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La Mairie de Paris dit stop à la Grossophobie à la veille de la Fashion Week

La ville de Paris met à l'honneur les femmes plantureuses le temps de l'exposition "Grossophobie, Stop ! Ensemble Réagissons". Son but : "interpeller" contre les discriminations au moment de la semaine du prêt-à-porter féminin automne-hiver 2019-20 qui se tient du 25 février au 5 mars dans la capitale.
Article rédigé par franceinfo - Corinne Jeammet (avec AFP)
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Expo photos contre la "grossophobie", à Paris , février 2019
 (Emilio Poblete )
Campagne d'information aux Parisien.nes et défilé de mode pour personnes grosses : la Ville de Paris s'attaque à la grossophobie. En décembre 2017, l'événement "Grossophobie, stop ! Ensemble réagissons" dénoncait ce phénomène discriminatoire lié à l'apparence physique. Ainsi lors d'un défilé des modèles non-professionnelles portaient des vêtements de créatrices de différents pays qui avaient imaginé une garde-robe grande taille afin de célébrer la diversité des corps, la beauté de toutes les femmes. Une façon glamour de questionner des normes esthétiques survalorisant la minceur qui constituent une forme de violence à l’égard de celles et ceux qui ne s’y conforment pas.

Une exposition photos en guise de témoignages

Aujourd'hui, une exposition photos de ces femmes rondes fait revivre l'événement. Jusqu'au 9 mars, via 29 panneaux affichés en plein air sur les façades de la Caserne Napoléon des modèles témoignent de ce que ce défilé leur a apporté : chaque photo est accompagnée d'un message du mannequin qui évoque l'influence positive de ce défilé.
Expo photos contre la "grossophobie", à Paris, en février 2019
 (Emilio Poblete )

Discrimination

"Tout le monde a le droit à la mode", lance Gerrie, professeure d'espagnol et mannequin ronde qui dévoile ses mensurations sur sa carte de visite. Sa photo est affichée sur une façade de la mairie de Paris. "J'en suis sortie renforcée dans ma lutte contre les discriminations", peut-on lire à côté de la photo de Gerrie Palacios Bideau, en robe et escarpins noirs sur le podium. "Je suis grosse, je suis grande, je suis noire (...) J'ai assez souvent senti la discrimination dans ma vie", raconte à l'AFP cette femme de 36 ans, dégoûtée des "conseils" donnés par certains médecins et des gens de son entourage. "Tu devrais faire du sport : j'ai 15 ans de sport de combat derrière moi, je suis judoka ceinture marron... Tu devrais manger moins : c'est souvent quand je mange moins que je stocke le plus...". "Nous ne sommes pas là pour faire l'apologie de notre pathologie mais même en étant obèse, on a besoin de sortir de chez soi, de s'habiller, de s'insérer socialement", poursuit-elle.

 
L'exposition est organisée par Hélène Bidard, maire-adjointe chargée de l'égalité femmes/hommes et de la lutte contre les discriminations avec pour directeur artistique Vincent Mc Doom, star de la téléréalité et mannequin noir transgenre.
 
"Ma grand-mère, mes soeurs étaient toutes rondes et se plaignaient tout le temps qu'elles ne pouvaient pas s'habiller, faire ci, faire ça, parce que le regard public les dérangeait, elles se renfermaient sur elles-mêmes et à ce moment-là elles prenaient du poids", raconte à l'AFP Vincent Mc Doom. Mince, il a choisi la grossophobie comme thème de la lutte contre les discriminations, jugeant que les transgenres et les homosexuels étaient déjà bien représentés. 

Karl Lagerfeld, comme d'autres stylistes, n'aimait pas les rondes

Sur les podiums, on voit toutes les couleurs de peau, l'âge cesse d'être un tabou mais il est encore rare de voir des mannequins rondes, encore moins à Paris qu'à New York ou à Londres.  

Connu pour son franc-parler, Karl Lagerfeld, la superstar planétaire de la mode, décédé le 19 février, a résumé tout haut ce que d'autres stylistes des grandes maisons laissent entendre quand on les interroge sur le choix des modèles : "Personne n'a envie de voir des femmes rondes sur les podiums". "Ce sont les grosses bonnes femmes assises avec leur paquet de chips devant la télévision qui disent que les mannequins minces sont hideux", ajoutait-il dans une interview au magazine allemand Focus en 2009, propos qui avaient suscité une plainte d'une association de défense des personnes rondes.
 
Les choses changent grâce à nombreuses "influenceuses" rondes populaires sur les réseaux sociaux, estime Vincent Mc Doom. "Maintenant c'est la mode qui est en retard". 

Le mot grossophobie validé par les dictionnaires

Pour Hélène Bidard à l'origine d'une initiative pour faire valider le mot "grossophobie" par les dictionnaires Larousse et Robert (ce qu'elle a obtenu), le milieu de la mode "est en train de bouger, il y a un effet #Metoo dans tous les domaines". "Mais c'est trop lent et on part de très loin, c'est encore très dur d'avoir une diversité", déclare-t-elle. Accusée par des détracteurs de promouvoir l'obésité, elle répond : "nous faisons exactement le contraire. Lutter contre l'obésité ce n'est pas lutter contre les obèses, personne ne choisit de l'être, il faut accompagner ces personnes-là".
Affiches de la campagne contre la grossophobie
 (Mairie de Paris)

 


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