Centenaire d'Yves Montand : du "Far West" à "La bicyclette", retour sur ses dix chansons cultes
Né il y a cent ans, le 13 octobre 1921, et disparu il y a trente ans, le 9 novembre 1991, Yves Montand est à l'honneur en cet automne. L'occasion de revenir sur la carrière du chanteur avec 10 morceaux cultes.
Rarement un artiste a mené de front des carrières d’acteur et chanteur avec la même excellence. Avant de devenir le César de Rosalie, ou le Vincent de François, Paul et les autres, Yves Montand a d’abord été un formidable chanteur, un interprète au charisme indéniable resté dans toutes les mémoires. Retour sur 10 chansons qui ont marqué sa carrière et le patrimoine français.
1"Dans les plaines du Far West" (1945)
Après avoir démarré à l'Alcazar à Marseille, sa ville d'enfance, le jeune Ivo Livi devenu Yves Montand arrive à Paris en 1944. Son premier vrai succès est cette chanson dédiée aux cow-boys qu’il vénère dans les films américains. Un Far West d’opérette bien loin du réalisme de John Ford ou Sergio Leone, mais qui au sortir de la guerre trouve immédiatement son public. Le rêve américain chanté par le frenchy gouailleur, dans la lignée de Charles Trenet et Maurice Chevalier.
2"Les feuilles mortes" (1946)
L’année suivante, Montand joue dans Les portes de la nuit de Marcel Carné. La chanson-phare du film est un poème de Prévert mis en musique par Joseph Kosma, et chantée par Irène Joachim. Mais il y a cette scène où la mélodie est jouée par un vagabond à l’harmonica puis fredonnée par Yves Montand.
La reprenant à son répertoire, le chanteur va l'interpréter pendant des années devant des salles froides. Puis, autour de 1949, c’est l’envol : Les Feuilles mortes deviennent le prototype d’une nouvelle chanson française. Reprise d’innombrables fois dans différents styles musicaux, devenu un standard du jazz, adaptée en anglais avec le titre Autumn Leaves et interprété par les plus grands artistes, c’est sans doute une des chansons les plus connues du répertoire français.
Il y a tout juste 40 ans, en octobre 1981, Yves Montand faisait un retour triomphal sur la scène de l’Olympia, et son interprétation des Feuilles mortes reste une des plus belles de sa carrière.
3"À Paris" (1948)
De tous temps, la chanson française a naturellement loué sa capitale. Le répertoire de Montand n’y fait pas exception, et le chanteur enregistre même un disque entièrement consacré à Paris en 1953, Yves Montand chante Paris. Mais dès 1948, il inclut dans son tour de chant À Paris de Francis Lemarque. Le morceau devient un grand standard de la chanson française, du répertoire de Montand et des chansons sur Paris. Elle figure entre autres dans le film Paris chante toujours.
4"Quand un soldat" (1952)
En 1952, c’est à nouveau une chanson de Francis Lemarque qui va apporter une notoriété certaine à Montand, mais cette fois sur fond de polémique. On est en pleine guerre d’Indochine et les paroles antimilitaristes ne passent pas auprès de tout le monde.
Le batteur Roger Paraboschi de l’orchestre d’Yves Montand à cette époque se souvient précisément d’un incident survenu à Lyon : "Après le spectacle, les musiciens sont partis discrètement par derrière. Montand m’a demandé de sortir avec lui par la grande porte. Devant le théâtre attendaient des groupes de paras avec leurs bérets rouges. Il n’y avait que deux ou trois flics. Montand est sorti comme un seigneur, il a traversé la foule menaçante. Personne n’a osé broncher".
La violence des réactions s’intensifie au fil des tours de chants. Montand est même menacé de mort. Pour stopper l’hémorragie, la radio d’Etat interdit la diffusion du morceau. Deux ans plus tard, Boris Vian connaîtra le même sort avec Le déserteur.
5"Planter Café" (1956)
Outre ses prises de positions antimilitaristes, Yves Montand affiche également des convictions politiques de gauche et plusieurs des textes qu’il interprète sont solidaires de la condition ouvrière. Cela lui vaudra dans certains milieux le surnom de "prolo chantant". Il dépasse même les frontières hexagonales et s’exprime sur les travailleurs de tous continents, notamment ceux des colonies dans les plantations de café avec ces paroles d’Eddy Marnay sur une musique d’Emil Stern.
6"Le chat de la voisine" (1958)
Dans la même veine contestataire, ce Chat de la voisine est un pamphlet manifeste sur la bourgeoisie qui entretient ses animaux dans le luxe pendant que les classes populaires triment au labeur, ou que la jeunesse est sacrifiée. Mimiques à l’appui, Montand y déploie tous ses talents de comédien pour se moquer avec virulence et sarcasme d’une certaine vision de la société.
7"La chansonnette" (1961)
Un morceau plus léger, devenu un incontournable du répertoire de Montand. La chansonnette évoque une France délicieusement rétro et rappelle que l’artiste a toujours été ancré dans le music-hall. En ce début des années soixante, alors que pointe l’explosion des yéyé, Montand réaffirme son attachement à la chanson traditionnelle avec l’album Rengaine ta rengaine qui renferme plusieurs titres sur ce thème : La chanson de Bilbao, Trois petites notes de musique, le morceau-titre, et cette chansonnette qui "à Presley fait du tort" et peut apparaître aujourd’hui démodée, mais garde tout son charme suranné.
8"Angelina" (1962)
Le chanteur se souvient qu’il a été Ivo Livi en sortant le disque Yves Montand canta in italiano ("Yves Montand chante en italien") en 1962. Il y reprend des airs traditionnels de son pays d’origine, dont le célèbre chant antifasciste Bella Ciao, mais aussi cette très belle romance Angelina. Le révolutionnaire savait aussi jouer les crooners et parler aux oreilles des dames.
9"Syracuse / Durango" (1964)
Et question charmeur, Montand n’était jamais le dernier pour user de sa voix de velours. En 1964 il reprend Syracuse de Bernard Dimey et Henri Salvador. Mais, encore plus que l’Italien, il se risque à l’anglais. D’abord en 1960 en jouant dans Le Milliardaire, et en chantant Let’s make love avec Marilyn... au figuré comme au propre. Puis, lors de sa dernière tournée en 1982, il adapte Syracuse en anglais, qui devient Durango. Le chanteur se fait encore plus crooner que jamais. En 1983 sort même un disque Montand in english qui regroupe plus d’une douzaine de ses chansons anglicisées.
10"La bicyclette" (1968)
Pour écrire et composer une chanson comme La bicyclette, il fallait un bon tandem. Le duo Pierre Barouh et Francis Lai a su conjuguer des paroles nostalgiques avec une musique à la fois douce et entraînante. La version originale À bicyclette portait le même titre qu'une chanson de Bourvil, elle fut par conséquent enregistrée à la Sacem sous le nom La Bicyclette.
Probablement un des morceaux les plus connus de Montand avec Les feuilles mortes, et sans aucun doute une des plus belles œuvres de la chanson française. Et quelle touchante version que celle figurant dans le documentaire de Guy Job Montand international, où l’on voit une admiratrice dans le public chanter les paroles de concert avec l'artiste.
Retrouvez toutes ces chansons dans le prochain coffret 100e anniversaire 12 CD qui regroupe pour la première fois la discographie intégrale d'Yves Montand de 1945 à 1989, avec 298 titres.
Sortie le 29 octobre chez Panthéon / Mercury / Universal.
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