Fashion Week de New York : Carlos Campos, la réussite de l'enfant du Honduras
"Je suis l'exemple parfait du rêve américain, quelqu'un venu ici, dans ce pays, sans penser pouvoir réussir tant de choses. Je suis un rêveur et je le serai toujours", a indiqué Carlos Campos à l'AFP le 6 février, juste avant son défilé. Son show reflétait son esthétique minimaliste, avec des mannequins de toutes les races, surtout des hommes mais aussi quelques femmes, portant capes, boléros, chemises bouffantes, inspirées des mariachis mexicains.
Carlos Campos n'était pas éligible pour le programme "Daca", qui depuis 2012 protége de l'expulsion 700.000 immigrés arrivés aux Etats-Unis enfants, et dont le président Trump a annoncé la fin au 5 mars, mais le créateur a obtenu malgré tout sa naturalisation. "Je compatis avec eux parce que j'ai été dans cette situation pendant des années, je sais ce que c'est que de ne pas pouvoir voyager (faute de papiers), d'avoir le désir de s'épanouir mais d'être limité non par manque de capacité, d'intelligence ou d'éducation mais uniquement parce que tu es marqué au fer rouge." "C'est très triste de les voir dans cette situation. Nous méritons tous une chance", a-t-il ajouté.
En quittant le Honduras, il avait pensé aller à Rio de Janeiro, tant il adorait le football brésilien. Puis quelqu'un lui a suggéré les Etats-Unis, où il a débarqué après neuf mois de périple via le Guatemala et le Mexique, alors que ses parents le croyaient mort. A son arrivée aux Etats-Unis, il est placé dans un foyer pour enfants. Mais il s'échappe et part pour Miami. "Tous les dreamers (rêveurs) sont à New York. Il faut que tu ailles à New York", lui dit alors une connaissance.
11 septembre 2001 : son 1er défilé annulé
Ce fils d'un tailleur et d'une couturière modestes termine ses études secondaires grâce à des cours du soir. A 15 ans, il travaille dans un atelier de tailleur à Brooklyn puis crée sa première entreprise à 19 ans. Trois ans plus tard, il sort diplômé du Fashion Institute of Technology et ouvre son atelier, qui emploie aujourd'hui sept personnes et a habillé des célébrités comme Ricky Martin, Ethan Hawke ou Justin Timberlake.Il a connu des hauts et des bas, comme lors des attentats du 11 septembre 2001, le jour où il devait présenter son premier défilé à la Fashion Week. "Ca a été horrible. Il a fallu tout annuler. C'était ma première collection et j'y avais mis toutes mes économies", se souvient-il, ajoutant que les entrepôts du sud de Manhattan où étaient prévus les défilés s'étaient transformés ce jour-là en morgues improvisées.
L'association "Une chemise pour le Honduras"
Quand Campos était petit, dans son village hondurien d'El Progreso, il n'avait pas d'argent pour acheter à manger à l'école. Mais sa mère lui fabriquait des chemises, toujours bien repassées, et lui disait : "Regarde comme tu es beau". "Cela m'a donné une certaine estime (...) Je me sentais spécial", dit-il en riant.C'est en pensant à sa mère, aujourd'hui décédée, qu'il a créé l'association "Une chemise pour le Honduras", qui a distribué cette année 3.300 chemises blanches dans les écoles du pays. "Ca a eu tant de succès que des gens me donnent du tissu, d'autres offrent de faire la couture, et ça va pouvoir continuer. C'est ça la beauté : chacun apporte son grain de sable, ils commencent à s'ajouter et on peut construire quelque chose", dit-il.
Il y a un peu plus d'un an, Carlos Campos ouvrait la première école de mode du Honduras, qui porte son nom. Elle compte déjà 97 diplômés. Malgré la pauvreté, la violence et la corruption, le créateur se dit aujourd'hui certain qu'"une industrie de la mode est possible au Honduras".
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