L'Orchestre national de Lille fait son retour en prison
L'ouverture de la Flûte enchantée de Mozart, la Symphonie n°8 de Dvorak : une cinquantaine de détenus de la maison d'arrêt de Sequedin (Nord) se sont évadés, pendant une heure, de la vie carcérale mercredi, grâce à un concert donné par l'Orchestre national de Lille (ONL).
Ces 54 détenus, hommes et femmes, certains déjà condamnés, d'autres en détention provisoire, bénéficiaient d'un partenariat entre l'ONL et l'administration pénitentiaire, initié en 1986 sous l'égide du chef d'orchestre Jean-Claude Casadesus.
"Notre façon de nous évader"
Devenu un rendez-vous annuel en 1995, ce concert en prison n'avait pas pu avoir lieu depuis 2019 en raison de l'épidémie de Covid-19. En tenue de ville, les 70 musiciens de l'ONL ont joué dans un gymnase de cette maison d'arrêt.
Pédagogue, le chef d'orchestre Victor Jacob, 32 ans, révélation (ex aequo) aux Victoires de la musique classique 2023, a présenté les deux œuvres aux détenus, définissant en quelques mots une symphonie ou un accord et chantonnant pour faire comprendre la différence entre modes mineur et majeur.
"La musique, c'est notre façon de nous évader, de nous exprimer. L'idée, ce matin, c'était vraiment d'amener notre petit bout artistique, d'évasion, de nouvelles couleurs, de nouvelles ambiances, à ceux qui voient les mêmes murs très souvent", a-t-il expliqué à l'AFP, après avoir été applaudis chaudement par certains détenus, plus timidement par d'autres.
"J'étais loin dans mes pensées"
"Je croyais que je n'allais pas aimer mais j'aime bien", a confié Salim (les prénoms des détenus ont été modifiés) à la fin du concert. "C'est quelque chose de nouveau, je n'avais jamais entendu un orchestre et pendant tout ce temps-là, j'ai cru que je n'étais vraiment pas en détention, j'étais loin dans mes pensées."
"Quand on sort de notre cellule et du couloir où on vit, on se sent un peu libre", a résumé Laetitia, mère de garçons d'une vingtaine d'années avec lequel elle écoute plutôt du rap. "On se dit qu'à l'extérieur, il y a quelque chose qui vit et qui nous attend".
Dans le prolongement de ce concert, trois ateliers pédagogiques doivent être proposés à une dizaine de détenus d'ici la fin 2023, un dispositif inédit à Sequedin.
Ces détenus, déjà inscrits dans un parcours scolaire en détention, bénéficieront d'une introduction à l'orchestre puis, en présence d'une musicothérapeute, pourront s'essayer eux-mêmes à la pratique musicale, avant de rencontrer des musiciens de l'ONL.
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