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Lucie Bourreau Dutta et Bapan Dutta, lauréats mode des Grands Prix de la Création : "On va enfin faire connaître Mii à un plus large public !"

Rencontre avec Lucie Bourreau Dutta et Bapan Dutta, duo de créateurs de mode qui a su marier ses doubles origines et inspirations, françaises et indiennes dans la marque Mii. Ils nous expliquent comment le Grand Prix de la Création peut les aider dans leurs perspectives de développement.   

Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Lucie Bourreau Dutta et Bapan Dutta, les créateurs de la marque Mii (Sarah Balhade)

Dans le cadre du soutien de la Ville de Paris aux métiers de création, les Grands Prix de la Création de la Ville de Paris récompensent des professionnels dans les secteurs des métiers d’art, de la mode et du design. Pour Sakina M’Sa, qui a présidé le jury mode en décembre 2020, "Le choix a été difficile du fait de la très grande qualité des candidatures qui mariaient créativité et responsabilité". Pour la créatrice, ce "Grand Prix fait la part belle au produit et au savoir-faire".

Sauvegarder l'artisanat indien

Lucie et Bapan se sont rencontrés à l’École des Arts Décoratifs de Paris en design textile et sont tombés amoureux. En 2009, Bapan fait découvrir l’Inde, son pays natal, à Lucie. Durant ce voyage, ils rencontrent des artisans et constatent que la plupart ne trouvent plus de débouchés à leurs savoir-faire notamment à cause de l’explosion de la fast fashion qui privilégie la machine au travail de la main. Ils décident de participer à la sauvegarde de ces métiers et créent leur marque Mii et leur atelier en Inde. Les débuts ne sont pas simples : il faut s’adapter à des façons de fonctionner très différentes de la France en prenant en compte des facteurs locaux, culturels, économiques, climatiques... 

"Nous avons beaucoup appris auprès des artisans, tout comme ils ont appris de nous. Nos collections sont, en effet, conçues à la manière de vases communicants. Nous pouvons découvrir une technique que nous avons envie d’utiliser pour créer un vêtement ou bien utiliser les savoir-faire pour traduire une inspiration liée à l’art, à la littérature... ", détaille Lucie. "Pour notre prochaine collection et pour la première fois, nous avons collaboré avec des entreprises françaises. Nous faisons ainsi dialoguer les deux cultures qui sont au coeur de notre binôme" .

Création Mii été 2021, jupe coloriage  (Benjamin Deroche)

Franceinfo Culture : En quoi l’obtention de ce Grand Prix de la Création de la Ville de Paris va-t-il permettre de nouveaux développements à votre marque ?

Lucie Bourreau Dutta et Bapan Dutta : Ce prix nous permet de faire connaître Mii à un plus large public. Pendant des années nous nous sommes complètement concentrés sur la création et notre outil de production. C'était pour nous le plus important et ce qui permettait à Mii d'avoir des pieds solides ! Aujourd'hui, nous avons besoin de passer à une deuxième étape : la communication. Nous n'avons jamais expliqué et montré tout le travail que nous avons réalisé, notre engagement pour conserver les savoir-faire textiles de la région de Bapan en Inde tels que le tissage, la broderie. Tout ce travail a beaucoup de valeur et donne le sens à tout ce qu'on fait. La dotation des Grands Prix de la Création va participer au développement de contenus vidéo sur notre travail. D'autres part, nous voulions aller au bout de notre histoire de couple franco-indien. Cela fait plusieurs années que nous voulions avoir une ligne fabriquée en France. Ce type de lancement représente toujours beaucoup d'investissements. Le prix est intervenu alors que nous étions déjà en plein lancement mais il va évidemment soutenir cette démarche (ndlr, une dotation de 18 000 euros est attribuée au lauréat).

Comment la crise sanitaire de 2020 a-t-elle eu des répercussions sur votre travail ?
Elle en a eu beaucoup. Nous nous sommes développés exclusivement sur un réseau international de points de vente haut de gamme et la crise a débuté alors que nous étions en pleine période de livraison. Depuis toujours nous produisons ce que l'on nous commande, nous ne faisons aucun stock. Pour la première fois, nous nous sommes retrouvés avec du stock car les annulations de commandes sur des articles déjà produits ont été nombreuses. A cela s'ajoutait la gestion de la crise en Inde dans notre atelier et l'impossibilité d'y voyager. Il a fallu s'organiser.

Notre chance est que nous avons une équipe solide et qu'aujourd'hui nous pouvons communiquer avec tout le monde digitalement. Même avec nos tisseurs dans les villages nous sommes en permanence connectés. La crise a encore plus soudé l'équipe car tout le monde a senti qu'on pouvait compter les uns sur les autres. On a finalement pu développer nos collections exactement comme d'habitude même à distance ! Et au déconfinement, nous avons eu tellement de demandes de réassort que le stock s'est très vite beaucoup réduit. La crise nous a poussé aussi à accélérer notre développement digital. Fin juillet notre site était lancé ! De manière plus personnelle, nous venions de devenir parents. Nous avons pu profiter de notre bébé complètement, tout en gérant Mii depuis notre salon ! On en est sortis très fatigués mais grandis !

Détail du travail de broderie coloriage réalisé à la main sur une création Mii pour la collection été 2021 (Sharanya Mukherji)

Comment envisagez-vous l'année 2021, des changements ?
Nous avons depuis toujours suivi nos convictions : on fait les choses parce qu'elles nous semblent justes ou bonnes. La crise n'a pas entraîné une remise en cause majeure de notre manière de faire. Elle a confirmé d'une certaine manière les choix que nous avions pris. Nous poursuivrons notre travail brique par brique avec sincérité, persévérance et créativité.

Création Mii collection été 2021 (Benjamin Deroche)

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