"On n'est plus dans le premier degré de la séduction, on n'est plus là pour attirer le regard des hommes" : la lingerie française, accessoire de confiance en soi
Hier, on portait sa lingerie pour plaire. Aujourd’hui le message est davantage hédoniste : on l’achète pour soi, pour se faire plaisir !
Dix femmes, minces ou rondes (du 34 au 44), du bonnet A au E, de 20 à 60 ans, méditent, font de la musculation, roulent en moto, dansent ou se réveillent dans un lit d'hôtel... telle est la "photographie de l'époque" dévoilée dans une vidéo réalisée par l'association Promincor-Lingerie française pour promouvoir le savoir-faire hexagonal de la corseterie. En enfilant leurs dessous ultra-confortables ou en mettant en scène un "surtif" comme une pièce mode, les femmes se libèrent des carcans et jouent avec la lingerie pour se plaire à elles-mêmes.
Cette année pas de salons de la lingerie ni d'événement, épidémie de la Covid-19 oblige, la vidéo-show "Rendez-Vous", qui valorise l'expertise de la lingerie française, a été présentée sur internet. Ce court-métrage de 8 minutes - célébrant la diversité des femmes, l'inclusivité, la beauté naturelle et le lâcher prise - sera suivi d'une campagne de 12 mini films sur l'année 2021 dans le monde entier.
"On n'est plus dans le premier degré de la séduction"
La lingerie est un accessoire de confiance en soi par excellence. Aujourd’hui, les femmes sont indépendantes et achètent leur lingerie pour se plaire. "On a voulu mieux montrer la modernité de nos marques (...), les produits, les femmes qui sont à l'aise dedans... Les hommes n'avaient pas en ce moment leur place", commente Alain de Rodellec, président de Promincor-Lingerie française. Cette association rassemble dix marques (Antigel, Aubade, Chantelle, Empreinte, Lise Charmel, Lou, Louisa Bracq, Maison Lejaby, Passionata et Simone Pérèle) dont les ateliers de conception sont tous situés en France.
"On n'est plus dans le premier degré de la séduction, on n'est plus là pour attirer le regard des hommes. Les femmes jouent autrement aujourd'hui", abonde Pascale Renaud, directrice artistique du film.
Les produits sont "faits pour qu'on les oublie une fois qu'on les porte"
La tendance était déjà là mais la pandémie n'a fait que la renforcer. Les derniers produits de la marque Empreinte, spécialisée en poitrines généreuses, sont "faits pour qu'on les oublie une fois qu'on les porte", explique Noémie Berthaux, directrice d'atelier de la maison.
Un soutien-gorge "sport chic" est en dentelle noire de Calais sans aucune couture devant et à dos "cheminée" qui permet de bien répartir le poids et rester droite. Un autre aux armatures flottantes et bretelles qu'on peut croiser sur le dos, beige ou gris foncé avec des parties brillantes pour un côté glamour, a été conçu à l'intention des clientes qui font de la boxe ou de l'équitation pour amortir le rebond. "Elles se plaignaient de ne trouver que des brassières qui écrasent, gênent et ne maintiennent pas. Cela nous a pris plusieurs années pour y arriver", souligne Noémie Berthaux.
La pratique du yoga étant l'une des activités les plus populaires pendant la crise sanitaire, le combo soutien-gorge souple/legging a connu un grand succès, souligne Brigitte Chauchon, directrice commerciale internationale de la maison Lejaby. Si le "no bra" ne convient pas à tous les seins, le confinement a accentué la demande du "slow bra", un soutien-gorge léger et confortable.
"Les photos de femmes-objets aux poitrines exhibées et fesses très marquées ne passent plus"
Les campagnes publicitaires ont également évolué : encore balbutiant il y a deux ans, le "bodypositivisme" incarné par des femmes imparfaites en postures naturelles est dans toutes les vitrines des boutiques de lingerie. Après #Metoo, "les photos de femmes-objets aux poitrines exhibées et fesses très marquées ne passent plus", souligne Brigitte Chauchon, directrice commerciale internationale de la maison Lejaby.
Loin des push-up, en perte de vitesse, les formes et les tissus sont au service du rendu naturel : triangles et brassières qui aplatissent presque la poitrine, matières transparentes, coton bio... "Il y a une forte demande d'inclusivité, on essaie de ne plus retransmettre ce modèle de la femme aux mensurations idéales", souligne Brigitte Chauchon. Les offres montent en taille pour réduire le décalage : les triangles en version armaturée s'adaptent aux femmes avec des fortes poitrines, tel ce modèle couleur chair léger en matière "dévorée" créant un délicat motif floral ton sur ton chez Lejaby.
Les femmes "osent, s'affranchissent des codes et vivent pleinement leur lingerie"
Jadis perçu comme fonctionnel parce qu'invisible et anti-glamour, le nude (couleur chair) "est devenu beaucoup plus mode, on s'amuse à travailler la transparence, des petits dessins, on n'est plus seulement sur la maille opaque", soutient Stéphanie Pérèle, directrice de marque de la maison familiale Simone Pérèle. Le modèle Orphée de la dernière collection "mixe le côté vintage et très moderne par le jeu des armatures cachées qui permettent le maintien sans la lourdeur visuelle", explique-t-elle dans les atelier de la marque à Clichy près de Paris.
Symbole d'une nouvelle séduction, un body noir est brodé de "beauty comes from the inside (la beauté vient de l'intérieur)". Ce dessous peut se porter dessus, avec un costume trois pièces, des soutiens-gorges se superposent sur des chemises et T-shirts...La corseterie sort à la surface pour que les femmes "osent, s'affranchissent des codes et vivent pleinement leur lingerie", conclut Stéphanie Pérèle.
Quelques chiffres
Avec 2,38 milliards d’euros, le marché français de la lingerie a fléchi de -1,7% en 2019. En 2019, les Françaises (femmes de 15 ans et plus) ont consacré un budget moyen annuel de 82 € pour leurs articles de lingerie de jour, de nuit et articles chaussants, et deux tiers des achats ont été effectués par des consommatrices de 45 ans et plus. Comme pour l’habillement, les Françaises achètent moins, et se sont habituées à payer leurs sous-vêtements peu cher : près de la moitié des ventes se fait sur des articles soldés. Au cours des 9 premiers mois de l’année 2020, les exportations françaises des articles de corseterie ont été fortement impactées par la pandémie de la Covid-19 et la dégradation de la situation économique mondiale (Sources : Douanes françaises, Kantar x Promincor - Lingerie Française).
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