Quand Brel suppliait "ne me quitte pas", l'histoire d'une chanson incomprise
Il faut entendre la chanson, il faut surtout voir Brel l'interpréter. Il met dans son regard toute la supplication que les mots, même d'une extrême impudeur, ne peuvent pas apporter. Brel ne considère pas "Ne me quitte pas" comme une chanson d'amour mais comme le portrait d'un homme lâche, renonçant à toute dignité en espérant ainsi regagner la femme qui le quitte. La pire solution bien sûr.
Il va si loin que la phrase la plus violente de cette résignation "laisse moi devenir.../... l'ombre de ton chien" sera expurgée par des artistes lors de leur reprise de la chanson, ainsi Barbara qui saute simplement le vers, sans même l'adapter. C'est au point que de "Ne me quitte pas", à l'origine destinée à une interprète féminine, Edith Piaf dira dans une phrase restée célèbre "Un homme ne devrait pas chanter des trucs comme ça !". Il est vrai qu'à l'époque, l'image de l'homme véhiculée dans les chansons à la mode était plus macho, virile et pour tout dire un peu crétine. L'un des grands succès de 1959 (l'année de sortie de "Ne me quitte pas") était un refrain interprété par Eddie Constantine et intitulé "Cigarettes, whisky et p'tites pépées" !
Reportage : L. Hakim / T. Breton / L. Calvy / T. Mongellaz / R. Schilaci / H. Possetto
Jacques Brel a enregistré trois fois "Ne me quitte pas". La première en 1959, la deuxième en 1961 en langue flamande et enfin en 1972 lors d'une séance de réenregistrement de chansons de son répertoire.
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