Ugly Models, agence des mannequins peu ordinaires, où l'imperfection est beauté
Parmi les mannequins qui défileront sur les podiums de la London Fashion Week, qui s'ouvre du 16 au 20 février 2018, une poignée viendront de chez Ugly. Les semaines de la mode, avec leurs jeunes modèles filiformes ou androgynes, ce n'est pas cependant la spécialité de la maison. "Ugly Models agency", qui se traduit par "L'agence des mannequins moches", fait dans l'original.
"C'est une agence pour les mannequins qui ont du caractère", résume son patron, Marc French. "Il y a des gros, des minces, des grands, des petits. C'est une célébration de la diversité", souligne ce quinquagénaire, qui cite volontiers Gérard Depardieu comme parangon. "Ce n'est pas le plus bel homme qui vient forcément à l'esprit mais, quand vous le regardez, (...) il est tellement différent, tellement cool qu'il en devient sexy".
"L'imperfection est beauté, la folie est génie"
Fondée il y a un demi-siècle, chez Ugly on trouve un portrait de David Bowie ou cette citation, qui sonne comme une devise : "L'imperfection est beauté, la folie est génie". Comme n'importe quelle agence, Ugly gère la carrière de mannequins et les met en contact avec des clients en tous genres : Burberry, Mercedes ou Jack Daniel's.Quand l'agence organise un casting pour compléter son catalogue, les postulants sont loin des standards du secteur. Il y a les costauds comme Chris, un ancien militaire aux bras épais, posant torse nu en compagnie d'une brune en maillot deux pièces. Elle a 50 ans, n'en paraît que la moitié, et rêve de relancer sa carrière de mannequin. Ou Kris Chesney, un ex-rugbyman de 1,98m et 135 kg, passé par Toulon et Saracens. Bras tatoués, crâne rasé, fier de sa gueule accidentée, d'un corps marqué par des années d'empoignades sur les terrains de l'ovalie. Ce qu'il cherche ? "Une nouvelle aventure, un nouveau défi".
Il y a ceux qui ont une cause à défendre. Sheerah Ravindren, 22 ans, qui vient du Sri Lanka se présente comme une "mannequin militante immigrée". Ce petit bout de femme de 1,61 m, en jeans baggy, top noir et piercing à la narine droite, a un discours engagé : "Je suis une femme de couleur", dit-elle. "En grandissant, je n'ai jamais vu quelqu'un qui me ressemblait dans les médias ou dans la mode". Il y a Frances, une autre jeune femme en perfecto, frange rétro, avec une paire de béquilles futuristes. Elle est handicapée mais clame-t-elle fièrement : "ça ne m'a jamais empêchée de faire ce que je voulais".
Bien dans sa peau
"Un bon mannequin Ugly, c'est quelqu'un qui est bien dans sa peau", rebondit Marc French. "On ne veut pas que les gens changent. C'est vraiment important quand on pense à la pression qu'il y a sur les jeunes", soumis entre autres au diktat de la minceur.L'agence se défend de faire dans le bizarroïde ou d'utiliser les particularités de ses mannequins. Au contraire. "Parfois, on nous appelle pour demander des personnes de petites tailles qui se tapent dessus...", soupire Lulu Palmer chargée des nouvelles têtes. "On n'est pas là pour exploiter les gens". Toujours à l'affût de nouveaux talents, le personnel reconnaît que le nom de l'agence ("Ugly", moche) peut susciter des réactions circonspectes. "J'ai rencontré tellement de gens qui me disent : tu ne vas quand même pas me demander d'être un mannequin ?", raconte Marc. Mais quand ils réalisent la véritable nature de l'agence, ses opportunités, "c'est là qu'ils veulent en faire partie !".
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