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La Fashion Week féminine de New York : le retour des vrais vêtements ?

Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Dans New York pétrifiée par un froid polaire, la Fashion Week à la recherche de nouveaux formats - certaines collections disponibles immédiatement à la vente après les shows- oscille entre tendances aux inspirations diverses et vrais vêtements qui traversent le temps pour lutter contre la fast fashion. Son souhait : coller aux nouveaux modes de vie. Réponse le 18 février à la fin de la NYFW.


Le roi du cool urbain Alexander Wang a investi une église pour présenter une collection rebelle et sexy affichant sa féminité avec bas noirs et colliers de cuir. Le noir domine, pour une robe nuisette de cuir bordée de dentelle ou une autre robe courte retenue par de simples liens aux épaules, la poitrine soulignée d'une bande de cuir clouté. Le blanc est également très présent. Dans les tailleurs très ajustés, le tissu côtoie le cuir et le métal, avec des anneaux, des brassards. Un grand pull rose porté sur une jupe de soie noire ultra-fine arbore le dessin d'une "pole dancer" en ombre chinoise. Les bas noirs sont marqués  "strict", "girls", ou "tender" en haut de la cuisse, tout comme un bonnet rose baby doll qui réchauffe une jupe de cuir noir et haut de dentelle transparent portés sous un manteau blanc imprimé de feuilles noires de marijuana. Comme Kanye West et Rihanna, Alexander Wang a mélangé  musique et mode, diffusant durant le défilé la nouvelle chanson "Temple" du  producteur de musique électronique Baauer, avec le chanteur sud-coréen G-Dragon  et la star britannique M.I.A.
 (Jewel Samad / AFP)
Toute la tribu Beckham était au défilé de Victoria Beckham : Harper, 4 ans, en petite robe noire et chaussures Gucci, assise sur les genoux de son père  David, ses trois frères, Cruz, 10 ans, Romeo, 13 ans et Brooklyn, 16 ans. Victoria Beckham a présenté une collection raffinée, très masculin-féminin: modèles confortablement vêtues de maxi manteaux à damiers jaune et vert ou exaltant  leur féminité dans de jolies robes bustier. Un corset blanc ourlé de blanc est  porté avec un vaste pantalon noir boutonné, les jupes s'évasent dans la  longueur, ici et là des rayures réchauffent la collection. "Pour moi c'est une collection très féminine, mais j'aime y ajouter des éléments masculins pour la rendre vraiment solide", a confié la styliste anglaise. "J'ai juste voulu regarder ce que j'avais porté et ce que j'aimais, et ai retravaillé ces pièces pour qu'elles apparaissent nouvelles et fraîches, et montrer comment mon style personnel a évolué", a-t-elle expliqué. Une collection masculin-féminin, pourquoi pas un jour une ligne purement masculine ? "J'aimerais vraiment faire du menswear à un certain point", dit-elle à  l'AFP. "Mais si je le demande à mon équipe maintenant... Nous avons beaucoup de choses en cours, dans de nombreuses catégories..." Elle n'exclut pas non plus un jour une ligne pour enfants.            
 (Jewel Samad / AFP)
Jason Wu a présenté une femme "immaculée", sexy et intemporelle. Coupe impeccable pour une petite robe marine à col rond, robe noire au décolleté plongeant, rehaussé d'un gros col de fourrure bleu, longue robe fourreau en maille, aux épaules dégagées et dos nu : sa femme est élégante et confortable, sexy et sophistiquée, cachant parfois une robe de fine dentelle noire sous un long manteau de cuir. "C'est l'idée de ces femmes habillées de façon immaculée (...), je voulais  traiter de la question de leur garde-robe. Ce qui est important pour moi, c'est de penser à ce qu'elles veulent (...). Ce n'est pas une tendance de saison en particulier, ce n'est pas la journée ou le soir", a expliqué à l'AFP le créateur canadien d'origine taïwanaise, installé à New York. La mode pour lui n'a pas forcément vocation à se démoder en quelques mois. Le luxe est le contraire de la rapidité. La femme Jason  Wu "veut des vêtements qui peuvent résister à l'épreuve du  temps, qui peuvent durer plus d'une saison". "Elle veut de la qualité, elle veut être sexy, féminine et sophistiquée", explique-t-il. Jason Wu présente aussi à la Fashion Week sa ligne pour la femme Hugo Boss.
