Petit tour d'horizon des romans de la rentrée littéraire d'hiver
Cette nouvelle saison littéraire est marquée par le retour d'auteurs très attendus comme Pierre Lemaitre qui publie "Couleurs de l'incendie" (Albin Michel), second volet palpitant de la trilogie ouverte par "Au revoir là-haut" (Goncourt 2013 et un million d'exemplaires vendus) ou la mystérieuse Italienne Elena Ferrante avec "L'enfant perdue" (Gallimard), qui clôt la saga "L'amie prodigieuse".
64 petits nouveaux côté français
Mais cette rentrée pourrait être l'occasion de découvrir de nouveaux auteurs. Alors que l'année 2017 s'est révélée morose pour le monde de l'édition avec, selon des chiffres provisoires, des ventes en baisse, 64 nouveaux auteurs tentent leur chance. Parmi ces primo-romanciers, on trouve Jean Berthier qui publie "1144 livres" (Robert Laffont), récit (et subtil hommage à la lecture) d'un orphelin né sous X qui reçoit en héritage de sa mère biologique un lot de 1.144 livres qui lui permettront, peut-être, de découvrir qui elle était ou encore Myriam Leroy avec son inquiétante "Ariane" (Don Quichotte).Avec son premier roman "Habiletés sociales" (Flammarion), Camille Cornu, 30 ans, récente titulaire d'un master de création littéraire de l'université Paris-VIII Saint-Denis confirme (après le phénomène David Lopez, révélation de l'automne avec "Fief") que cette école, animée notamment par les écrivains Olivia Rosenthal et Vincent Message, est devenue une pépinière de jeunes écrivains d'un incroyable talent. C'est le cas encore d'Aliona Gloukhova, 33 ans, également passée par ce cursus, dont le premier roman, "Dans l'eau je suis chez moi" (Verticales) déchire le coeur.*
Des personnalités extérieures au monde de l'édition (le chanteur Cali, la comédienne Isabelle Carré, l'avocat Richard Malka, le cinéaste Régis Wargnier) se retrouvent aussi parmi les primo-romanciers de la rentrée d'hiver avec des textes souvent inspirés de leur propre vie.
Jauffret, Bouillier, Schneck et le dernier d'Ormesson
On peut préférer des auteurs confirmés, comme Régis Jauffret avec ses "Microfictions 2018" (Gallimard), 500 courts récits durs et brillants comme des diamants, ou le roman posthume de Jean d'Ormesson ("Moi je vis toujours", Gallimard). Lauréat du prix Décembre, Grégoire Bouillier livre le second tome de son monumental "Dossier M" (Flammarion) aussi ambitieux et réussi que le premier volet. Avec "Les guerres de mon père" (Stock), Colombe Schneck se dévoile dans un récit souvent bouleversant.On se laissera aisément emporter par le souffle de Patrick Grainville qui nous entraîne en Normandie au moment de l'invention de l'impressionnisme jusqu'à la fin des années 1920 dans "Falaise des fous" (Seuil). Gérard de Cortanze (prix Renaudot en 2002) propose un autre émouvant voyage dans le temps, des années yéyé jusqu'aux récents attentats qui ont endeuillé Paris, avec "Laisse tomber les filles" (Albin Michel), du nom de la chanson de la récente disparue France Gall.
Le romancier Olivier Bourdeaut signe "Pactum Salis (Finitude), un deuxième roman très attendu après le succès de son premier roman "En attendant Bojangles" (Finitude 2016), l'histoire d'une amitié improbable entre deux hommes que tout oppose, campée entre mer et terre dans les marais salants de Loire-Atlantique. Un second roman très différent du premier, qui plonge le lecteur dans une atmosphère de polar décalé. Ivan Jablonka revient lui aussi avec "En camping-car" (Seuil), un livre invite le lecteur dans un voyage dans les années 80 de son enfance à bord du mythique Combi Volksvagen.
Rambaud, Tahar Ben Jelloun, Assouline
Plusieurs membres de l'académie Goncourt, Patrick Rambaud, Tahar Ben Jelloun et Pierre Assouline ont également repris leur plume tout comme leurs collègues du Renaudot : Frédéric Beigbeder, Jérôme Garcin, Jean-Noël Pancrazi et Patrick Besson qui signe un désopilant "Tout le pouvoir aux Soviets" (Stock).David Fauquemberg signe avec "Bluff" (Stock) le récit le plus tonique de la rentrée, Bernard Quiriny fait naviguer ses lecteurs entre rire et angoisse avec "L'affaire Mayerling" (Rivages) tandis qu'Yves Pagès offre avec "Encore heureux" (L'Olivier) un roman où souffle sans s'épuiser l'esprit libertaire. On jurerait lire un roman américain à la lecture des "Oiseaux morts de l'Amérique" (Actes Sud) de Christian Garcin superbe récit qui nous entraîne sur les pas de vétérans du Vietnam et d'Irak reclus dans des égouts de Las Vegas.
Auster, Erdrich, Lynch, Shafak et un inédit de Singer
Les amateurs de "vrais" romans américains pourront se régaler avec "La Rose" (Albin Michel) de Louise Erdrich, l'époustouflant "4 3 2 1" (Actes Sud) de Paul Auster et "Face au vent" (Gallmeister) de Jim Lynch.Parmi les auteurs étrangers, il faut encore signaler la romancière d'origine turque Elif Shafak avec "Trois filles d'Eve" (Flammarion), une violente satire de la bourgeoisie stambouliote, et "Keila la Rouge" (Stock), formidable et malicieux texte d'Isaac Bashevis Singer jusqu'à présent inédit.
Les éditions de L'Olivier publient "Des jours d'une stupéfiante clarté", le dernier roman du romancier israélien Aharon Appelfeld, disparu au début de l'année. Aharon Appelfeld y fait le récit de l'errance de Theo Kornfeld, âgé de 20 ans, à travers les paysages de l'Europe centrale. Le jeune homme a quitté le camp de concentration abandonné par ses gardiens à l’approche des Russes. Ce dernier roman, annonce la maison d'édition, est traversé par les questions qui ont toute sa vie hanté l'écrivain : "Comment vivre après la catastrophe ? Comment concilier passé et présent, solitude et solidarité ? Comment retrouver sa part d’humanité ?".
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.