Cet article date de plus d'onze ans.
Ed Banger fĂŞte ses 10 ans : interview en 10 photos
Alors qu'on fête l'anniversaire du plus créatif des labels électroniques, son patron Pedro Winter et son directeur artistique Bertrand de Langeron (alias So-Me) ont accepté de regarder dans le rétroviseur. Nous leur avons soumis 10 images comme autant de thématiques, afin d'éclairer les recoins d'une maison de qualité connue dans le monde entier qui a su garder l'esprit de famille.
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Temps de lecture : 17min
1. LES LOGOS ED BANGER
Pedro : à l’origine, Bertrand (So-Me) avait fait une photo de moi dans mon bureau, alors que je partais mixer quelque part. A l’époque, il se moquait tout le temps de moi parce que je traînais un trolley de grand-mère bourré de disques vinyles, qui pesait 800 kg. Bon, aujourd’hui c’est plus facile avec une clé USB (rires). Et donc, le premier logo est né de cette photo, redessinée en deux coups de crayon sur un coin de table par So-Me.
Pourquoi avoir changé de logo il y a deux ans ?
So-Me : Parcequ’on a toujours changé. Il y en a même eu un autre entre les deux (celui du blason). Nous ne sommes pas soumis à la règle du logo figé comme peut l’être Nike puisque nous ne sommes pas une entreprise normale. On aime changer de peau. C’est une autre façette à chaque fois, une évolution, qui n’efface pas forcément la précédente. 2. LE PREMIER ALBUM SORTI SUR ED BANGER (et le premier album de Dj Mehdi sur le label)
Pedro (il scrute la pochette, songeur) : Incroyable, tous ces petits détails, c’est sans doute une des plus belles pochettes de So-Me…
So-Me : je crois me souvenir que je t’ai rendu cette pochette avec trois semaines de retard parce que j’ai passé beaucoup de temps à la faire…
Pedro : et peut-être même trois mois en retard, si tu veux tout savoir… (rires)
C’est un disque super important, puisque c’est le premier album sorti sur le label, il marque le moment où on a decidé que le label allait devenir une entreprise sérieuse. Je le dis avec le sourire mais il y avait quand même l’idée de s’inscrire dans la durée. On ne s’est pas mis les mains dans les poches : on a fait des clips, d’ailleurs So-Me a fait le premier,  « I Am Somebody », on a organisé une tournée, on a mis des moyens en place pour défendre ce super disque. Aujourd’hui, il revêt un caractère un peu différent mais justement je suis super heureux d’avoir pu passer autant de temps avec Mehdi, d’avoir été à ses côtés pour ses deux albums solo, puisque pour le premier sorti sur Delabel j’étais déjà son manager. Même si c’est moi qui dirige Ed Banger et Bertrand qui le drive, Mehdi faisait partie de notre binôme. Finalement, c’était un duo à trois cette aventure. Et donc il nous manque beaucoup.
Qu’est-ce que le label doit à Mehdi ?
Pedro : d’abord, le label ne serait pas né puisque c’est lui qui a trouvé le nom. Ensuite, avec sa capacité à parler à tout le monde, il a eu un rôle de trait d’union entre tous les artistes. D’ailleurs, sa musique est aussi un trait d’union entre le rap et l’électro, deux mondes qui naviguent d’habitude en parallèle. Il a amené à Ed Banger son premier album, son regard, son oreille attentive, ses bras pour nous cajoler, sa bonne humeur et moi particulièrement son amitié éternelle et nos voyages parce que les dernières années nous voyagions tout le temps ensemble. Lucky Boy, ça lui va tellement bien ! Nous nous sommes rencontrés en 1998 à New York par l’intermédiaire de Hubert et Philippe de Cassius. Il produisait alors « Les Princes de la ville » du 113 et il m’a demandé d’être son manager. Nous sommes aussitôt devenus amis. Je lui ai fait découvrir la musique électronique, lui il m’emmenait à l’Elysée Montmartre voir les concerts d’Ideal J. C’était drôle, il était toujours accompagné d’un grand blond aux cheveux longs, moi, et ses petites cousines me toisaient en demandant « t’es qui ? ». Je me souviens d’une d’elles lui disant «J’espère que tu ne seras jamais coiffé comme lui !». 3. LA "FAMILLE" ED BANGER
Pedro : comme la famille est un concept qui revient souvent à notre propos, je tiens à préciser que ce n’est pas un truc qu’on entretient. Si nous sommes souvent en groupe c’est parce qu’on a envie de partager. Il faut dire qu’en tournée, surtout pour les dj’s, être tout seul c’est vraiment pas fun, tu te fais chier comme un rat mort. Nous au moins avec Mehdi on avait des anecdotes ! A deux ou a trois tu te lâches plus, tu fais des connaissances et surtout tu ramènes des souvenirs. D’ailleurs, Mehdi me manque aussi beaucoup pour ça, parce qu’il était la mémoire du label, il était capable de ressortir tous les détails de ce que tu avais fait, dit ou mangé à tel ou tel endroit.
