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"Re Focus", le clin d'œil de Sylvain Rifflet au légendaire Stan Getz

Depuis son adolescence, le saxophoniste Sylvain Rifflet voue une grande admiration pour son illustre aîné Stan Getz. Fasciné par "Focus", un album du jazzman américain lancé en 1961, il s'est inspiré de son esprit et de son casting, un quartet de jazz et des cordes, pour son nouveau projet discographique baptisé "Re Focus" en guise de clin d'œil. Mais il ne s'agit nullement d'un remake. Rencontre.
Article rédigé par Annie Yanbekian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Sylvain Rifflet
 (Sylvain Gripoix)

Deux ans après le brillant "Mechanics", qui lui a valu une Victoire du Jazz en 2016 dans la catégorie Album de l'année, Sylvain Rifflet, 41 ans, apporte une nouvelle pièce à une œuvre très personnelle avec "Re Focus", sorti le 15 septembre 2017 chez Verve / Universal. Le saxophoniste en a composé l'essentiel du répertoire, avec des contributions de Fred Pallem, patron du fameux Sacre du Tympan, qui signe tous les arrangements. Mais le titre de l'album fait directement allusion au "Focus" du saxophoniste Stan Getz, grande source d'inspiration de Rifflet.

Dans la mémoire collective, le nom de Stan Getz (1927-1991), saxophoniste au son chaud, sensuel et feutré, est spontanément associé à la bossa nova, le jazzman américain ayant participé à des disques emblématiques de ce courant musical né au Brésil à la fin des années 50. Mais Getz, surnommé "The Sound" (le son), c'est aussi une discographie très dense qui court de 1947 à l'année de sa mort. Et parmi ces disques, il y a "Focus" (Verve, 1961), un album ambitieux dans lequel Stan Getz associait un quartet de jazz à un ensemble de cordes pour interpréter une suite écrite et arrangée par Eddie Sauter, et dont l'ouverture s'inspirait d'une œuvre de Béla Bártok.

C'est cet esprit, ce mélange de jazz et de classique, qui a fortement inspiré Sylvain Rifflet au moment de se lancer dans ce projet enregistré, côté jazz, avec le vibraphoniste Guillaume Lantonnet, le contrebassiste Simon Tailleu et le batteur américain Jeff Ballard, et côté classique, avec l'ensemble Appassionato. Après un concert mercredi 18 octobre au Tourcoing Jazz Festival, il présente "Re Focus" jeudi 19 octobre à Paris, au Flow.


- Culturebox : Qu'est-ce qui rapproche le plus votre album "Re Focus" du "Focus" de Stan Getz ?
- Sylvain Rifflet : Le principal point de rapprochement, c'est l'orchestration. C'est un disque pour orchestre à cordes et saxophone, de la même manière que l'était "Focus". Les deux disques empruntent l'instrumentation que Bártok a utilisée pour son œuvre "Musique pour cordes, percussions et célesta". Toutefois, avec Fred Pallem, on a un peu simplifié les choses. On a enlevé le célesta, la harpe, ainsi que le piano qui figure dans "Focus", remplacés par le vibraphone et le marimba.

- Donc, ce qui distingue votre album de celui qui vous a inspiré, c'est le remplacement de certains instruments, et bien sûr le répertoire.
- Absolument. D'un point de vue esthétique, à part les deux premiers morceaux qui sont vraiment des clins d'œil à "Focus" car j'avais envie de faire un renvoi historique à ce disque, "Re Focus" ne comporte que des morceaux que j'ai écrits, ou coécrits avec Fred Pallem. Ils n'ont pas grand-chose à voir avec la musique de 1961. Quant à moi, bien qu'ayant toujours été influencé par Stan Getz en tant que saxophoniste, je ne crois pas que je joue comme lui ! "Re Focus", ce n'est pas vraiment un hommage. C'est une espèce d'à-propos, avec l'idée de reprendre la même formation, une instrumentation un peu spécifique.

Par ailleurs, "refocus" écrit en un seul mot, c'est aussi, pour moi, une façon de me recentrer sur les choses qui m'ont toujours passionné, le jazz et tout ce qu'on peut trouver dans toutes les musiques que j'écoute, que j'aime. Et parmi tout cela, il y a évidemment Stan Getz et ce disque. Le fait de refaire un disque qui reprenne ce format assez exceptionnel aujourd'hui, et de le faire pour le label Verve [ndlr : "Focus" était sorti sur ce célèbre label de jazz], c'est quelque chose dont je rêvais depuis toujours... Un rêve de gamin.


- Qu'est-ce qui vous a tant touché dans "Focus" ?
- Il y a un dialogue extraordinaire entre les cordes et le saxophone. Bien plus qu'un rôle d'accompagnement, les cordes y jouent une partie concertante, compliquée. Ce format singulier me plaît beaucoup. Il permet au saxophoniste de ne pas jouer, de jouer contre, de jouer avec, de dialoguer... La partition des cordes donne plein de possibilités pour improviser, que ce soit sur le disque ou en concert. C'est génial et je pense que c'est pour ça que j'aime ce disque.

- Que représente Stan Getz pour vous ?
- Il fait partie des saxophonistes que j'ai découverts très tôt dans ma vie de musicien, vers l'âge de 13 ou 14 ans. Je n'ai pas découvert "Focus" tout de suite, plutôt vers la fin de l'adolescence. Ce disque a été un vrai choc. À cette période, Stan Getz était encore vivant et avait sorti un autre album que j'adore, "People Time", enregistré en duo avec Kenny Barron. J'ai trouvé chez Getz un truc très fort, très personnel, inatteignable et génial : il avait un son complètement unique qui m'a toujours touché. Il avait trouvé une espèce de tonalité de saxophone invraisemblable... Pour moi, avoir un son, un truc personnel, immédiatement identifiable, ça a toujours représenté quelque chose de fondamental.
 
Sylvain Rifflet en concert à Paris
Jeudi 19 octobre 2017 au Flow, 20h30
> Tout l'agenda de Sylvain Rifflet dans la rubrique Concerts de son site

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