Eurovision 2024 : on vous résume les tensions autour de Joost Klein, le candidat des Pays-Bas, exclu avant la finale

Le chanteur fait l'objet d'une enquête de la police suédoise pour "intimidation" après un incident jeudi. Le diffuseur néerlandais, qui a reconnu un "mouvement menaçant" envers une camérawoman, dénonce une sanction "disproportionnée". L'attitude de l'artiste envers la candidate israélienne avait aussi été remarquée.
Article rédigé par franceinfo
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Joost Klein, représentant des Pays-Bas à l'Eurovision, sur un écran le 10 mai 2024, lors de la deuxième répétition générale. (ANDREAS HILLERGREN / TT NEWS AGENCY / AFP)

L'un des favoris ne montera pas sur scène. L'Union européenne de radiodiffusion (UER), qui organise l'Eurovision, a exclu du concours le candidat néerlandais Joost Klein, samedi 11 mai à la mi-journée. Un nouveau coup de théâtre qui a alourdi l'ambiance déjà pesante qui entoure le concours. Dans un communiqué, l'organisation explique que la police suédoise enquête sur "une plainte d'une femme membre de l'équipe de production à la suite d'un incident survenu après sa prestation lors de la demi-finale de jeudi soir". 

"Pendant que la procédure judiciaire suit son cours, il ne serait pas approprié qu'il continue à participer au concours", ajoute l'UER, rappelant appliquer "une politique de tolérance zéro à l'égard des comportements inappropriés". Interrogée par l'AFP, la police suédoise a confirmé avoir ouvert une enquête pour "intimidation". Ce qui était reproché au candidat des Pays-Bas restait flou jusqu'à ce que le diffuseur néerlandais de l'Eurovision, l'Avrotros, livre sa version de l'incident sur X, expliquant que son candidat avait eu un "mouvement menaçant" envers une camérawoman qui le filmait sans son accord.

Avant même ce coup de théâtre, l'ambiance était particulièrement lourde autour de cette édition très politique, la participation d'Israël suscitant une forte réprobation d'une partie du public et de plusieurs candidats, à commencer, justement, par Joost Klein.

Des tensions avec la délégation israélienne

Les premières tensions remontent à mercredi. Alors que Joost Klein avait refusé d’apparaître sur les réseaux sociaux aux côtés de la candidate israélienne Eden Golan, il a été filmé par Keren Peles, l'autrice de la chanson israélienne Hurricane, manifestement à son insu. Sur Instagram, celle-ci poste ensuite son film et écrit : "Le représentant néerlandais ne nous aime pas et nous a demandé de ne pas le prendre en photo. J'ai respecté son souhait et j'ai pris une photo de notre charmante danseuse." Cette vidéo et le message qui l'accompagnent, perçus par beaucoup comme une provocation, ont rapidement été massivement relayés sur les réseaux sociaux, en particulier sur TikTok, mettant le feu aux poudres.

Rappelons qu'Eden Golan, 20 ans, a décroché jeudi soir son ticket pour la finale avec la chanson Hurricane, réécrite à la demande des organisateurs du concours. Son titre initial, October Rain et ses paroles, faisaient référence, de façon implicite mais très claire, aux attaques du Hamas qui ont ensanglanté Israël le 7 octobre, un message jugé trop politique par l'UER alors qu'Israël mène une opération militaire dans la bande de Gaza.

Une conférence de presse chahutée

Le lendemain, jeudi, lors de la conférence de presse qui suit la demi-finale de la compétition, Joost Klein attire l'attention en marquant ostensiblement son désaccord avec le fait d'être placé non loin de la représentante israélienne. Le chanteur aux larges épaulettes et cheveux peroxydés couvre sa tête du drapeau néerlandais à plusieurs reprises.

Joost Klein en conférence de presse, avec les participants retenus pour la finale de l'Eurovision, à Malmö, en Suède, le 9 mai 2024. (JESSICA GOW / TT NEWS AGENCY / AFP)

La tension monte lorsqu'un journaliste demande à l'Israélienne Eden Golan si elle ne pense pas que sa participation au concours pourrait entraîner un danger pour les autres candidats et pour le public. Sa présence et les menaces pesant sur elle ont en effet conduit à renforcer la sécurité autour de l'événement, avec davantage de contrôles pour accéder aux différents sites de l'Eurovision, et des policiers venus en renforts de Norvège et du Danemark.