Il y a quand même une bonne ambiance chez Ed Banger. Quelqu’un qui ne s’inscrirait pas là dedans ca ne marcherait pas ?
So-Me : pas forcément, parce que comme dans toute bande il y a des grandes gueules et il y a ceux qui sont plus introvertis et qui font tout autant partie du truc. S’il n’y a que des grandes gueules, on ne s’entend plus.
Cette ambiance colonie de vacances limite-t-elle votre champ musical ? Est-ce qu’un groupe de rock garage pourrait être signé chez Ed Banger ?
Pedro : pourquoi pas ? J’ai toujours rêvé d’un groupe de rock !
Mais il faut pouvoir partir en tournée et jouer tous ensemble…
Pedro : mais aujourd’hui tu peux très bien mettre un groupe de rock avec un dj après. Tiens, je suis en train de bosser sur la programmation des Eurockéennes de Belfort (Les Plages de Pedro du samedi, c’est un scoop !), et ça ne me fait pas peur de proposer Mykki Blanco (rap), Dinosaur Jr (rock) et Kavinsky (électro) ! 4. AMANDINE ROMERO, COLLABORATRICE DE PEDRO WINTER
Pedro : Amandine est arrivée à la rescousse en 2005, alors qu’on sortait « Waters of Nazareth » de Justice. Maintenant, elle fait partie de l’aventure. J’ai toujours eu du mal à déléguer, je le reconnais, mais pas dans un souci de contrôle. J’avais envie de m’impliquer, de vivre les expériences, et avec le temps, Amandine a pris plus de place dans Ed Banger. Aujourd’hui elle chapeaute, elle donne son avis artistique sur les choses. Mais je ne pense pas qu’elle va finir sa vie professionnelle chez nous, elle a déjà des idées pour la suite, des envies personnelles d’autre chose, ce que je peux comprendre. Sept ans a sortir les disques d’une bande de zigotos et à leur rappeler des dead-lines tous les jours !
C’est ça son rôle en fait ?
So-Me : non, c’est juste l’aspect le moins créatif de son travail. Mais c’est vrai qu’au jour le jour, les musiciens sont une bande d’autistes. Sans personne derrière eux, Breakbot, Sebastian et Gaspard iraient boire des apéros sans fin…
Une vibration féminine c’est important dans le label ? C’est la seule fille...
So-Me : Pedro apporte déjà une bonne vibration féminine (sourire)
Pedro : non mais c’est vrai en plus, tu viens de le dire avec le sourire mais c’est tellement vrai !
Tu es une vraie mère poule, une maman ?
Pedro : exactement. 5. KANYE WEST
So-Me : ah oui, c’est le sapeur de Château Rouge, tu sais du club Titan ! (rires). ) Kanye West nous a donné malgré lui un joli coup de pouce à un moment donné, à Justice, à moi et au label. Tu connais l’histoire : Justice ne peuvent pas se rendre aux MTV Awards pour recevoir le prix du meilleur clip, j’y vais à leur place, il monte sur scène et se plaint de ne pas avoir gagné en direct, scandale mondial.  Cela nous a rendu service et d'ailleurs c'est le premier truc qu'il m'a dit ce jour-là en coulisses. Il vient me voir et il me dit « You guys are gonna look good and I'm gonna look stupid » , genre au final c'est vous qui allez être gagnants, il en était déjà conscient. A ce moment là , je me suis dit : si le mec est malin, il va regarder un peu ce qu'on fait et il va nous proposer de collaborer.
