"Une humanité extraordinaire" : après la mort de Karl Lagerfeld, le monde de la couture salue un de ses maîtres
Castelbajac, Fournié, Toledano... : le monde de la couture rend un hommage unanime au directeur artistique de la maison Chanel, décédé mardi.
Le monde de la couture pleure son "Kaiser" après la mort, mardi 19 février, de Karl Lagerfeld. "C'est une immense tristesse. On tourne une page de grand couturier", réagit ainsi sur franceinfo Julien Fournié, créateur, grand couturier, après l'annonce de la mort du couturier. Directeur artistique de la maison de haute couture Chanel depuis 1983, il faisait partie d'une génération qui "avait des rêves, des images dans la tête, les dessinaient pour pouvoir en faire des réalités et les offrir aux femmes. J'espère que cela va perdurer avec ma génération", explique Julien Fournié qui salue la carrière de Karl Lagerfeld, également photographe et réalisateur.
"Il a été contemporain toute sa vie"
"Karl était vraiment pour moi la définition même d'un créateur contemporain, explique de son côté Jean-Charles de Castelbajac, directeur artistique chez Benetton. Il a été contemporain toute sa vie. Il avait cette notion, plus que de la mode, du style, qui fait qu'il est en quelque sorte immortel."
"Il a construit un fil comme l’avaient construit Courrèges ou Saint-Laurent. Il avait en lui cette faculté à conserver les racines de l’Histoire tout en étant totalement immergé dans le futur. Cette curiosité extraordinaire, cette fulgurance de curiosité", indique Jean-Charles de Castelbajac, qui a tenté de définir le style de Karl Lagerfeld : "Il y a dans l’essence même de Karl cette force d’un implacable style qui plongeait ses racines dans les bases mêmes de ce qu’est un vêtement."
Je crois que chez Karl l’ornemental n’a jamais succombé à la fonction. Et la fonction n’a jamais succombé à l’ornemental : tout était lié.
Jean-Charles de Castelbajacà franceinfo
Jean-Charles de Castelbajac célèbre le Karl Lagerfeld altruiste, loin de l'étiquette hautaine qu'on pouvait parfois lui coller, sa manière de "célébrer les ateliers, les petites mains, ceux qui font, qui aident les créateurs, et qui constituent le fil de maisons". Le directeur artistique de Benetton n'a pas hésité à parler d'une "humanité extraordinaire" : "Vous pouvez interroger mille jeunes artistes qui ont été soutenus par Karl. Quand je l’ai rencontré j’avais une mode très pop, très colorée, aux antipodes de l’essence même du style de Karl. Et il a toujours été là, bienveillant, solidaire, intéressé, curieux, et ça c’est ce que je retiendrai : cette grande qualité de cœur de gentleman, avec beaucoup de panache, de Karl".
Mais Karl Lagerfeld était aussi un "communiquant hors pair", a rappelé le directeur artistique : "Karl avait construit sa vie comme une formidable mise en scène, scénographie, un film épique dont il était le premier héros ou le personnage."
"Immortel", "il était le plus inventif"
"Je suis dévasté", confie de son coté Ralph Toledano, président de la Fédération de la haute couture et de la mode et ancien directeur général de la maison Lagerfeld, à l'annonce de la mort du couturier. "Karl devrait être immortel. Il fait partie de ces gens dont on a besoin, il est irremplaçable. Il est unique. C'est quelqu'un qui a plané pendant 60 ans au sommet de la mode. C'était un homme d'une intelligence absolument fabuleuse, d'une culture incroyable", a-t-il ajouté évoquant le couturier supposément né en 1933 car il s'est toujours refusé à donner sa date de naissance précise. Dans le monde de la mode, "il était le plus créatif, personne n'est arrivé à sa cheville."
Karl Lagerfeld c'était toujours plus. Au fond de lui-même il repoussait les limites de la mort avec une intensité toujours redoublée et il réussissait. C'est un exemple pour tout être humain de volonté et de ténacité.
Ralph Toledanoà franceinfo
Ralph Toledano se souvient des dix années qu'il a passé aux côtés de Karl Lagerfeld : "C'était une merveilleuse famille et un père de famille incroyable. Je ne sais pas si j'ai perdu comme un deuxième père, un grand-frère ou un ami." Surnommé le "Kaiser" en référence à ses origines allemandes, il n'avait rien à voir avec son surnom. "Quand la standardiste partait, c'est lui qui répondait. Il était d'une simplicité totale."
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