Sud) un thriller captivant.
Le survol de l’aigle
Pour son premier thriller, Jaroslav Melnik a trouvé son anti-héros : Algimantas Butkus, quinquagénaire, petit, ventripotent avec des dents qui se déchaussent et atteint d’une bronchite qui se révèle être la tuberculose. Et comme si cela ne suffisait pas, sa femme le quitte et sa fille s’installe en Arabie Saoudite. Et son père, malgré son âge avancé et son état de santé, quitte aussi le domicile familial pour s’installer avec sa dulcinée. Seul, complètement seul, Algimantas Butkus se réfugie dans le travail. Il ne chôme pas. La police découvre un deuxième cadavre en plein milieu de la capitale. Le modus operandi est immuable : les jeunes femmes sont nues, un oiseau déposé sur leurs cadavres, elles venaient toutes d'accoucher. L'assassin ne les viole pas, il a tété leur sein gauche avant de découper les mamelles.
Dans ce livre, Jaroslav Melnik questionne l'amour maternel et la foi. Y a-t-il encore une vie après la mort de sa mère, jeune ? Y a-t-il une différence entre une religion et une croyance ? Il interroge le réel et le fantastique. Comment devient-on un assassin ? L'auteur de Macha ou IVe Reich (Actes Sud) laisse éclater tout son talent. La relation fusionnelle mère-fils, particulièrement leur rapport à l'allaitement, y est décrite avec poésie et sans jugement. Jaroslav Melnik sonde les âmes et scrute la société. A travers ce livre, l'écrivain ukrainien, installé à Vilnius, raconte aussi son pays d'adoption, entré dans l'Union européenne en 2004, et notamment l'exode des jeunes vers le Royaume-Uni, à la recherche d'une vie meilleure.
L’oiseau qui buvait du lait est le premier thriller de Jaroslav Melnik, qui a auparavant écrit des livres dystopiques ou de science fiction. Il comporte quelques généralités et lourdeurs dont l'auteur aurait pu faire l'économie mais reste un roman fascinant. On s'attache très vite au commissaire Algimantas Butkus et son équipe. A quand le prochain ?
(L’oiseau qui buvait du lait, Jaroslav Melnik, Actes Sud, 24,5 euros)
Extraits : "Le lendemain, elle était morte. Ils rentraient de chez leurs parents en voiture. Sa mère conduisait et chantait. Un fourgon qui venait d'en face se déporta sur leur voie à cent mètres d'eux. Ils n'avaient aucune chance de s'en tirer. Le fourgon roulait à près de cent kilomètres-heure. (...) S'il avait survécu, ce qui n'était que parce qu'il était assis à droite et que le choc le plus violent avait porté sur le côté gauche. (...)Mais Dieu l'avait-il laissé en vie, qui sait pourquoi ? (...) Mais le plus affreux était arrivé après. A l'hôpital. A l'orphelinat où on l'avait envoyé après l'hôpital".
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