Et un an après, je reçois un coup de fil, alors que j'étais à New York dans une fête avec Dj Mehdi et A-Trak qui était alors le Dj live de Kanye West. A-Trak me dit « Kanye veut venir te voir, il a adoré le clip de  "D.A. N.C.E." avec les T-shirts animés de Justice ». Et ce sans DU TOUT faire le rapprochement avec ce qui s'était passé aux MTV Awards !" (lire ici la suite de cette histoire savoureuse) 6. LE CLIP "EMBODY" DE SEBASTIAN (un de nos clips préférés au monde, signé So-Me)
Pedro : je me souviens encore du moment où Bertrand nous a présenté l’idée du clip. J’ai adoré l’idée mais je me suis dit « comment va-t-il réaliser ça ? ». Et à l’arrivée c’était fluide.
Bertrand, comment as-tu eu cette idée ?
So-Me : Tout est parti du fait que la voix de ce morceau est synthétique. J’ai voulu lui donner corps, lui donner un visage. Au départ, j’ai imaginé avec Sebastian que ce morceau serait chanté par un gamin. Et puis de fil en aiguille, nous avons écarté l’idée du playback, finalement pas si originale, et on a dérivé sur l’idée du gamin qui incarnait la présence du morceau sur différents lieux en dansant. Après, il a fallu trouver quelqu’un pour personnifier le truc. Pour le casting, qui se déroulait à Los Angeles, j’ai vu plein de danseurs, qui étaient tous super techniques, très breakdance. Mais moi je cherchais un gamin plutôt Michael, qui aie du swing et du swag. Le gamin qu’on a trouvé est génial. Hélas, je crois que ses parents, que j’ai essayé de recontacter en vain par la suite, n’ont pas pris conscience qu’il s’agit d’une vraie star. 7. LES RESEAUX SOCIAUX (sur lesquels Ed Banger est  très présent depuis toujours)
Pedro : J’en parle souvent en disant que je crois avoir bien « dompté » ce média. J’entends beaucoup de gens se plaindre au sujet du non respect de la vie privée etc… Mais moi je ne me sens absolument pas débordé par Facebook, tu donnes ce que tu as envie de donner, personne ne te force à montrer tes photos de vacances. Pour Ed Banger, je suis derrière tout : c’est toujours moi qui répond sur les comptes Twitter, Facebook, Instagram. J’aime bien aussi comme outil personnel mais aujourd’hui j’ai moins le temps, je préfère me concentrer sur le label. C’est crucial le rapport avec les fans sur les réseaux sociaux. On l’a vite compris puisqu’on était le premier label en France sur Myspace. D’ailleurs quand ils se sont implantés en France, la directrice de Myspace est carrément venue nous soumettre le casting de Myspace France ! 8. JUSTICE
Pedro : c’est qui ? Connaît pas.
So-Me : c’est Toxic Avengers !
Dites nous quelque chose qu’on ne sait pas sur Xavier et Gaspard ?
Pedro et So-Me en chœur (et morts de rire) : ils ne se supportent pas !
Qu’est ce qui vous bluffe le plus chez eux ?
So-Me : leur intelligence depuis le début. Gaspard est mon meilleur ami et Xavier également et je suis toujours impressionné par leur bon sens et leur vivacité d’esprit. Ils sont vraiment fûtés, ils sont malins, quoi.
Pedro : malins mais bornés. Si je peux leur reprocher quelque chose, c’est ça.
So-Me : tu parles de Xavier, là ...
Pedro : oui, allez, je t’avoue, avec Justice c’est plus dur qu'avec Daft Punk (que Pedro Winter a longtemps managé avant de monter son label).
(Ebahie) C’est vrai ?
So-Me : ils sont relax en fait, Daft Punk !
Pedro : Attends, Daft Punk c’est des control-freaks comme t’imagines même pas ! Mais Xavier il atteint des sommets.
So-Me : chez Xavier, c’est pathologique…
Ca cache une anxiété non ?
Pedro : sans doute, mais je ne peux pas faire la thérapie en direct…
So-Me : c’est surtout une détermination sans bornes. Et tout terrain. Rien n’ébranlera ça. Une détermination qui l’a mené là où il est aujourd’hui.
