Avec le Louvre d'Abu Dhabi, Jean Nouvel signe une "agora arabe" ouverte sur le monde
Emmanuel Macron inaugure mercredi le Louvre Abu Dhabi, dix ans après l’accord qui avait lancé le projet. Le résultat d’une étroite collaboration entre Paris et Abu Dhabi. L'architecte est le Français Jean Nouvel.
C'est une ville musée, sur l’eau, qui évoque Venise avec ses rues ou ses places offrant des ouvertures sur la mer. Un immense dôme ajouré laisse pénétrer la lumière et les 55 bâtiments blancs sont inspirés par les médinas arabes. Le Louvre Abu Dhabi est inauguré mercredi 8 novembre par Emmanuel Macron, dix ans après la signature de l’accord intergouvernemental qui avait lancé le projet.
Ce nouveau musée est le fruit d’une étroite collaboration entre Paris et Abu Dhabi, avec des œuvres prêtées par la France, et un architecte français, Jean Nouvel. Ce dernier a créé une ville musée sur l’île de Saadiyat à 10 kilomètres du centre d’Abu Dhabi.
J’ai voulu créer quelque chose ici avec les signes de l’arabité, et la coupole blanche, c'est un signe de spiritualité et d’arabité
Jean Nouvelà franceinfo
Une ville flottante
Jean Nouvel souhaitait également créer un musée "qui soit plutôt dans la conception grecque du musée, c’est-à-dire la conception de l’agora", ajoute-t-il, précisant qu’il souhaitait concevoir "une agora arabe". Dans les galeries du musée, 535 œuvres sont présentées, dont 300 prêtées par la France. Le Louvre s’est notamment séparé pour un an de La Belle Ferronnière de Léonard de Vinci. On trouve également l'Autoportrait de Vincent Van Gogh. Les 235 autres œuvres sont des acquisitions du Louvre Abu Dhabi depuis 2009.
Un musée universel
Toutes les périodes sont représentées au Louvre Abu Dhabi : de la Préhistoire au XXIe siècle. Quelques œuvres contemporaines ont trouvé leur place, notamment un arbre en bronze de l’artiste italien Giuseppe Penone. L’idée est de mélanger toutes les cultures.
La première salle illustre parfaitement cette volonté."Dans ces vitrines, nous voyons trois masques mortuaires en or, l'un vient d'Amérique latine, un autre de Chine, et le troisième d'Europe", décrit l'une des conservatrices du musée, Juliette Singer.
"On s'aperçoit alors que si les gens ne communiquaient pas à l'époque, des pratiques communes apparaissaient en différents points de vue", constate-t-elle.
L'installation des oeuvres a été conçue pour faire dialoguer les cultures. "L'accrochage mélange toutes les cultures et toutes les techniques", explique Jean- Luc Martinez, le président du Louvre. "Vous avez à la fois des oeuvres chinoises, européennes, des oeuvres des grandes civilisations du monde islamique de l'époque moderne", poursuit-il. Le musée s’autorise presque à tout montrer, notamment quelques nus féminins - mais pas les plus provocants, et privilégie les sculptures aux peintures.
Une section du musée est par ailleurs consacrée aux religions universelles. Toutes y ont leur place. Dans une salle, sont posés côte à côte, une Torah du 15e siècle provenant du Yémen, une Bible gothique du 13e siècle et un feuillet du Coran datant de 900.
Un achat de 400 millions d'euros
Même s’il en porte le nom, le Louvre d'Abu Dhabi n'est pas une annexe du musée parisien. La marque a en effet été achetée par Abu Dhabi pour trente ans à compter de 2007, moyennant le versement de 400 millions d’euros. Le Louvre, comme les 12 autres musées français impliqués dans le projet, est également rémunéré pour les prêts des oeuvres.
Ces 13 institutions vont ainsi se partager 190 millions d’euros pendant dix ans. À cela, il faut ajouter l’organisation d’expositions temporaires à raison de quatre par an pendant quinze ans, là encore contre rémunération. La France est donc très présente au Louvre Abu Dhabi. Sa mission est d’accompagner les émiriens pour qu’ils puissent être autonomes dans quinze ou vingt ans.
La Chine et l'Inde : de gros clients potentiels
Prochaine étape pour le Louvre Abu Dhabi : trouver son public local et international. L'ouverture au public est prévue samedi 11 novembre. Le musée va naturellement attirer le public local et régional, notamment familial. Un musée des enfants, partie intégrante du Louvre Abu Dhabi, a d'ailleurs été conçu. L'émirat compte également faire venir les touristes venus d’Europe. Mais pas seulement...
"Nous sommes à quelques heures de vol de l'Inde. Un peu plus loin, il y a la Chine qui se développe", explique Manuel Rabaté, le directeur du Louvre Abu Dhabi. Après la Chine, "l'Inde est le second marché-clé pour les Emirats arabes unis", précise-t-il, sans communiquer les chiffres prévisionnels de fréquentation.
Ambition : un temple de la culture
Pour faire venir les touristes, l’émirat avait décidé de faire de l’île de Sadiyat, où se trouve le Louvre Abu Dhabi, un temple de la culture. Deux autres musées devaient y être construits : le Guggenheim Abu Dhabi annoncé initialement pour 2013 avec pour architecte l’américain Frank Gehry, et le Zayed National Museum qui devait être bâti par le britannique Norman Foster. Dans les deux cas, les travaux n’ont toujours pas commencé. Il y a plusieurs années de retard. Mais Mohamed Khalifa Al Mubarak, président de l’autorité du tourisme et de la culture d’Abu Dhabi, affirme que c’est une question de mois.
"Nous espérons pouvoir commencer à la fin de l'année les travaux du musée national Zayed et nous espérons débuter en 2018 ceux du Guggenheim Abu Dhabi", explique-t-il, confiant. Rendez-vous donc en 2018 pour voir ce qu’il en est, et tenter aussi de dresser un bilan de la première année d’ouverture du Louvre Abu Dhabi.
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