Nouvelle vitrine asiatique de la mode, Séoul surfe sur la culture pop sud-coréenne
L'Asie, avec ses taux de croissance enviés par nombre de gouvernements occidentaux, est un marché clé pour l'industrie du luxe. Les Chinois assurent un tiers des dépenses de luxe dans le monde, selon le cabinet d'études Bain & Company. Or ces consommateurs chinois recherchent de plus en plus leur inspiration en Corée du Sud, un pays devenu un "pionnier pour les tendances de la mode et du luxe", estime Bain.
Les grandes maisons ont ainsi mis les bouchées doubles en Corée du Sud pour toucher ces Asiatiques aisés qui regardent du côté de la télévision et des pop stars sud-coréennes pour puiser leur inspiration vestimentaire.
Chanel a présenté en mai sa collection Croisière 2016 à Séoul, le premier défilé de la maison française en Corée du Sud. En juin, Christian Dior a ouvert un magasin de six étages, le plus grand d'Asie, à Gangnam, ce quartier de Séoul immortalisé par un tube du chanteur Psy. Le numéro un mondial du luxe, LVMH a investi dans l'industrie florissante de la K-pop (pop coréenne) de Séoul. L Capital Asia, un fonds d'investissement lié à LVMH, a acheté en 2014 pour 71 millions d'euros d'actions YG Entertainment, label K-pop de premier plan. Il est devenu le deuxième actionnaire d'YG, dont le portefeuille comprend des stars comme Psy, G-Dragon et le boys band BingBang.
"Les grandes entreprises du luxe ont commencé à se rendre compte que ce qui est populaire en Corée du Sud devient rapidement populaire à travers toute l'Asie", juge Lie Sang-Bong, président du Conseil des créateurs de Corée du Sud. Alors qu'elles choisissaient jadis Hong Kong ou Singapour comme siège de leurs opérations asiatiques, elles ont commencé voici trois ans à se tourner vers Séoul", poursuit-il. Bientôt la Chine lancera elle-même les modes mais, pour l'instant, les "Chinois regardent vers Séoul pour voir d'où viendra la prochaine grande tendance", explique-t-il.
La critique de mode Suzy Menkes a choisi Séoul pour accueillir en 2016 la seconde édition de la conférence internationale du luxe du groupe de presse Condé Nast, qui compte Vogue parmi ses titres. "Je crois que les (grandes marques) voient ce pays, et cette ville en particulier, comme un centre névralgique, là où vont les gens pour acheter des choses", avait estimé la journaliste en visitant la capitale sud-coréenne en juillet 2015.
Surfer sur la vague sud-coréenne
Pour les marques, le premier intérêt de la Hallyu (vague coréenne) d'émissions télévisées et de musique pop, c'est de pouvoir toucher grâce à elle toute l'Asie. L'influence du phénomène Hallyu est illustrée, par exemple, par le rappeur G-Dragon, icône du style imité par des millions de fans à travers l'Asie et au-delà. Les articles qu'il porte, vestes Saint Laurent et baskets Louboutin, acquièrent une notoriété immédiate et sont l'objet de débats sur les sites consacrés aux styles vestimentaires des artistes de la K-pop. En outre, il est un habitué des défilés, pas seulement en Asie mais aussi à Paris et à Londres.
Des chaussures Jimmy Choo à 560 euros portées par Jun Ji-Hyun, l'héroïne de la série populaire "Mon amour d'une autre planète" - en particulier en Chine - sont parties comme des petits pains dans toute l'Asie tandis qu'un rouge à lèvres Saint Laurent que l'actrice a porté connaissait un sort similaire en Chine. Les séries sont un outil de vente efficace pour l'industrie cosmétique, soulignait en mai le cabinet d'études Euromonitor. Les produits de beauté utilisés par leurs stars ont un énorme succès en Asie, et en Chine. Une éponge imbibée de fond de teint liquide élaborée par Amorepacific, géant sud-coréen de la cosmétique, a connu un tel succès en Asie que Dior s'est associé avec lui pour utiliser sa technologie.
Pour Kate Ahn, qui travaille à Séoul pour le cabinet britannique d'études Stylus, la Corée du Sud est devenue un tremplin pour des entreprises du luxe désireuses de tâter le pouls du consommateur asiatique: "C'est un petit pays mais c'est un point de départ parfait pour entrer sur le marché chinois et au-delà", dit-elle. Les entreprises européennes et américaines souhaitant investir dans la cosmétique sud-coréenne sont de plus en plus nombreuses, souligne-t-elle. "Elles veulent même investir dans de petites entreprises peu connues, en sachant que de nombreuses Asiatiques, en particulier les Chinoises, regardent vers Séoul ".
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