Pedro : et tant mieux pour nous car cela nous a aussi menés où nous sommes aujourd’hui avec Ed Banger ! 9. LES DISQUES VINYLES
Pedro : j’ai un rapport assez fétichiste avec l’objet. Aujourd’hui, nous sortons chez Ed Banger des disques vinyles pour notre propre plaisir, donc c’est très égoïste, mais je suis toujours ému par l’objet. Alors bien sûr on trouve de moins en moins de magasins pour les vendre, de moins en moins de distributeurs et de moins en moins de platines pour les jouer. Moi-même je ne mixe quasi plus au vinyle. Mais on persiste, on en sort toujours un pour chaque disque.
So-Me : et on en vend un…
Pedro : eh mais tu sais quoi ce serait mortel de faire ça ! On en presse qu’un seul. Et on le vend genre 1.500 euros. Ca défoncerait ça ! (rires)
Mais vous en vendez un peu quand mĂŞme ?
Pedro : on s’en sort. Mais ça ne rapporte rien. C’est un luxe, on va dire.
So-Me : on est encore une maison « de disques » après tout. Ca va peut-être survivre finalement car c’est le support qui a le plus un caractère d’objet.
Pedro : il faut préciser que chacun de nos maxis vinyles est accompagné d’un petit code MP3 qui permet de les télécharger en supplément. A nous aussi de nous creuser la tête pour rendre l’objet désirable et moderne. 10. LA FETE DES 10 ANS
Que peut-on souhaiter au label pour les 10 ans à venir ?
So-Me : Continuer à s’amuser et à faire les choses qui nous plaisent sans avoir de pression particulière, continuer à prendre les choses de manière insouciante et faire de notre mieux.
La fête des dix ans le 1er mars à la Villette sera réussie si…
Pedro : si les gens sortent avec le sourire. J’ai imaginĂ© cette soirĂ©e comme une fĂŞte foraine, il y a un endroit qu’on appellera le Ed Banger Land. On s’est lâchĂ©s, j’ai envie que les gens Ă©coutent la musique et dansent bien sĂ»r, mais pas que ça. Je voudrais qu’ils passent aussi un peu de temps Ă s’amuser. Pour ceux qui ne pourront faire le dĂ©placement, le concept de streaming avec SFR Live Concert est assez ambitieux. On ne voulait pas mettre juste une camĂ©ra, on en voulait quatre ou cinq diffĂ©rentes pour que le public puisse interagir avec la lumière, les angles de vues. Et on pourra mĂŞme poser des questions en direct Ă So-Me...Â
Pedro : à l’origine, Bertrand (So-Me) avait fait une photo de moi dans mon bureau, alors que je partais mixer quelque part. A l’époque, il se moquait tout le temps de moi parce que je traînais un trolley de grand-mère bourré de disques vinyles, qui pesait 800 kg. Bon, aujourd’hui c’est plus facile avec une clé USB (rires). Et donc, le premier logo est né de cette photo, redessinée en deux coups de crayon sur un coin de table par So-Me.
Pourquoi avoir changé de logo il y a deux ans ?
So-Me : Parcequ’on a toujours changé. Il y en a même eu un autre entre les deux (celui du blason). Nous ne sommes pas soumis à la règle du logo figé comme peut l’être Nike puisque nous ne sommes pas une entreprise normale. On aime changer de peau. C’est une autre façette à chaque fois, une évolution, qui n’efface pas forcément la précédente. 2. LE PREMIER ALBUM SORTI SUR ED BANGER (et le premier album de Dj Mehdi sur le label)
Pedro (il scrute la pochette, songeur) : Incroyable, tous ces petits détails, c’est sans doute une des plus belles pochettes de So-Me…
So-Me : je crois me souvenir que je t’ai rendu cette pochette avec trois semaines de retard parce que j’ai passé beaucoup de temps à la faire…
Pedro : et peut-être même trois mois en retard, si tu veux tout savoir… (rires)
C’est un disque super important, puisque c’est le premier album sorti sur le label, il marque le moment où on a decidé que le label allait devenir une entreprise sérieuse. Je le dis avec le sourire mais il y avait quand même l’idée de s’inscrire dans la durée. On ne s’est pas mis les mains dans les poches : on a fait des clips, d’ailleurs So-Me a fait le premier,  « I Am Somebody », on a organisé une tournée, on a mis des moyens en place pour défendre ce super disque. Aujourd’hui, il revêt un caractère un peu différent mais justement je suis super heureux d’avoir pu passer autant de temps avec Mehdi, d’avoir été à ses côtés pour ses deux albums solo, puisque pour le premier sorti sur Delabel j’étais déjà son manager. Même si c’est moi qui dirige Ed Banger et Bertrand qui le drive, Mehdi faisait partie de notre binôme. Finalement, c’était un duo à trois cette aventure. Et donc il nous manque beaucoup.
