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Maurizio Galante, couturier et designer, pose un regard transversal sur la mode
Le couturier d'origine italienne Maurizio Galante offre une vision croisée qui traverse la mode, le design, l'architecture d'intérieur et l'art. Il jongle entre ces différents domaines, les mixte et cherche à provoquer des émotions. Son travail oscille entre sophistication et discrétion, rigueur et poésie, allure et modernisme, tradition et innovation. Rencontre avec un boulimique de travail.
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5 questions à Maurizio Galante
- Quelle est la pièce préférée de votre dernière collection ?
Il s'agit du boléro Drago constitué de triangles de soie séparés les uns des autres comme des écailles. Cette dernière collection comprend aussi un vase en céramique constitué de plusieurs épaisseurs, qui ne sont pas fixes. Ce que j'aime ici, c'est qu'à partir d'une matière qui n'est rien, avec des mains et du feu, on réalise des choses fixes mais aussi le mouvement.- Quel créateur vous a marqué au cours de votre carrière ?
Le sculpteur et peintre Lucio Fontana. Je n'ai pas de pièces préférées mais j'aime beaucoup ses céramiques. Des pièces de jeunesse peu connues. Tout le monde connait son travail sur le concept spatial dans la peinture (surface trouée, toile lacérée…). C'est un artiste, que j'adore. Cette présence, cette notion de l'espace. On interprète ce qu'on voit. C'est comme la poésie chinoise de Wang Wei qui offre juste en quelques lignes de belles descriptions. On peut imaginer quelque chose, y mettre nos émotions.Le pavillon de Bambou
Assis seul en un bosquet retiré,
Je joue du luth et l'accompagne de longs sifflemenrs.
Dans la forêt profonde, nul ne sait que je suis là,
et la lune brillante vient me complaire de son éclat.
- Quel est le dernier livre lu ?
Le journal de bord de Monsieur de La Pérouse. C'est un livre magique qui raconte ce voyage commandité par Louis XVI : il a réalisé en un seul voyage ce qu'avait fait James Cook en plusieurs fois ! Cette notion d'inconnu, de terre, de mer, c'est magnifique. J'ai beaucoup aimé ce plaisir mélangé à la peur.- Quelle est la dernière exposition vue ?
L'exposition "Bijoux et tabous" au musée d'Art moderne de Paris. Le titre exact est "Medusa. Bijoux et tabous" mais j'omets Medusa car ce nom ajoute un aspect mass market kitch, dont les bijoux n'avaient pas besoin. Les pièces sont magnifiques comme la bouche de Dali. A l'origine, les bijoux étaient conçus pour protéger les parties délicates du porteur. J'aime cette notion et comment des artisans et des créatifs ont détourné cette notion d'utilisation. Utile et pas utile.J'ajouterai un autre endroit que j'ai revisité. C'est l'atelier de Gustave Moreau. Il y a une énergie magnifique, un bel escalier et des accrochages de tableaux finis et d'autres pas terminés.
- Quel est le dernier coup de cœur musical ?
La chanteuse américaine Julie London. Elle chantait dans les années 50. C'est un album magnifique entre jazz et soul presque chanté simplement. Il n'y a pas de musique, que la voix. Ce qui me plait, c'est cette voix qui remplit tout, sans avoir besoin d'instrument. C'est pour moi une musique nocturne.Maurizio Galante : les clés de son univers
- Un couturier également designer
Associés depuis 2003, Maurizio Galante et Tal Lancman tissent des liens entre mode et design. Le couturier italien et le prescripteur de tendances et designer israélien ont développé un univers où fusionnent féerie visuelle et recherche technique. Dans le cadre de l'exposition AD INTÉRIEURS 2017, en septembre 2017 à Paris, ils ont créé une chambre à coucher surréaliste dans laquelle du sol aux murs jusqu’au plafond court une moquette imprimée marbre façon test de Rorschach dans des tonalités de rose-rouge-orange.Ici fauteuils et tabourets sont recouverts de fausse fourrure parsemée d’yeux en verre qui sont "liés à la nuit, aux rêves". "Cette chambre renvoie au rêve, à l’inconscient... C'est comme ouvrir une fenêtre pour voir de nouvelles choses" souligne Tac Lancman. "Le rouge est la seule couleur qui nous accompagne toute la vie, de la naissance à la mort" souligne Maurizio Galante.
