Louis Vuitton-Marc Jacobs, 2 regards sur la mode aux Arts Décoratifs
Plutôt analyse que rétrospective, c'est un parallèle sur les deux périodes charnières que sont l’industrialisation de la fin du XIXe siècle et la globalisation du début du XXIe siècle. Y sont évoqués les métiers d’art, les avancées techniques, les créations stylistiques et les collaborations artistiques.
L’exposition consacre un étage à chaque créateur dans une scénographie de Samantha Gainsbury et Joseph Benet. Les malles de Louis Vuitton sont présentées en regard des collections et accessoires de mode du XIXe siècle du musée, au premier étage, tandis qu’une sélection des modèles les plus emblématiques créés par Marc Jacobs, depuis ces 15 dernières années, est mise en scène au second.
Des origines... Louis Vuitton (1821-1892)
Il apprend les rouages du métier de « layetier-coffretrier-emballeur » chez « Maréchal » à Paris. Durant 17 ans, il peaufine ce savoir-faire et en maîtrise tous les aspects. En 1854, il ouvre son enseigne et se positionne différemment de ses confrères en se redéfinissant « Emballeur ». Ce choix s’avère à la fois original par rapport à ses pairs et astucieux pour l’avenir. Les premières malles sont recouvertes d’une toile cirée grise permettant de les imperméabiliser. Les armoiries et les monogrammes des propriétaires sont, ensuite, apposés. Louis Vuitton brevète des toiles tissées à motifs, lesquelles permettent de le différencier des autres enseignes, et le protègent de la contrefaçon. En 1877, il dépose une toile rayée disponible en plusieurs coloris. 11 ans plus tard, c'est la « toile Damier » qui intègre son nom dans le motif décoratif. Son fils Georges Vuitton créera en 1896 le monogramme « LV ».
Avec l'arrivée de la haute couture, la garde-robe se multiplie... il faut des malles pour voyager
L’histoire industrielle de la 2e moitié du XIXe siècle est jalonnée par les Expositions universelles. Louis Vuitton y présente ses modèles dès 1867 dans une nouvelle section « Article de voyage et de campement » et remporte sa première médaille. Il aménage en 1872 ses nouveaux locaux au 1 rue Scribe à l’épicentre du Paris métamorphosé par le baron Haussmann. Avec sa première enseigne, rue Neuve-des-Capucines, il s’était lié d’amitié avec Charles- Fréderick Worth. En fondateur de la haute couture, ce dernier impose des nouveaux usages vestimentaires, démultipliant le nombre de pièces dans la garde-robe bourgeoise... Louis Vuitton, en tant que spécialiste d’emballages de mode, est aux premières loges pour répondre à la demande. Il restera toujours fidèle à 3 concepts : perfectionnement et maîtrise de son savoir-faire, entière satisfaction donnée à la clientèle, perpétuelle recherche de nouveautés.
Marc Jacobs contribue aux chamboulements du système de la mode
Tournée vers l’international depuis les années 80, l’industrie de la mode devient, dans la décennie suivante, un secteur mondialisé, obligeant la génération montante des designers à s'adapter. Le talent créatif ne suffit plus. Les créateurs doivent être plus performants, à la fois dans le marketing, la direction artistique mais aussi agir comme porte-parole de la marque.
Diplômé en 1984 de la Parson’s School of Design à New York, Marc Jacobs est nommé créateur de la maison américaine Perry Ellis en 1988. Il a à peine 25 ans. Tandis que chaque créateur américain rêve d’avoir sa propre griffe, il se place dans une logique de succession à la française, en dessinant sous le nom d’un autre. Il impose sa vision et se libère de l’héritage stylistique de la marque. En 1992, la collection « Grunge » plébiscitée par la presse est incomprise par les acheteurs, il doit se retirer. A la recherche d'associés, ce sont les propriétaires de Perry Ellis qui l’aideront pourtant à créer sa griffe. En 1997, il est nommé directeur artistique de Louis Vuitton. Marc Jacobs doit introduire, pour la première fois dans l’histoire de cette maison des collections de prêt-à-porter homme et femme ainsi qu’une ligne d’accessoires, chaussures et sacs.
Il instaure un processus de création collective
Il envisage un nouvel univers : « Un nom merveilleux. Une griffe célèbre, unique, qui existera après moi. Vuitton n’est pas une maison de mode. On fait des choses « à la mode », on a introduit l’idée de la mode, qui évolue avec les humeurs du temps, les icônes de la culture populaire. Mais le coeur de la marque est inchangé et inchangeable. » Marc Jacobs, c'est aussi un processus de création collective : «C’est ensemble que nous faisons des propositions pour les collections de prêt-à-porter, d’accessoires ... Nous présentons nos idées dans le format du défilé de mode, vêtements et accessoires compris. Nous donnons aussi notre avis sur la manière dont les choses sont présentées à tous les niveaux, jusqu’à la publicité. Mais il ne s’agit que d’un avis, car ... nous n’avons pas la possibilité de contrôler jusqu’au bout le merchandising, la publicité et l’image ».
Marc Jacobs fait aussi appel à des collaborateurs artistiques, tel Stephen Sprouse, Takashi Murakami ou Richard Prince. Ces associations entre l’art et la mode ont bouleversé les habitudes de tout un secteur pour devenir depuis des cas d’école.
Musée des Arts décoratifs. 107, rue de Rivoli. 75001 Paris. Tél. : 01.44.55.57.50.
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