Fès, un "sacré" festival !
Pas tant que cela. D'abord par son ampleur. Le festival de Fès attire des dizaines de milliers d'amateurs, on pourrait presque dire de pèlerins. Ensuite par la qualité des artistes qui viennent s'y produire. Enfin parce que dans le contexte actuel d'intolérance, d'intégrisme, de violence, de terrorisme, de guerres sur fond de religions, réunir des musulmans, des chrétiens, des juifs, des animistes, des bouddhistes et des hindouistes sur une même scène relève effectivement du miracle.
"Avec ce qui se passe sur le plan international, la montée des extrémismes et des radicalismes il est plus important que jamais de marteler ce message du vivre ensemble, de découvrir d'autres cultures. Je pense que tout ça rend les gens beaucoup plus ouvert", explique le président du festival, Abderafie Souitene. "En Europe, il y a une montée de la peur de la différence, une tendance à se replier. Ce que nous essayons de faire, c'est de rester ouvert et d'accueillir les autres".
La soirée d'ouverture était l'illustration de ce miracle. Dans le cadre majestueux de bab Makina, une des multiples portes monumentales de la ville de Fès, une dizaine de tableaux nous ont offert un tour du monde de ce qui est le plus sacré dans des pays aussi différents que l'Égypte ou la Chine, l'Inde ou l'Espagne, le Brésil ou le Mali, sur le thème de l'eau, thème du festival. Références bibliques, comme le déluge, islamiques comme le mythe du prophète Younes qui calmait les tempêtes en invoquant Allah (avant d'être avalé par un poisson géant), ou tout simplement écologiques, pour des peuples où l'eau est sacrée, qu'elle manque ou qu'elle soit abondante.
Sacré et religieux
« Sacré ne veut pas dire forcément religieux, explique Abderafie Souitene. Chaque peuple et même chaque individu a quelque chose de sacré qui mérite le respect, quelque chose qui a une valeur extraordinaire, ça peut être ou ne pas être une religion... » Est sacré tout ce qui fait partie de la culture profonde d'un peuple, de sa tradition, de son existence même. Sacrés, le flamenco pour les andalous, la poésie chantée "Amarg" pour les peuples de la plaine du Souss (sud du Maroc, à l'est d'Agadir) ou le blues pour les anciens esclaves du sud des États Unis.
Invitée d'honneur du festival, la Chine a délégué au Maroc une partie de la troupe du théâtre Wu, vieux de plus de 400 ans et porteur de la grande tradition du théâtre-opéra chinois, qui mêle danse, acrobatie, chant et musique. Sacrée entre toute, la figure du dragon qui apporte la pluie, essentielle pour l'agriculture. Il représente aussi l'empereur, la puissance de la nation et est le symbole du yang, principe de vie et de croissance.
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