Fashion Week de New York : #MeToo et #TimesUp sur les podiums
Toutes ont été victimes de harcèlement ou d'agression sexuelle : huit jeunes femmes ont témoigné des abus subis, symbole d'une parole retrouvée et de l'impact du mouvement #MeToo aux Etats-Unis. Depuis le début de la Fashion Week certains défilés ont fait référence au #MeToo et #TimesUp, comme Tom Ford avec ses sacs marqués "Pussy Power", Myriam Chalek en avait fait la raison d'être de son défilé. La créatrice française s'est fait connaître en organisant des présentations avec des personnes souvent marginalisées : personnes de petite taille en 2017 à Dubaï ou mal-voyantes lors de la Paris Fashion Week 2016. "En tant que femme, vous avez une responsabilité de contribuer au changement", a-t-elle déclaré. "Si vous dites il est temps que ça change ou "Time's Up", vous vous devez de faire quelque chose", faisant référence à l'organisation créée par des centaines d'actrices pour financer la défense de victimes d'agressions sexuelles au travail. Les vêtements n'avaient guère d'importance même si les tenues combinaient "matières fortes" comme cuir et fourrure, et "matières délicates", comme soie et tulle, histoire de marquer tant "la féminité" que la "force" des femmes, selon Myriam Chalek. Le but était autre : faire témoigner des femmes. La condition pour le recrutement des mannequins du jour était qu'"elles aient été victimes de comportement sexuel inapproprié".
Après avoir marché, les huit mannequins ont pris le micro à tour de rôle, debout, chacune à côté d'un homme tout de noir vêtu, le visage sous un masque de cochon en référence à la campagne #balancetonporc. Elles ont raconté leur histoire. Leur voix tremblait parfois. Après ces récits suivis d'un lourd silence, la styliste a estimé que son objectif était atteint. "D'habitude, je n'aime pas le silence" mais là "il me plaît car j'ai l'impression que vous avez vraiment ressenti" quelque chose, a-t-elle déclaré. "Je ne dis pas que ce défilé va changer les choses du jour au lendemain mais j'ai l'espoir que vous allez quitter cette pièce et en parler, et que vous serez mieux informés". Avant le défilé, elle avait estimé que "si on arrive à faire sortir du silence (...) ne serait-ce qu'une seule femme, ce sera déjà une réussite".
Diane von Furstenberg pour "l'incarnation du pouvoir des femmes"
Mais la New York Fashion Week, c'est aussi des moments forts sur les podiums avec Alexander Wang, Victoria Beckham et Christian Siriano.
Alexander Wang, dernier show à la New York Fashion Week
Le créateur Alexander Wang a mis en scène une collection très noire aux allures martiales. Enfant chéri de la mode new-yorkaise, Alexander Wang a choisi de décaler son calendrier et défilera désormais en juin et décembre mais plus en septembre et février lors de la Fashion Week. Avant de quitter la semaine qu'il fréquente depuis plus de 11 ans, il a dévoilé une collection dont les personnages rappelaient plusieurs films d'anticipation et de science-fiction. Ces jeunes femmes en long manteau noir zébrés de fermetures éclairs conviaient tantôt Dark Vador, tantôt Neo ou Trinity de "Matrix", en particulier avec ces lunettes noires que beaucoup arboraient. La collection était axée sur l'univers professionnel tel que fantasmé par le créateur. Malgré son air austère et son goût pour le noir, sa businesswoman ne passerait sans doute pas inaperçue avec ses robes, ses jupes ou ses shorts courts, ses fermetures éclair et ses échancrures osées.
Victoria Beckham et Christian Siriano fêtent les 10 ans de leur marque
Victoria Beckham a présenté une collection toute en austérité androgyne lors d'un défilé qui se voulait discret avant son retour à Londres à l'automne 2018 pour fêter le 10e anniversaire de sa transformation en femme d'affaires. Les couleurs étaient sobres, beaucoup de vert kaki, de marron et de noir, la taille marquée d'une large ceinture, les épaules soulignées. Longs manteaux de laine, ample parka noire, ensembles veste-pantalon, un peu de motif léopard et des robes tombant en-dessous du genou. L'ensemble donnait une impression de femmes fortes et déterminées. "Je voulais que cette présentation soit une célébration discrète du chemin parcouru depuis nos premières présentations à New York" il y a 10 ans, a souligné Victoria Beckham, 43 ans. Alors que les rumeurs ont enflé sur une possible tournée des Spice Girls, l'ex-"Posh" a démenti au magazine Vogue qu'un tel projet soit dans les cartons. Elle avait elle-même alimenté ces rumeurs en mettant en ligne des photos des quatre "filles de l'espace" réunies à Londres le 2 février. Après ces retrouvailles, celles qui formèrent l'un des groupes féminins les plus suivis de l'histoire, avaient déclaré que le moment semblait "propice pour explorer ensemble de nouvelles opportunités". "Je ne vais pas faire de tournée, les filles ne vont pas faire de tournée", a assuré Victoria Beckham à Vogue. Créatrice de mode, a-t-elle insisté, "c'est ce que je fais maintenant".Le créateur américain Christian Siriano, chouchou d'Hollywood, a prouvé qu'il était le roi de la diversité, en faisant défiler des mannequins de toutes les tailles et toutes les couleurs. Pour ce défilé célébrant le 10e anniversaire de sa marque, il était entouré de célébrités qui ont fait sa réputation sur le tapis rouge : de Whoopi Goldberg à Meg Ryan en passant par la mannequin Coco Rocha ou l'actrice Molly Shannon. L'évènement a fait la part belle aux mannequins grandes tailles avec Ashley Graham et Precious Lee. A noter aussi la mannequin transgenre Avie Costa ou l'actrice Danielle Brooks de la série "Orange is the new black" et quelques hommes. Les tenues étaient un feu d'artifice de matières et de couleurs jouant avec la lumière, avec une longue série de robes de bal, noires couvertes d'étoiles scintillantes, bleu nuit imprimées de grandes fleurs, ou rouge vif accompagnées d'une longue traîne à volants. Dans une récente interview au site Fashionista, le créateur, revenant sur ses 10 ans de carrière qui l'ont vu notamment lancer des partenariats avec des chaînes bon marché comme Payless, soulignait "avoir toujours voulu habiller toutes sortes de femmes différentes" et vouloir être distribué par "toutes sortes de détaillants différents". Il s'est imposé en quelques années comme le créateur préféré d'actrices : pour la dernière cérémonie des Golden Globes début janvier, il avait habillé 10 femmes - tout en noir, en signe de solidarité avec le mouvement anti-harcèlement #MeToo.
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