               
 (Jewel Samad / AFP)
"Sept milliards d'autres. Citoyen du monde", annonçaient les notes de collection de la créatrice française Sophie Theallet . Elle a offert une collection riche en contrastes,  masculine en Prince de Galles, ultra féminine avec des mantilles, de la dentelle, de la fourrure, de grandes capes ou à l'inverse des jupes ultra courtes, des tissus dorés, de la laine, des velours dévorés... "C'est une collection qui célèbre le monde", a-t-elle expliqué à l'AFP. "C'est le respect de l'être humain. Et je veux que les gens rêvent à nouveau. Le métier de la mode devrait faire rêver!" insiste-t-elle. Ses modèles sont noires, blanches, asiatiques, parfois rondes. "C'est très important pour moi la diversité, car si on regarde cette planète, c'est des gens de toutes les couleurs, de toutes les races, et c'est ce que je veux montrer", dit-elle.
 (Fernando Leon / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)
Inspiré par les personnages du film du réalisateur américain Jim Jarmusch, Joseph Altuzarra a présenté une collection en forme de patchwork marquante visuellement. C'est "le monde riche et fait d'un patchwork" dans lequel évoluent les personnages principaux de "Only Lovers Left Alive", sorti en 2013, qui a été "le point de départ" de cette livraison du couturier français établi à New York. Le film tourne autour d'un couple de vampires qui se partage entre Tanger et Detroit. Porté par cette influence, le jeune trentenaire voulait se "laisser guider par (sa) curiosité" et "tisser une tapisserie de références et d'histoires dans cette collection", explique-t-il. Depuis ses premiers pas, en 2008, Joseph Altuzarra n'a jamais eu peur d'oser les couleurs et les mélanges, se revendiquant cosmopolite soumis à de multiples influences, il a néanmoins montré beaucoup plus d'audace que dans ses dernières productions, sur le plan des couleurs et des motifs principalement. Un même ensemble reprenait différents imprimés asymétriques mélangés entre un chemisier et une jupe, dans une profusion de motifs, souvent noirs et blancs. Des jupes, des robes ou des manteaux mélangeaient plusieurs couleurs, avec une dominante bordeaux assez marquée. Pour renforcer l'effet de contraste, Joseph Altuzarra a eu recours à de très nombreuses matières : plusieurs types de soie et de laine, organza, velours, nylon, viscose ou peau de mouton retournée. Chaque ensemble se voulait empreint d'une "énergie frénétique", selon les notes de collection. Le feu d'artifice s'est clos par un ensemble et deux robes en organza à paillettes métalliques brodées.
 (Jewel Samad / AFP)
Diane  von Furstenberg a abandonné son défilé traditionnel pour une brève fête dans ses studios, célébrant, Saint-Valentin oblige, le "pouvoir de l'amour". Les invités entraient par un labyrinthe plein de miroirs avec sur les murs quelques réflexions de la styliste : "Si tu doutes de ton pouvoir", "tu donnes le pouvoir au doute"…Des mannequins, dont Karlie Kloss en longue robe dorée, Gigi Hadid et Kendall Jenner, posaient et dansaient sur une petite scène. Diane von Furstenberg a dansé quelques minutes avec les modèles sur la chanson de 1979 "We are family". "Pour notre expérience automne 2016, nous amenons tout le monde chez nous, recapturant l'intimité. Nous offrons aussi, pour la première fois, quelques silhouettes immédiatement disponibles à l'achat", précisaient les notes de collection de DvF. Ravis d'être entrés dans l'antre de l'une des femmes les plus puissantes de la mode new-yorkaise, et d'approcher de célèbres mannequins, beaucoup d'invités n'avaient pas forcément comme priorité de regarder les détails de la collection : imprimés légers, longues silhouettes  fluides, tons de rouille, bottes de daim perforé couleur camel, et parfois de  petits bibis noirs pour finir la silhouette.
 (DIMITRIOS KAMBOURIS / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)
Ralph Lauren imagine une femme caméléon à l'aise dans tous les milieux. Il s'agissait de la première collection depuis le remaniement au sein de la maison, en novembre 2015. Ralph Lauren a laissé la direction générale à Stefan Larsson, ancien de la chaîne d'habillement Old Navy, mais demeure responsable de la création. Dévoilé lors d'une présentation :les mannequins sont réunis dans un même lieu et ne bougent pas. Au féminin, Ralph Lauren propose un style "cool et sophistiqué", selon ses propres mots, qui met en valeur la femme tout en la laissant respirer. Le gris, le noir, le caramel dominent dans ces vêtements qui célèbrent "une vie qui passe de la ville à la campagne, du matin au soir", explique la maison. Plusieurs mannequins réunis dans une ambiance d'appartement cossu du quartier chic de l'Upper East Side faisaient penser à l'Ouest américain avec leurs vestes en daim, leurs ponchos, leurs franges et leurs bottes de cowboy. "C'est une allure assurée, au-delà des tendances", résume Ralph Lauren.  Ici, les couleurs unies, le ton sur ton contrebalancent la décontraction et confèrent à l'ensemble sobriété et élégance. 