Voyant que la candidate hésite à répondre, un homme assis à côté d'elle lui précise : "Vous n'êtes pas obligée de répondre à la question si vous ne le souhaitez pas". Joost Klein, le visage alors entièrement recouvert par son drapeau, se découvre et lâche alors "Why not ?", que l'on peut traduire par "Pourquoi ne devrait-elle pas répondre ?". La séquence a beaucoup circulé en ligne, certains saluant son courage, d'autres critiquant son attitude jugée méprisante. Eden Golan a répondu en assurant que l'UER "prend toutes les précautions nécessaires pour que cela se passe bien". 

Le candidat absent à une répétition générale

La situation s'envenime vendredi. Alors que Joost Klein participe à la "parade des drapeaux" avec les autres compétiteurs, il ne monte pas sur scène lors de la deuxième répétition générale. "Nous enquêtons actuellement sur un incident qui nous a été signalé concernant l'artiste néerlandais. Il ne répétera pas jusqu'à nouvel ordre", fait savoir l'UER vendredi après-midi, sans donner plus de détails sur la nature de l'incident. Les spéculations vont bon train et, dans la foulée, Joost Klein supprime toutes ses stories sur son compte Instagram et se désabonne du compte de l’Eurovision.

Une journaliste suédoise du quotidien Aftonbladet, essaye d'en savoir plus et tente de l'interroger. Mais le candidat ne lui répond pas et s'engouffre dans un ascenseur, tout sourire. "Même en temps de crise, Joost Klein reste Joost Klein", relève le journaliste néerlandais Hans Groenendijk sur X. Mais vendredi soir, selon la chaîne suédoise SVT, la police de Malmö se rend sur place et interroge le suspect et les témoins. "Il est soupçonné de menaces illégales", déclare samedi matin le porte-parole de la police suédoise, relayé par la chaîne.

L'exclusion jugée "disproportionnée"

Le communiqué de l'UER annonçant l'exclusion de Joost Klein tombe samedi midi. L'organisation reste floue sur la nature des faits, mais affirme qu'une membre de la production s'est plainte à la police après un "incident" dans la foulée de la demi-finale, et que le "comportement inapproprié" de Joost Klein ne permet pas "qu'il continue la compétition". La police suédoise confirme à l'AFP, dans la foulée, l'ouverture d'une enquête pour "intimidation".

Les réactions ne tardent pas. Le système de radiodiffusion publique néerlandais NPO qualifie la décision de "très radicale" "C'est une déception pour les millions de fans de l'Eurovision aux Pays-Bas et dans d'autres pays européens". L'animateur néerlandais Cornald Maas, qui commente l'Eurovision aux Pays-Bas, n'est pas plus tendre avec une sanction qu'il juge "disproportionnée et honteuse", sur X. La chanteuse albanaise Besa Kokëdhima, qui a échoué en demi-finale jeudi, exprime son soutien à Joost Klein : "S'il vous plaît, laissez Joost participer", écrit-elle sur le même réseau social. "Le timing est trop court pour clarifier les choses et prendre des positions officielles. Il ne peut pas être pénalisé du jour au lendemain."

Le diffuseur de l'Eurovision aux Pays-Bas, Avrotros, qui s'était dit dans un premier temps "choqué" de l'exclusion du candidat national, livre sa version des faits dans un communiqué. Reconnaissant un "mouvement menaçant" de Joost Klein envers une camérawoman, l'entreprise explique qu'il "ne l'a pas touchée", et présente le geste comme une réaction au fait d'avoir été filmé à son insu : "Joost a indiqué de façon répétée qu'il ne voulait pas être filmé. Cela n'a pas été respecté". "Nous défendons les bonnes manières (...) mais à nos yeux, une exclusion n'est pas proportionnelle à cet incident", déplore le diffuseur néerlandais, à moins de trois heures de la finale. Une prise de position à laquelle les organisateurs n'ont, pour l'heure, pas répondu.

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