Qu’est-ce que le label doit à Mehdi ?
Pedro : d’abord, le label ne serait pas né puisque c’est lui qui a trouvé le nom. Ensuite, avec sa capacité à parler à tout le monde, il a eu un rôle de trait d’union entre tous les artistes. D’ailleurs, sa musique est aussi un trait d’union entre le rap et l’électro, deux mondes qui naviguent d’habitude en parallèle. Il a amené à Ed Banger son premier album, son regard, son oreille attentive, ses bras pour nous cajoler, sa bonne humeur et moi particulièrement son amitié éternelle et nos voyages parce que les dernières années nous voyagions tout le temps ensemble. Lucky Boy, ça lui va tellement bien ! Nous nous sommes rencontrés en 1998 à New York par l’intermédiaire de Hubert et Philippe de Cassius. Il produisait alors « Les Princes de la ville » du 113 et il m’a demandé d’être son manager. Nous sommes aussitôt devenus amis. Je lui ai fait découvrir la musique électronique, lui il m’emmenait à l’Elysée Montmartre voir les concerts d’Ideal J. C’était drôle, il était toujours accompagné d’un grand blond aux cheveux longs, moi, et ses petites cousines me toisaient en demandant « t’es qui ? ». Je me souviens d’une d’elles lui disant «J’espère que tu ne seras jamais coiffé comme lui !». 3. LA "FAMILLE" ED BANGER
Pedro : comme la famille est un concept qui revient souvent à notre propos, je tiens à préciser que ce n’est pas un truc qu’on entretient. Si nous sommes souvent en groupe c’est parce qu’on a envie de partager. Il faut dire qu’en tournée, surtout pour les dj’s, être tout seul c’est vraiment pas fun, tu te fais chier comme un rat mort. Nous au moins avec Mehdi on avait des anecdotes ! A deux ou a trois tu te lâches plus, tu fais des connaissances et surtout tu ramènes des souvenirs. D’ailleurs, Mehdi me manque aussi beaucoup pour ça, parce qu’il était la mémoire du label, il était capable de ressortir tous les détails de ce que tu avais fait, dit ou mangé à tel ou tel endroit.
Il y a quand même une bonne ambiance chez Ed Banger. Quelqu’un qui ne s’inscrirait pas là dedans ca ne marcherait pas ?
So-Me : pas forcément, parce que comme dans toute bande il y a des grandes gueules et il y a ceux qui sont plus introvertis et qui font tout autant partie du truc. S’il n’y a que des grandes gueules, on ne s’entend plus.
Cette ambiance colonie de vacances limite-t-elle votre champ musical ? Est-ce qu’un groupe de rock garage pourrait être signé chez Ed Banger ?
Pedro : pourquoi pas ? J’ai toujours rêvé d’un groupe de rock !
Mais il faut pouvoir partir en tournée et jouer tous ensemble…
Pedro : mais aujourd’hui tu peux très bien mettre un groupe de rock avec un dj après. Tiens, je suis en train de bosser sur la programmation des Eurockéennes de Belfort (Les Plages de Pedro du samedi, c’est un scoop !), et ça ne me fait pas peur de proposer Mykki Blanco (rap), Dinosaur Jr (rock) et Kavinsky (électro) ! 4. AMANDINE ROMERO, COLLABORATRICE DE PEDRO WINTER
Pedro : Amandine est arrivée à la rescousse en 2005, alors qu’on sortait « Waters of Nazareth » de Justice. Maintenant, elle fait partie de l’aventure. J’ai toujours eu du mal à déléguer, je le reconnais, mais pas dans un souci de contrôle. J’avais envie de m’impliquer, de vivre les expériences, et avec le temps, Amandine a pris plus de place dans Ed Banger. Aujourd’hui elle chapeaute, elle donne son avis artistique sur les choses. Mais je ne pense pas qu’elle va finir sa vie professionnelle chez nous, elle a déjà des idées pour la suite, des envies personnelles d’autre chose, ce que je peux comprendre. Sept ans a sortir les disques d’une bande de zigotos et à leur rappeler des dead-lines tous les jours !
