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Un défilé Azzedine Alaïa, une parenthèse hors du temps

Mon premier défilé Alaïa, en mars 2012, s'est révélé un instant rare. Le second le fut tout autant avec, certes, l'effet de la découverte en moins mais la perspective de savourer un moment précieux. En marge de la semaine de la mode parisienne présentant l'automne-hiver 2014-15, Azzedine Alaïa offre un show maîtrisé loin de l'agitation frénétique de la fashion week. Une bulle de bonheur !
Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Défilé Azzedine Alaia automne-hiver 2014-2015 dans son showroom parisien.
 (Ilvio Gallo)

La semaine de la mode parisienne -présentant l'automne-hiver 2014-15 s'est achevée le 5 mars 2014 après 9 jours de défilés. Je pensais, enfin, souffler mais le 6 mars au soir un mail émanant du service de presse d'Alaïa m'a fait replonger dans la fashion week. J'étais conviée -tout comme les acheteurs et fidèles clients- à choisir un rendez-vous entre le 8 et 11 mars pour me rendre au showroom.

Défilé Azzedine Alaia automne-hiver 2014-2015 dans son showroom parisien.
 (Ilvio Gallo)
Un couturier en dehors de la planète mode
 
Adulé dans le monde entier depuis les années 1980, le couturier tunisien ne s'impose plus le rituel du calendrier des défilés. C'est dans le cadre de son atelier parisien dans une grande pièce blanche avec une verrière qu'il présente sa dernière collection. Il est loin du rythme de la mode où les collections se succèdent toujours plus vite. "C'est la course, c'est un acharnement"… "Il faut se calmer ! Pour la création, ce rythme n'est pas bon" indiquait-il en septembre 2013.
Défilé Azzedine Alaia automne-hiver 2014-2015 dans son showroom parisien.
 (Ilvio Gallo)
Il est l'un des couturiers les plus adulés mais Azzedine Alaïa reste en dehors de la frénétique planète mode. Ce sculpteur du corps féminin -il a fait des études de sculpture- ne court pas après la nouveauté, il préfère "les vêtements qui durent". "Je fais tous les patrons, je couds parfois", expliquait-il en septembre 2013. Plus que dessiner, il aime créer les robes à même le corps des femmes. Les silhouettes Alaïa semblent d'ailleurs hors temps.
 
L'œil est attentif à la coupe
 
Ici, l'œil est attentif, plus qu'ailleurs, le maître ne souhaite pas que l'on prenne de photos. Alors, en attendant le show, j'ai un avant-goût de la collection avec quelques silhouettes présentées sur des Stockman et d'autres vêtements sur des portants. A côté sont déposés la maroquinerie et les chaussures. Je regarde les modèles de prés et tâte les étoffes. Tout semble d’une sobriété extrême mais c’est la coupe qui fait tout pour sublimer le corps de la femme.
Défilé Azzedine Alaia automne-hiver 2014-2015 dans son showroom parisien.
 (Ilvio Gallo)
Puis, c'est le top départ du show. Les mannequins défilent sans accessoires… l’essentiel, c’est le vêtement. Les robes près du corps sont en maille, les jupes courtes ont des allures de patineuse, les manteaux sont corsetés par des ceintures. Le tout est décliné dans de belles matières : de la maille travaillée dans le volume, des lainages et du cuir… dans une palette de noir, marine, ivoire, vert sapin…. Des robes adoptent des petits motifs géométriques sur la jupe tandis que le haut reste uni… Au nombre de mes coups de cœur : un incroyable ensemble constitué d'une veste ajustée et d'une jupe courte, réalisé dans du cuir travaillé en bandes noires et bleues. Le cuir lisse côtoie le cuir de poulain et le cuir vernis…. Le tout sans démarcation apparente.
Défilé Azzedine Alaia automne-hiver 2014-2015 dans son showroom parisien.
 (Ilvio Gallo)
2013, année Azzedine Alaîa
 
Le Palais Galliera, musée de la mode de la ville de Paris, a attiré 123.000 visiteurs avec l'exposition consacrée au couturier, qui avait démarré fin septembre 2013 et s'est terminée fin janvier 2014. Il s'agit d'un record pour une exposition dans le Palais Galliera, qui a rouvert en septembre après 4 ans de fermeture. Des travaux qui lui ont permis de retrouver son allure d'origine de palais de la fin du XIXe siècle.
 
"C'est mieux qu'on m'expose de mon vivant; je m'en balancerai quand je serai mort. Et là, au moins, je vais pouvoir lire ce qu'écrivent les journalistes sur moi!", plaisantait le créateur lors de l'inauguration de cette rétrospective.
Adulé dans le monde entier depuis les années 1980, le couturier qui dessine peu, préférant draper et couper lui-même tard dans la nuit, est un "homme libre" qui n'a besoin, ni des grands magazines de mode, ni du calendrier des défilés pour exister. "Il n'a pas de parutions dans le (très influent) Vogue américain et ça ne le gêne pas. Il n'a aucune contrainte. Le vrai luxe, il est là", commente son ami Didier Krzentowski, galeriste parisien.
 (Corinne Jeammet)
L'exposition a mis en avant 70 silhouettes de ce couturier souvent qualifié de "sculpteur" du corps féminin dans la mode. Parmi les créations présentées : la robe à cagoule de la chanteuse Grace Jones et d'autres robes devenues "iconiques" portées par l'égérie d'Alaïa, Naomi Campbell, Linda Evangelista ou Tina Turner.
"J'aime les femmes", lâche-t-il pour expliquer son succès. Lui qui a fait des études de sculpture, parle de leur "derrière" comme personne. "Je ne pense pas toujours à faire des nouveautés, à être créatif, mais à faire un vêtement pour que les femmes soient belles", explique le couturier, qui s'est allié avec le groupe suisse Richemont, numéro deux mondial du luxe. 
 (Corinne Jeammet)
Outre cette exposition et la préparation des collections, une boutique a ouvert rue de Marignan à Paris en octobre 2013. Le couturier a également réalisé les costumes masculins du ballet "Les Noces de Figaro" à Los Angeles ainsi que ceux d'un ballet d'Angelin Preljocaj "Les Nuits".

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