 (BRIAN ACH / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)
Depuis près de 20 ans, Yukari Suda est tellement inspirée par le Pas-de-Calais, qu'elle a donné à sa maison de couture le nom du département français. L'union improbable entre cette designer qui ne parle que le japonais et ce coin de France remonte à 1998. Séduite par la dentelle de Calais, mais aussi par les paysages et la lumière de la région, la créatrice japonaise dessine une première collection Pas de Calais (sans trait d'union pour sa marque). En 2013, une boutique a ouvert à New York, puis une autre à Paris, en 2015. La collection arbore des couleurs douces, beaucoup de beige, de marron, de gris. "Il y a toujours une relation" avec le Pas-de-Calais, explique à l'AFP Yukari Suda. "Mes vêtements ne sont pas faits de couleurs vives", dit-elle, mais plutôt dans tes tons "similaires à ceux de la mer dans le Pas-de-Calais". Lors d'une visite dans la région, en 2014, elle s'est rendue chez deux dentelliers calaisiens, Cosetex et Noyon. Elle n'a pas utilisé de dentelle de Calais dans cette collection "mais s'il y a une possibilité (à l'avenir), j'aimerais beaucoup". Face à la "fast fashion", le sujet très discuté à la Fashion Week, elle offre une mode pérenne. "Je fais des vêtements pour que même si une femme a acheté des pièces il y a vingt ans, elle puisse les porter avec celles d'aujourd'hui", explique-t-elle. L'élégance dans le vêtement quotidien, le chic tout-terrain qui est aujourd'hui adopté par beaucoup de créateurs, Yukari Suda en a fait son identité. "Je veux faire de vrais vêtements", dit-elle. "Il n'y a aucun intérêt à faire des vêtements si vous ne pouvez pas les porter." Un revers, un dégradé, une échancrure, la styliste a placé ici ou là un détail qui donne de l'allure à ses robes, ses pantalons ou ses vestes, sans ostentation. La collection est placée sous le signe de la "détérioration"  de l'usure du temps.
 (Jacopo Raule / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)
La marque de doudounes Moncler n'a pas froid aux yeux: elle l'a prouvé en présentant son défilé en plein air par des températures -24°C en ressenti. La présentation de ses collections est toujours un spectacle, et celle sur la place du Lincoln Center n'a pas dérogé à la règle, devant une petite foule de spectateurs transis: une centaine de figurants, en tenue de ski bleu roi, casque assorti, masque de ski, chaussettes et chaussures noires, ont défilé au pas militaire, se croisant en différentes figures, et faisant quelques facéties. Les mannequins, hommes et femmes, sont arrivés ensuite, certains avec des skis, d'autres un surf, d'autres encore avec un paquetage sur le dos, prenant la pose alors que de l'opéra emplissait l'espace. Les  tenues élégantes de ski, souvent coordonnées, les doudounes confortables, les grosses bottes à poils longs et toques assorties, jaunes, violettes ou bleues,  le rouge et noir d'un manteau de laine court sur mini-jupe assortie, étaient  plus que nécessaires pour résister au grand froid. Après la présentation de la marque de luxe italienne d'origine française, les spectateurs ont pris la pose avec les modèles toujours immobiles.    
 (JP Yim / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)
Felipe Oliveira Baptista a présenté pour Lacoste une collection clin d'oeil au film "Belle de jour", avec force vinyl, mais toujours élégante et confortable. Un manteau cape rose fushia en vinyl est porté avec des bottes au genou.  Une longue robe tricotée moutarde aux manches zippées s'accompagne de bottes rouges en vinyl. Un modèle homme porte lui aussi un manteau bleu à capuche en vinyl sur un jogging. Et des broderies de skieurs, qui semblent droit sortis de jeux vidéo des années 80, égayent des robes poncho et de confortables sweat-shirts. "C'est un peu l'idée du ski, des années 60, quand Lacoste avait habillé  l'équipe de France, c'est le rétro-futurisme un peu James Bond (...) il y a  aussi une touche d'humour, je voulais quelque chose de très gai, léger", a expliqué Felipe Oliveira Baptista. "Il y a aussi un clin d'oeil (au film) Belle de jour. Mais c'est aussi vraiment l'idée d'une garde-robe pour  tous les jours de la semaine, basée sur les racines de la marque, le sport, le  confort, les vêtements adaptables".
 (Slaven Vlasic / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

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