Handicap, couleur de peau, mensurations... Dans la mode, la diversité fait de maigres progrès
La mode reflète-t-elle la société ? Censées représenter l'idéal féminin, les mannequins, souvent blanches, grandes et minces, sont jugées trop homogènes. Mais la situation commence à évoluer.
Jeudi 12 février, Winnie Harlow, 19 ans, s'avance sur la piste. Repérée en 2014 dans une émission de télévision américaine, "America's next top model", la Canadienne illumine le défilé de la marque espagnole Desigual dont elle est une égérie. Elle sourit, tourne sur elle-même et gratifie au passage une consœur qui la rejoint sur le podium d'un sincère "high five", sous les flashs crépitants des médias du monde entier. En chœur, ils s'extasient devant la première mannequin atteinte de vitiligo, une maladie de peau qui dessine de larges taches blanches sur sa peau noire. De l'audace, vous dites ?
A la Fashion Week de New York, une poignée de créateurs sont entrés pour de bon dans l'ère de la diversité. Une comédienne trisomique en petite robe noire pour Carrie Hammer ; des mannequins amputés, en fauteuil roulant ou sur des béquilles chez le collectif de designers italiens FTL Moda ; la ronde Denise Bidot sublimée dans les corsets structurés de la marque Chromat et des modèles de toutes tailles et de toutes couleurs dans la collection de Kanye West pour Adidas, etc. La différence est-elle à la mode ?
Pour en avoir le cœur net, francetv info revient, à l'occasion du lancement, mardi 3 mars, de la Fashion Week prêt-à-porter parisienne, sur ce débat qui agite la puissante industrie du look et de la beauté.
La diversité n'est pas anodine
"Le fait de choisir une mannequin plutôt qu'une autre, cela veut dire quelque chose", explique le créateur belge et consultant Benoît Béthume, interrogé par francetv info. "Quand on prend la décision d'engager un modèle petit, grand, gros, atypique, etc, cela fait autant partie du message de mode que le vêtement lui-même." Pour Christian Poulot, éditeur du site Le Modalogue et enseignant à l'Institut français de la mode ainsi qu'à l'école Mod'Art, "il y a chez les jeunes créateurs un désir de marquer leur différence, d'essayer d'apparaître sur le devant de la scène en faisant des choix qu'on peut qualifier de 'transgressifs', relève-t-il. C'est ce qu'a fait Jean Paul Gaultier dans les années 1980, quand il a choisi ses mannequins dans la rue. Il s'est alors positionné contre les modèles de l'époque." D'ailleurs, de Velvet d'Amour à Conchita Wurst en passant par Beth Ditto, Rossy de Palma ou Nabilla, le créateur français n'a jamais cessé de jouer avec la norme.
Outre l'intérêt évident de telles initiatives en termes de communication, le choix de modèles hors du commun sert à véhiculer une certaine idée de la mode (à la façon de Rick Owens), voire un message militant, version McQueen.
Quelqu'un comme Alexander McQueen, en plus d'avoir voulu attirer le focus sur lui en utilisant notamment des mannequins handicapées, voulait faire passer un message. Il était un créateur véritablement engagé qui disait par ce biais : 'Acceptons la différence'.
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