Sur le mur un néon attire le regard. Il représente un lion et une licorne. "Il peut en première lecture se voir comme un lion qui va manger la licorne mais une deuxième lecture peut se lire comme une sorte d'accouplement entre le réel et l'irréel, le terrestre et un autre monde" explique le couturier.
"La force du design est de participer à notre vie. On conserve ces objets pendant de longues années contrairement à la mode qui voyage. La mode est liée à des jeux de rôles : on est un personnage quand on enfile un vêtement, tandis que l'objet de design accompagne notre vie. C'est un repère" insiste Maurizio Galante.
- Un couturier pour qui le vêtement est vecteur d'émotions
"La notion de couture est différente aujourd'hui par rapport aux années 50, 60, 80 et 90. Le vêtement doit être une pièce que l'on porte avec plaisir, qui provoque la conversation, l'émotion. Cette émotion que l'on ne retrouve pas seulement dans la mode mais aussi dans le design" insiste le couturier. Présentée en juillet 2017, sa collection haute couture intitulée "Drago" s'inspire du dragon qui transmet poésie et force. Le créateur ne travaille pas sur des matières rigides. Pour lui, "c'est le mouvement d'un vêtement qui, en épousant le corps, trahit les émotions. Le même vêtement, s'il est posé inanimé sur une table, devient un objet de design".Le couturier harmonise deux opposés : des silhouettes volumineuses avec leurs écailles pointues qui rappellent les dragons et des vêtements d'une souplesse étonnante en soie ultra légère. "Les vêtements Drago encadrent et protègent. À mesure que ces formes flottent autour du corps, elles renforcent la présence de celle qui les porte". Outre les créations couture, cette collection proposait meubles pièces uniques et vases faits à la main en édition limitée.
Le designer voit ses vêtements "comme des objets/compagnons, lovant celles qui les portent d’une présence amicale, tels des talismans dotés d'anima et d'aura. Comme une architecture flexible, fluide, je vois les vêtements comme des espaces de vie qui enveloppent le corps, protégeant et structurant celle qui les porte, soulignant ses gestes" explique-t-il.
- Des projets : resto-galerie, porcelaines retravaillées...
Boulimique, il travaille déjà sur d'autres projets : l'un d'entre eux concerne "un resto-galerie avec une série d'objets miniatures qui représentent la créativité parisienne" prévu pour 2018. Il y a aussi un autre volet design avec "des figures en porcelaine du 19e représentant des oiseaux exotiques (perroquets) et nocturnes (chouettes), présentés sur des cloches inversées en guise de socle.Boulimique, il travaille déjà sur d'autres projets : l'un d'entre eux concerne "un resto-galerie avec une série d'objets miniatures qui représentent la créativité parisienne" prévu pour 2018. Il y a aussi un autre volet design avec "des figures en porcelaine du 19e représentant des oiseaux exotiques (perroquets) et nocturnes (chouettes), présentés sur des cloches inversées en guise de socle.
Chaque oiseau en porcelaine est recouvert de 6 couches de tissus de tailles différentes et de minuscules perles pour représenter les plumes. "J'aime l'idée de donner une seconde vie à un objet. Cela me fait presque de la peine car la figurine ne raconte pas la beauté et la fragilité de l'oiseau : quand il est relax, en parade amoureuse ou mort. A chacun de ces moments, les plumes s'ouvrent différemment. Je veux bloquer cet instant". Ces figurines feront l'objet d'une prochaine exposition.
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