Caribou signe avec "Our Love" un des grands albums de 2014
Caribou c'est Daniel Snaith, 36 ans, Canadien installé à Londres depuis une dizaine d'années. Après avoir sévi d'abord sous le nom de Manitoba, troqué pour celui de Caribou en 2005, ce musicien, producteur, dj et remixeur accompli a prouvé qu'il ne connaît pas le surplace. Ni les œillères. Débuté avec des explorations krautrock puis pop psychédéliques, il a peu à peu fait sienne la musique électronique, devenue son idiome de prédilection ces dernières années. Il s'est même créé un pseudo, Daphni, pour sortir ses productions dance, matière première de ses sets de dj.
Paru en 2010, son 5e album "Swim" avait enflammé la sphère électronique avec des titres comme "Odessa" et "Sun". Foumillant d'idées, de détails, de textures et de couches, cet album était une construction séduisante de techno-house mélodique, presque pop. Mais avec une rigueur et une maniaquerie où affleurait encore le docteur en mathématiques (poétique) qu'est Dan Snaith.
La réaction enthousiaste du public à ce disque, dont il a pu apprécier la fièvre en tournée notamment en première partie de Radiohead, a poussé Caribou à composer non plus pour lui seul comme il admet l'avoir longtemps fait, mais surtout pour les autres.
Avec "Our Love", il voulait, dit-il, offrir cette fois à son public un disque "accueillant". Pas question pour autant pour ce musicien exigeant proche de Four Tet et de Owen Pallett (tous deux impliqués sur ce disque à des degrés divers) de tomber dans le piège qui consiste à donner en pâture aux foules ce qu'elles attendent avec des recettes éprouvées.
Hier dissimulé derrière l'imaginaire et la fiction, il a pris confiance en tant que musicien et de l'assurance en tant que chanteur (sa voix apporte beaucoup d'humanité sur ce nouvel album très synthétique) et dit avoir souhaité mettre autant de lui que possible dans sa musique. Réaliser un disque personnel et intime mais suffisamment ouvert sur l'extérieur pour refléter aussi l'époque.
Inspiré de Stevie Wonder
"Je me suis toujours fixé comme objectif de faire de la musique qui me corresponde, de ne pas sonner comme quelqu'un d'autre", disait-il dans le numéro de septembre du magazine Tsugi qui lui consacrait sa couverture. Mais "même si je suis fier de mes disques précédents, ils étaient tous tributaires d'une musique du passé. Ca m'a toujours gêné (…) Maintenant je veux faire des disques qui sonnent de leur époque. Si ça sonne daté dans deux ans je m'en accommoderais."
Très "excité" par les nouvelles sonorités audacieuses du R&B, il s'est pourtant tourné une fois encore vers le passé en réécoutant avec attention les classiques de Stevie Wonder, principale inspiration avouée, où il a puisé la chaleur, le côté charnel et la simplicité (relative) de son nouveau disque.
Toutes les facettes de l'amour
"Our Love" est un album électronique romantique et émotif mais jamais niais, où sont convoquées toutes les nuances de l'amour, y compris les moins agréables (ennui, séparation, dépendance), à l'aide de simples phrases répétées en boucle.
Un disque dansant et hypnotique, mais tout du long délicat et audacieux. Du somptueux "Can't Do Without You", qui ouvre l'album à l'enivrant "Your Love will set you free" qui le referme comme une leçon de vie, en passant par le sensuel "Our Love" et le R&B détraqué de "Second Chance" avec la voix de la productrice Jessy Lanza, ce grand disque vibre de la sincérité de son auteur qui a su transmettre ses sentiments les plus intimes et sa sensibilité via ses machines. Un album qu'on a hâte de découvrir sur scène (à noter que Jessy Lanza sera présente avec lui au Pitchfork Festival).
"Our Love" de Caribou (City Slang / PIAS) est sorti le 6 octobre 2014
En concert le 21 octobre à Villeurbanne, le 22 à Lille et le 1er novembre à Paris (Pitchfork Festival) puis à nouveau dans la capitale le 11 mars avec une date unique à l'Olympia.
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