1944, le swing débarque en 78 tours avec l'armée américaine
Le 15 décembre 1944, six mois après le débarquement des alliés en Normandie, un petit avion disparaissait au dessus de la Manche, probablement touché accidentellement par une bombe alliée (les aviateurs de retour d'Allemagne se débarrassaient là des bombes inutilisées). A son bord le musicien dont l'un des morceaux "In the Mood" était devenu l'hymne implicite de la Libération. Glenn Miller avait 40 ans. Il en aurait aujourd'hui 110 et sa musique est encore dans toutes les têtes. "In the mood" a eu sa version chantée. Ce sont les Andrew Sisters (Patty, Laverne et Maxene) qui l'interprétèrent et en firent à l'été 1944, avec "Boogie Woogie Bugle Boy (of Company B)" la bande sonore de l'espoir retrouvé.
Reportage :AC Lamblard / J. Van Hovee / D. Gavat
Ces disques 78 tours, fragiles et lourds, avaient été distribués gratuitement aux soldats de l'armée américaine qui devaient participer à la libération de l'Europe. On les appelait les V-Disc, V pour Victory. L'objectif de ces enregistrements : entretenir le moral des troupes. Les chansons racontaient souvent des histoires de soldats évoquant leurs compagnes les attendant, espérent-ils, à l'ombre d'un arbre ("Don't sit under the apple tree") ou encore de musicien conscrit réveillant sa compagnie au son de son instrument ("Cétait un trompettiste célèbre dans les rues de Chicago-Il avait un style boogie que personne d'autre ne pouvait jouer- Ce gars était au sommet de son art- Mais son numéro est sorti et il est parti sans attendre-Il est maintenant dans l'armée- il sonne le réveil - C'est le clairon boogie woogie de la compagnie B") . L'esprit de la liberté
La consigne officielle était que ces disques ne devaient pas être diffusés au delà des limites militaires. Peine perdue. L'Europe ayant été coupée de toute musique "dégénérée" par l'occupant nazi, la découverte du jazz et du swing provoqua une véritable passion qui ne devait plus s'arrêter. Elle débouchera quelques années plus tard sur le rock et toutes les musiques dérivées du jazz. Les chansons devinrent "l'air du temps", elles balayèrent auprès des jeunes générations les chanteurs de charme en vogue avant-guerre et pendant l'occupation. Quand une musique symbolise à ce point l'esprit de la liberté rien ne peut l'arrêter. Patty Andrews, la plus blonde et la dernière des Andrews Sisters ne verra pas le soixante-dixième anniversaire du débarquement, elle s'est éteinte l'an dernier à l'âge de 95 ans. A noter pourtant que cette musique, dérivée du jazz, fait la part belle aux musiciens blancs bien qu'elle soit d'origine noire.
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