Cet article date de plus de sept ans.

Des femmes, victimes d'attaques à l'acide, sur les podiums d'un défilé couture en Inde

Neuf femmes défigurées par de l'acide, presque toutes victimes de leurs maris ou d'un parent proche, ont défilé samedi soir dans des robes signées des créateurs indiens Rohit Bal, Ranna Gill et Archana Kochhar. Ce premier événement de haute couture, réservé aux survivantes de ce type d'agressions en Inde, a été organisé par Make Love Not Scars.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Défilé de femmes défigurées à l'acide en Inde, en novembre 2017
 (DOMINIQUE FAGET / AFP)

"J'étais très nerveuse", a déclaré Meena Khatoon après son défilé sur le podium. Originaire de New Delhi, cette mère qui a été attaquée par son ex-mari, a insisté sur le fait qu'elle avait quelque chose à prouver. "Les gens détournaient souvent le regard quand je sortais dans la rue. Ils changeaient de direction quand ils me voyaient. Je devais faire face à beaucoup de problèmes", a-t-elle reconnu. "Mais un jour je me suis dit, si c'est comme ça que tu vois les choses, ainsi soit-il. Je dois construire ma vie, je veux que mon fils fasse des études et je dois le soutenir". Meena Khatoon dirige sa petite entreprise de réparation de téléphones portables.

Défilé de 9 femmes défigurées à l'acide en Inde, en novembre 2017
 (DOMINIQUE FAGET / AFP)
Elle a été aidée par Make Love Not Scars, qui organisait le défilé samedi dans l'hôtel Lalit. L'ONG aide les survivantes à reconstruire leur vie et, dans de nombreux cas, leur visage.

Reshma Bano Qureshi à la Fashion week de New York en 2016

L'ONG a aidé Reshma Bano Qureshi, 20 ans, qui est apparue en 2016 à la Fashion week de New York et qui est en train d'écrire un livre. La jeune femme, agressée il y a trois ans par son beau-frère, qui pensait jeter de l'acide sur sa femme, craignait également de quitter sa maison pour affronter les regards. "J'avais peur que ça se reproduise. J'étais mal à l'aise avec la réaction des gens dans la rue". "Les gens diraient 'qu'est-ce qu'il t'est arrivé?', 'personne ne t'épousera' ou 'avec un visage déformé tu n'es pas belle' mais je suis fière de moi et j'ai confiance en ce que je suis. Je veux que les gens sachent que le visage n'est pas ce qui te rend beau, c'est ton coeur".

Des milliers d'attaques en Inde

Des centaines d'attaques à l'acide sont signalées chaque année en Inde mais Tania Singh, vice-présidente de Make Love Not Scars, croit qu'il s'agit plutôt de milliers d'attaques. Selon elle, les gouvernements locaux ne rapportent pas tous les cas. De plus, certaines femmes meurent avant qu'une enquête criminelle ne soit lancée et certaines choisissent de rester avec des familles violentes. "Nous avons eu un cas où une femme a été attaquée trois fois par son mari mais continue à vivre avec lui".

Défilé de femmes défigurées à l'acide en Inde, novembre 2017
 (DOMINIQUE FAGET / AFP)
Pour Tania Singh, le défilé était un très bon moyen pour que les survivantes reprennent confiance en elles. Au début, beaucoup de femmes refusent d'enlever leur voile quand elles vont à Make Love Not Scars. "Elles disent 'nous ne pouvons pas le faire, nous sommes vraiment laides' et nous leur disons que ce n'est pas vrai, vous n'êtes pas laides, c'est la société qui est laide." 

Le défilé de mode est "l'occasion de réaliser qu'elles méritent la reconnaissance, l'amour et leur place dans la société. Maintenant, elles peuvent retourner dans la rue et dire au monde qu'elles n'ont pas à cacher leur visage et leurs cicatrices. C'est au monde de changer sa façon de penser. "

Lancez la conversation

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.