C’est ça son rôle en fait ?
So-Me : non, c’est juste l’aspect le moins créatif de son travail. Mais c’est vrai qu’au jour le jour, les musiciens sont une bande d’autistes. Sans personne derrière eux, Breakbot, Sebastian et Gaspard iraient boire des apéros sans fin…
Une vibration féminine c’est important dans le label ? C’est la seule fille...
So-Me : Pedro apporte déjà une bonne vibration féminine (sourire)
Pedro : non mais c’est vrai en plus, tu viens de le dire avec le sourire mais c’est tellement vrai !
Tu es une vraie mère poule, une maman ?
Pedro : exactement. 5. KANYE WEST
So-Me : ah oui, c’est le sapeur de Château Rouge, tu sais du club Titan ! (rires). ) Kanye West nous a donné malgré lui un joli coup de pouce à un moment donné, à Justice, à moi et au label. Tu connais l’histoire : Justice ne peuvent pas se rendre aux MTV Awards pour recevoir le prix du meilleur clip, j’y vais à leur place, il monte sur scène et se plaint de ne pas avoir gagné en direct, scandale mondial.  Cela nous a rendu service et d'ailleurs c'est le premier truc qu'il m'a dit ce jour-là en coulisses. Il vient me voir et il me dit « You guys are gonna look good and I'm gonna look stupid » , genre au final c'est vous qui allez être gagnants, il en était déjà conscient. A ce moment là , je me suis dit : si le mec est malin, il va regarder un peu ce qu'on fait et il va nous proposer de collaborer.
Et un an après, je reçois un coup de fil, alors que j'étais à New York dans une fête avec Dj Mehdi et A-Trak qui était alors le Dj live de Kanye West. A-Trak me dit « Kanye veut venir te voir, il a adoré le clip de  "D.A. N.C.E." avec les T-shirts animés de Justice ». Et ce sans DU TOUT faire le rapprochement avec ce qui s'était passé aux MTV Awards !" (lire ici la suite de cette histoire savoureuse) 6. LE CLIP "EMBODY" DE SEBASTIAN (un de nos clips préférés au monde, signé So-Me)
Pedro : je me souviens encore du moment où Bertrand nous a présenté l’idée du clip. J’ai adoré l’idée mais je me suis dit « comment va-t-il réaliser ça ? ». Et à l’arrivée c’était fluide.
Bertrand, comment as-tu eu cette idée ?
So-Me : Tout est parti du fait que la voix de ce morceau est synthétique. J’ai voulu lui donner corps, lui donner un visage. Au départ, j’ai imaginé avec Sebastian que ce morceau serait chanté par un gamin. Et puis de fil en aiguille, nous avons écarté l’idée du playback, finalement pas si originale, et on a dérivé sur l’idée du gamin qui incarnait la présence du morceau sur différents lieux en dansant. Après, il a fallu trouver quelqu’un pour personnifier le truc. Pour le casting, qui se déroulait à Los Angeles, j’ai vu plein de danseurs, qui étaient tous super techniques, très breakdance. Mais moi je cherchais un gamin plutôt Michael, qui aie du swing et du swag. Le gamin qu’on a trouvé est génial. Hélas, je crois que ses parents, que j’ai essayé de recontacter en vain par la suite, n’ont pas pris conscience qu’il s’agit d’une vraie star. 7. LES RESEAUX SOCIAUX (sur lesquels Ed Banger est  très présent depuis toujours)
Pedro : J’en parle souvent en disant que je crois avoir bien « dompté » ce média. J’entends beaucoup de gens se plaindre au sujet du non respect de la vie privée etc… Mais moi je ne me sens absolument pas débordé par Facebook, tu donnes ce que tu as envie de donner, personne ne te force à montrer tes photos de vacances. Pour Ed Banger, je suis derrière tout : c’est toujours moi qui répond sur les comptes Twitter, Facebook, Instagram. J’aime bien aussi comme outil personnel mais aujourd’hui j’ai moins le temps, je préfère me concentrer sur le label. C’est crucial le rapport avec les fans sur les réseaux sociaux. On l’a vite compris puisqu’on était le premier label en France sur Myspace. D’ailleurs quand ils se sont implantés en France, la directrice de Myspace est carrément venue nous soumettre le casting de Myspace France ! 8. JUSTICE
Pedro : c’est qui ? Connaît pas.
