Avec la présidentielle américaine, les fans poussent les artistes à s'engager

Chappell Roan, Taylor Swift, Ariana Grande ou Doja Cat : à un mois des élections aux États-Unis, certains artistes se retrouvent, sous la pression des réseaux sociaux, obligés de dévoiler leur candidat préféré.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
La chanteuse Chappell Roan en concert à Manchester, au Royaume-Uni, le 14 septembre 2024. (ANDY VON PIP / ZUMA PRESS WIRE / SHU / SIPA)

Un artiste est-il libre de se tenir à distance de la présidentielle aux États-Unis ? La pression subie par la star de la pop Chappell Roan pour soutenir Kamala Harris met en lumière l'influence de plus en plus importante, et parfois envahissante, des fans sur leurs idoles.

La chanteuse américaine de 26 ans s'est retrouvée sous le feu des critiques sur les réseaux sociaux pour avoir rechigné à appeler à voter pour Kamala Harris, une position qu'elle a justifiée en critiquant l'administration Biden sur les questions de la défense des personnes LGBT+ et du soutien au peuple palestinien.

Chappell Roan contrainte de dévoiler son choix

De nombreux fans l'ont accusée de faire le jeu de Donald Trump, dont la gauche voit le retour à la Maison-Blanche comme un cauchemar pour les droits individuels. Chappell Roan a eu beau expliquer que sa critique des dirigeants en place ne signifiait pas qu'elle voterait pour le milliardaire républicain, cela n'a pas suffi. Elle s'est sentie obligée de préciser qu'elle voterait bien pour Kamala Harris.

Visiblement éprouvée par la polémique, l'interprète de Pink Pony Club, a annulé deux concerts le week-end dernier pour protéger sa santé, se disant dépassée par les événements. Le phénomène n'est pas nouveau. De nombreux artistes, comme Taylor Swift, Ariana Grande ou Doja Cat ont déjà évoqué, y compris dans leurs chansons, la sensation de voir leurs fans vouloir prendre une forme de contrôle sur leur vie et leurs choix.

Les fans ont une "illusion d'intimité"

Cette forme de relation crée chez les fans une "illusion d'intimité" et le sentiment que quelque chose leur est dû, explique Petra Gronholm, professeure spécialisée dans la santé mentale mondiale à l'École d'hygiène et de médecine tropicale de Londres. "Il y a une idée de validation. Vous voulez que les artistes défendent publiquement ce que vous pensez qu'ils défendent ou ce que vous voulez qu'ils défendent, pour vous voir en eux en quelque sorte", explique-t-elle.

Les réseaux sociaux mis en cause

Les réseaux sociaux ont exacerbé cette exigence pour les musiciens, et notamment ceux qui ont éclos plus récemment, de faire connaître leur position. "La célébrité peut sembler plus fragile" que dans le passé, explique David Jackson, professeur de politique à la Bowling Green University.

"Il y a probablement un plus grand besoin chez les célébrités, dans un environnement hautement médiatisé, de prendre le pouls de ce que pensent leurs fans", selon lui. Et l'univers des réseaux sociaux laisse peu de place à la nuance. "Les choses y sont plus binaires que dans la vraie vie", ajoute David Jackson.

L'effet Taylor Swift : 400 000 clics en 24 heures

Selon les experts interrogés par l'AFP, les fans n'attendent pas forcément que le soutien d'un candidat par leur star ait un impact politique, mais plutôt d'être rassurés sur le fait que leurs goûts musicaux correspondent à leur vision du monde. David Jackson fait un parallèle avec d'autres choix de consommation, comme les vêtements ou la nourriture, qui peuvent avoir une signification politique.

"Ce n'est pas totalement absurde que les fans veuillent au moins connaître la position des célébrités auxquelles ils donnent de l'argent", explique le professeur. L'impact d'un appel à voter par une célébrité reste en tout cas difficile à évaluer. Dans le cas de Kamala Harris, le soutien semble "viser la mobilisation plus que la persuasion", selon David Jackson. Lorsque Taylor Swift a soutenu Kamala Harris, elle a également publié un lien vers un site pour s'inscrire sur les listes électorales : résultat, 400 000 clics en 24 heures. "Au même titre que la religion et la politique, la musique peut générer de la dévotion. Et motiver les gens à agir", ajoute Mark Clague, musicologue à l'université du Michigan.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.