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La Fashion Week féminine de New York, toujours décomplexée et militante

Alors que de grands noms américains boudent la semaine de la mode new-yorkaise, d'autres marques de prêt-à-porter, parfois étrangères, se servent du podium comme manifeste.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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LaQuan Smith ah 2019-20, à New York, février 2019
 (Angela Weiss / AFP)

Chromat se mobilise pour le climat

La marque de maillots de bain Chromat s'est, depuis sa création en 2010, souvent fait remarquer pour ses prises de position innovantes sur l'inclusion et la diversité, l'une des premières à faire défiler des mannequins transgenres ou aux formes rondes. Cette saison la fondatrice et designer Becca McCharen-Tran a fait passer un autre type de message en faveur de l'environnement avec une collection intitulée "Climatique". Le message était déroulé par petites touches : les premiers mannequins portaient par exemple - en plus de leurs maillots ou combinaisons aux couleurs roses, jaunes ou bleues, toujours gaies - une longue feuille de palmier ou d'autres incarnations de végétation tropicale. Au fur et à mesure du défilé, les allusions au plastique - qui pollue les océans et les plages de Miami, où Becca McCharen-Tran a indiqué avant le show passer de plus en plus de temps - se sont multipliées : mannequins aux tresses maintenues aux extrémités par des goulots de bouteille en plastique, fleurs de plastique ou grosse bonbonne d'eau tenue en main. 
Chromat ah 2019-20 à New York, février 2019 
 (Angela Weiss / AFP)
"Miami est aux avant-postes du changement climatique, avec la montée des eaux et des inondations croissantes", soulignait Becca McCharen-Tran dans la note présentant la collection, citée par le site spécialisé Fashionista. "Plus je vis à Miami, plus je m'intéresse au changement climatique et au réchauffement et combien nous (dans le monde de la mode, ndlr) contribuons à la dévastation de l'environnement", a-t-elle ajouté. Si Chromat utilisait déjà pour ses maillots du Lycra fait de filets de pêche usagés ou avait présenté en 2018 à Miami des maillots comestibles (faits d'algues), la styliste ne parlait pas de ce problème jusqu'ici car "je croyais que le client s'en fichait," a-t-elle poursuivi. "Mais maintenant je vois combien c'est important et je veux que la durabilité occupe une part plus importante de notre message".  
Chromat automne-hiver 2019-20 à New York, février 2019 
 (John Lamparski / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Rag & Bone préfère le dîner au défilé

La marque de prêt-à-porter Rag & Bone, qui a rompu avec la tradition des défilés depuis deux ans, a choisi un dîner avec des personnalités portant ses vêtements, pour s'affranchir des codes de la Fashion Week. Depuis plusieurs saisons, Rag & Bone a non seulement renoncé au défilé mais au principe même d'une présentation formelle de ses collections. La maison s'est appuyée sur la photo et la vidéo pour mettre en scène des "amis de la marque" ou "collaborateurs", souvent des célébrités, vêtus des pièces de la nouvelle collection. Rag & Bone, marque à l'identité urbaine, a réuni une cinquantaine de ces "amis" dans le quartier hipster de Williamsburg, à Brooklyn, pour un dîner. Tous, y compris les acteurs Keri Russell ("The Americans"), Matthew Rhys (également "The Americans") ou Liev Schreiber ("Ray Donovan") portaient la collection automne-hiver 2019. "Vous n'apprenez pas beaucoup en faisant un défilé", a expliqué, à l'AFP, Marcus Wainwright, co-fondateur de la marque et toujours à la tête de la création. "Vous ne savez rien de la façon dont cela va se traduire dans la vraie vie. (...) Cela n'élargit pas votre horizon." "Pour un créateur ou une équipe de designers, c'est un gros test de voir arriver quelqu'un qui n'est pas mannequin, qui n'est pas payé pour porter des vêtements" ... "Vous devez les faire se sentir au top", dit-il, "se sentir eux-mêmes mais aussi les pousser un peu pour aller dans le sens de ce que vous voulez exprimer pour la saison."

Le dîner n'était pas ouvert au public, pas retransmis en direct, mais fera l'objet de photos et d'une vidéo réalisée par un logiciel d'intelligence artificielle. Marcus Wainwright dit voir cette vidéo sans intervention humaine comme une prise de risque, notion déjà présente dans l'idée d'un événement que s'approprient les convives. La soirée a été marquée par plusieurs performances et la musique du producteur Nigel Godrich, qui collabore avec le groupe Radiohead. Avec ce format considère Marcus Wainwright. "Vous voyez quand quelqu'un est heureux (de porter les vêtements de le marque) et quand il ne l'est pas. Et c'est ça qui va faire que les gens vont acheter ou pas (...) Vous n'avez pas ça quand vous faites un défilé."

LaQuan Smith sexy loin des codes aseptisés

Saison après saison, le créateur noir de New York montre qu'il évolue dans sa propre dimension, loin des codes d'une Fashion Week institutionnelle, parfois aseptisée. Ses défilés sont bruyants, festifs, et sa mode l'est tout autant, accrocheuse, hypersexuée, avec des mannequins atypiques, qui ont des formes généreuses mais ne sont pas rondes. Mini-jupes, combinaison léopard transparente, dos nus qui descendent plus bas que de raison, à l'ère du sportswear et du streetwear dominants, LaQuan Smith veut être "le designer chez qui vous allez quand vous voulez retrouver votre côté sexy", a-t-il expliqué après le défilé. Et l'ère du #MeToo n'y change rien, sa femme assume totalement cette hyperséduction. "Je veux remettre au goût du jour les grandes heures de Thierry Mugler ou Gianni Versace", références de cette mode ouvertement sexy.
LaQuan Smith ah 2019-20, à New York, février 2019
 (Angela Weiss / AFP)

Le français Longchamp toujours classique

Parmi les marques étrangères, Longchamp a montré sa collection automne-hiver 2019 dans le quartier de Wall Street, après un premier défilé à New York en septembre 2018. La maison familiale française synonyme de cuir, de voyage et de courses hippiques a depuis l'an dernier mis la priorité sur le développement de son chiffre d'affaires aux Etats-Unis et ouvert de nouvelles boutiques à New York et sur la côte ouest, "donc c'est très important pour nous d'être ici", a expliqué à l'AFP Olivier Cassegrain, vice-président en charge de la distribution.

Longchamp automne-hiver 2019-20, à New York, février 2019
 (WWD/REX/Shutterstock/SIPA)

Le départ de la Fashion Week new-yorkaise de grands noms comme Raf Simons, Monse, Rodarte ou Rihanna offre des opportunités à d'autres, dit-il. "Ca nous permet d'avoir (pour le défilé) les bonnes personnes, les bons journalistes. A Paris, tous les créneaux horaires sont pris, c'est très concurrentiel, donc c'est très difficile d'avoir ça". La styliste de cette maison familiale, Sophie Delafontaine, est restée dans la lignée classique d'une élégance longiligne, avec en vedette les mannequins Kendall Jenner, ambassadrice de la marque, et la jeune Kaia Gerber, 17 ans. Pas de "gender-bending" ni de tailles rondes chez Longchamp mais quelques tendances : le cuir noir clouté était omniprésent, de même que les jupes plissées, en tulle et en bouclettes de laine, des robes et chemisiers de soie, et beaucoup de contrastes noir/blanc, comme les lettres du nouveau logo de la marque "LGP", éclatées sur des blousons. Une élégance classique soulignée aussi par une référence aux grandes heures du Concorde : la moquette sur laquelle défilaient les mannequins était inspirée par celle conçue par Andrée Putman pour l'avion supersonique.

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