So-Me : c’est Toxic Avengers !
Dites nous quelque chose qu’on ne sait pas sur Xavier et Gaspard ?
Pedro et So-Me en chœur (et morts de rire) : ils ne se supportent pas !
Qu’est ce qui vous bluffe le plus chez eux ?
So-Me : leur intelligence depuis le début. Gaspard est mon meilleur ami et Xavier également et je suis toujours impressionné par leur bon sens et leur vivacité d’esprit. Ils sont vraiment fûtés, ils sont malins, quoi.
Pedro : malins mais bornés. Si je peux leur reprocher quelque chose, c’est ça.
So-Me : tu parles de Xavier, là ...
Pedro : oui, allez, je t’avoue, avec Justice c’est plus dur qu'avec Daft Punk (que Pedro Winter a longtemps managé avant de monter son label).
(Ebahie) C’est vrai ?
So-Me : ils sont relax en fait, Daft Punk !
Pedro : Attends, Daft Punk c’est des control-freaks comme t’imagines même pas ! Mais Xavier il atteint des sommets.
So-Me : chez Xavier, c’est pathologique…
Ca cache une anxiété non ?
Pedro : sans doute, mais je ne peux pas faire la thérapie en direct…
So-Me : c’est surtout une détermination sans bornes. Et tout terrain. Rien n’ébranlera ça. Une détermination qui l’a mené là où il est aujourd’hui.
Pedro : et tant mieux pour nous car cela nous a aussi menés où nous sommes aujourd’hui avec Ed Banger ! 9. LES DISQUES VINYLES
Pedro : j’ai un rapport assez fétichiste avec l’objet. Aujourd’hui, nous sortons chez Ed Banger des disques vinyles pour notre propre plaisir, donc c’est très égoïste, mais je suis toujours ému par l’objet. Alors bien sûr on trouve de moins en moins de magasins pour les vendre, de moins en moins de distributeurs et de moins en moins de platines pour les jouer. Moi-même je ne mixe quasi plus au vinyle. Mais on persiste, on en sort toujours un pour chaque disque.
So-Me : et on en vend un…
Pedro : eh mais tu sais quoi ce serait mortel de faire ça ! On en presse qu’un seul. Et on le vend genre 1.500 euros. Ca défoncerait ça ! (rires)
Mais vous en vendez un peu quand mĂŞme ?
Pedro : on s’en sort. Mais ça ne rapporte rien. C’est un luxe, on va dire.
So-Me : on est encore une maison « de disques » après tout. Ca va peut-être survivre finalement car c’est le support qui a le plus un caractère d’objet.
Pedro : il faut préciser que chacun de nos maxis vinyles est accompagné d’un petit code MP3 qui permet de les télécharger en supplément. A nous aussi de nous creuser la tête pour rendre l’objet désirable et moderne. 10. LA FETE DES 10 ANS
Que peut-on souhaiter au label pour les 10 ans à venir ?
So-Me : Continuer à s’amuser et à faire les choses qui nous plaisent sans avoir de pression particulière, continuer à prendre les choses de manière insouciante et faire de notre mieux.
La fête des dix ans le 1er mars à la Villette sera réussie si…
Pedro : si les gens sortent avec le sourire. J’ai imaginĂ© cette soirĂ©e comme une fĂŞte foraine, il y a un endroit qu’on appellera le Ed Banger Land. On s’est lâchĂ©s, j’ai envie que les gens Ă©coutent la musique et dansent bien sĂ»r, mais pas que ça. Je voudrais qu’ils passent aussi un peu de temps Ă s’amuser. Pour ceux qui ne pourront faire le dĂ©placement, le concept de streaming avec SFR Live Concert est assez ambitieux. On ne voulait pas mettre juste une camĂ©ra, on en voulait quatre ou cinq diffĂ©rentes pour que le public puisse interagir avec la lumière, les angles de vues. Et on pourra mĂŞme poser des questions en direct Ă So-Me...Â
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