Plongée dans le cheminement créatif de Georges Brassens avec la vente de 22 manuscrits originaux chez Artcurial le 22 septembre
Georges Brassens avait confié les manuscrits de ses chansons à son copain Fred Mella des Compagnons de la Chanson. Son fils Michel disperse ce precieux legs le 22 septembre chez Artcurial, où les documents sont exposés à partir du 17 septembre.
Les admirateurs du compositeur et interprète Georges Brassens le savent : l’auteur de Chanson pour l’Auvergnat était très exigeant avec son art. Il polissait ses textes longtemps avant d’en être satisfait, modifiant une phrase, ébauchant un vers, changeant un mot, jusqu'à toucher au but. L’objectif ? Ajuster parfaitement les mots et les notes, le verbe et la mélodie, et livrer un texte limpide sans être prévisible.
Quoi de mieux pour observer ce travail sans cesse remis sur l’ouvrage que les textes manuscrits de ses chansons, maintes fois raturés, annotés, recopiés ?
Peu ont assisté au travail du poète moustachu
La vente Artcurial, qui dispersera 22 documents autographes originaux de Georges Brassens le 22 septembre, permet une plongée rare dans son processus créatif.
D’autant plus rare, que bien peu sont ceux qui ont pu lire par-dessus l’épaule du poète lorsqu’il écrivait : ce moment de création il n’aimait pas le partager.
Comment ne pas être impressionné par le travail minutieux du poète à polir ses vers pour obtenir la chanson qui lui correspond et plaît au public ?
Frédéric HarnischDirecteur du département Livres et Manuscrits de Artcurial
"Tous ces éléments qui font Brassens, sont là, dans ces manuscrits à peine raturés", continue-t-il. "S’y côtoient des listes de mots d’un même champ lexical, des tentatives de constructions de strophes et de chansons, et des versions définitives aussi."
Brassens avait confié ses manuscrits à son copain Fred Mella
L’auteur de Les Copains d’abord, qui chérissait les mots mais aussi l’amitié, avait donné les manuscrits de ses chansons à son grand ami Fred Mella du groupe Les Compagnons de la Chanson, disparu l’an dernier. C’est son fils Michel Mella, 69 ans, qui a décidé de disperser ce précieux legs.
La date de la vente, le 22 septembre, n’a pas été choisie au hasard : elle est un clin d’œil à la chanson Le 22 septembre, dans laquelle Brassens joue l’amoureux éconduit passé à autre chose, chaque couplet se terminant par "Le 22 septembre, aujourd’hui je m’en fous". Les manuscrits de la chanson en présentent différentes versions, avec des mouvements de mots et d'idées d'un vers ou d'une strophe à l'autre (estimation du manuscrit autographe entre 6.500 et 8.000 euros).
Des manuscrits riches d'enseignements
Parmi les autres manuscrits figurent celui de Le Vieux Léon (photo ci-dessus), l'histoire d'un type qui jouait de l'accordéon dans les rues de Vanves, une "très rare chanson en vers de 4 pieds de Brassens dans lesquels on voit ses tâtonnements sur des feuillets écrits recto verso" (estimation 14.000 à 18.000 euros).
On remarque aussi les 74 pages de Le Blason, qui "présentent la première version de la chanson alors intitulée Révérence Parler et montrent l’ampleur des recherches et des retouches" pour aboutir (estimation 10.000 à 15.000 euros).
Quant aux brouillons de Le Grand chêne, ils révèlent le cheminement de l’auteur pour aller vers la subtilité afin d’évoquer sa vie d’artiste en s’inspirant de La Fontaine - "l'un des poètes que j'estime le plus" disait Brassens - et de sa fable du Chêne et du roseau (estimation 12.000 à 18.000 euros).
"Les quatre bacheliers", inspiré d'un épisode de son adolescence
En vente également, parmi les manuscrits de La Fessée, La Religieuse, Le Bulletin de santé ou Supplique pour être enterré à la plage de Sète, celui de Les quatre bacheliers (estimé de 1.500 à 2.000 euros), une chanson qui se réfère à un épisode de sa jeunesse. A l'adolescence, Brassens se rend coupable avec quelques amis d'une série de larcins dans sa ville natale de Sète, afin d'offrir des fleurs aux filles. Dénoncés, ils sont condamnés et il écope de quinze jours de prison avec sursis, ce qui fait scandale et met sa mère, très pieuse, en émoi, précipitant son départ pour Paris.
C'est son père, Jean-Louis, qui vient le chercher au poste sans lui adresser le moindre reproche alors que les autres parents se disent trahis par leur progéniture. Pour exprimer sa gratitude, le chanteur moustachu en fit une chanson. "Quand il vint chercher son voleur, sans vergogne, on s'attendait à un malheur. Mais il n'a pas déclaré, non, sans vergogne, que l'on avait sali son nom. Dans le silence on l'entendit, sans vergogne, qui lui disait : Bonjour petit (...) Mais je sais qu'un enfant perdu (...) a de la chance quand il a, sans vergogne, un père de ce tonneau-là." Par égard pour son père, Brassens ne la chanta qu'après sa mort.
Dans la version du manuscrit en vente, seul un couplet a été barré et ne figure pas dans la chanson telle qu'on la connaît : "N'a pas crié dorénavant, ce ne sera plus mon enfant".
Les manuscrits autographes de la vente Brassens sont exposés du jeudi 17 au lundi 21 septembre (de 11h à 18h) chez Artcurial avant la mise en vente le mardi 22 septembre à 18h. Artcurial, 7 rond-point des Champs Elysées 75008 Paris
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