"La rivière", dernier roman de Peter Heller : tout sauf un fleuve tranquille
"La rivière", quatrième roman de Peter Heller, est un thriller campé dans la nature sauvage du Nord canadien.
Derrière ce titre paisible le romancier américain Peter Heller nous met sous tension de bout en bout en nous embarquant en compagnie de deux étudiants à bord d'un canoé dans les rapides du fleuve Maskwa, dans le Nord du Canada. Ce thriller campé en pleine nature sauvage est paru le 5 mai 2021 aux éditions Actes Sud.
L'histoire : Jack et Wynn, deux amis d'enfance ont décidé de réaliser leur rêve : faire une expédition en canoé sur le fleuve Maskwa, au Nord du Canada. Tous deux à l'orée de leur vie adulte, ils veulent vivre à fond leur aventure, "sans précipitation", en prenant le temps de pêcher, de chasser, de cueillir des baies, de regarder les étoiles où de fumer la pipe avec "l'impression d'être de vieux explorateurs".
"Jack et Wynn voulaient essayer autre chose, savoir ce que ça faisait de vivre un peu dans un paysage."
"La rivière"page 33
La menace d'un gigantesque feu de forêt galopant à pleine vitesse dans leur direction et la rencontre avec un homme ayant abandonné en amont sa femme mourante, transforme leur balade en course contre la montre et leur rêve en enfer.
Survivre en milieu hostile
Ce quatrième roman de l'auteur de La constellation du chien (2013), de Peindre, pêcher et laisser mourir (2015), ou de Céline (2019) est une nouvelle ode à la nature, "si belle et totalement insouciante", autant qu'"implacable et violente". Cette ambivalence se joue en miroir avec l'amitié qui lie Jack et Wynn, deux garçons aux tempéraments opposés. Jack, animal instinctif, est un chasseur averti, l'œil aiguisé, et le cœur endurci par la disparition quand il était enfant de sa mère dans un accident. Wynn est une âme pure, un indécrottable rêveur gardant quoi qu'il arrive sa foi en la nature humaine.
Si différents mais comme des frères, ils pagaient dans une harmonie qui se passe de mots, unis par un lien d'amitié tissé dans l'enfance, soudé par des passions communes, la littérature, la nature, ou encore le goût de l'aventure partagée.
D'une écriture affûtée, rythmée comme le battement des pagaies du canoë maniées avec une haute précision, Peter Heller joue avec les nerfs de son lecteur, autant qu'il l'émerveille avec les splendeurs de la nature, la poésie des moments suspendus, partagés par les deux amis en osmose avec les éléments, la faune, et la flore. Il nous dit aussi, et c'est cruel, combien chaque instant, chaque geste, chaque décision compte dans des circonstances où la nature se déchaîne, et où, coupé du monde civilisé et de ses lois, l'homme redevient un loup pour l'homme.
"La rivière", de Peter Heller, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Céline Leroy (Actes Sud – 304 pages – 22 €)
Extrait :
Le feu se consuma jusqu'à ne laisser que des braises et les garçons ne sentaient plus du tout l'odeur du sinistre qui se propageait au Nord-ouest ; à croire qu'il n'existait plus. La brise avait dû repartir dans l'autre sens. Ils n'en parlèrent pas, mais de temps en temps, l'un ou l'autre tournait le visage vers le lac et dilatait les narines exactement comme un élan ou un cerf humant l'air à la recherche d'un prédateur.
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